La jeune fille se baladait dans un château, ce devait être en France, vêtue d’une longue robe vert anis d’un raffinement rare comme on en voit plus de nos jours. Sin admirait son reflet dans chaque fenêtre, chaque miroir qu’elle croisait. Elle était infiniment jolie avec ce teint de porcelaine typiquement aristocratique. La jeune Midnight se sentait à cet endroit comme chez elle et chaque pas qu’elle faisait, chaque regard qu’elle lançait à la ronde en était une preuve irréfutable. La pièce était remplie. Elle salua à droite, elle salua à gauche, ceux et celles qui étaient dignes de son intérêt. Soudain il entra. Lui dans sa blondeur si parfaite, lui dans ce complet ardoise qui le rendait tellement élégant. La blonde se dirigea à pas lents vers lui, comme si rien d’autre n’existait au monde, comme s’ils étaient tous deux les pôles d’un même aimant. Les yeux plongés dans son regard océan, elle lui demanda doucement : « Des bonnes nouvelles ? » Le regard embarrassé d’Aleksandar fit s’évanouir son sourire : « C’est la fin, April, je vais aider mon frère, Kilian, maintenant » Des larmes apparurent aux coins des yeux de la jeune femme « Kelian, non, s’il te plait, ne me laisse pas … ». Le jeune homme regarda le bout de ses chaussures avant de déclarer : « C’est la fin de ton monde, April, je ne périrais pas avec toi … » Le jeune homme tourna les talons et sortit, sans un regard pour elle. Il venait de la trahir, pour son frère, pour une bande de révolutionnaires ! Malgré la foule, la jeune fille cria « NOOOOOOOOOOOOOOOOOOON! »

« NOOOOOOOOOOOOOOOOOOON! » Sin se réveilla en sursaut dans son lit du dortoir de Serpentards. La respiration haletante, elle regarda l’heure. Deux heures du matin. Elle sortit de son lit, enfila un rapidement les vêtements qu’elle avait laissé au bas de sn lit quelques heures auparavant et sortit sans davantage de bruit du dortoir. La porte fermée, elle se prit la tête dans les mains sans l’intention d’aller plus loin et murmura doucement : « Ma pauvre vieille, Aleksandar Hallen t’a vraiment bousillé le cerveau » Oui franchement, ce cauchemard avait été des plus réaliste, comme si elle l’avait déjà vécu en fait, et ces noms bizarres lui semblaient pourtant familiers. Une étrange impression qui la faisait se sentir nauséeuse. Sin fit quelques pas dans la salle commune avant de remarquer une présence en face d’elle. Alek. Par la barbe de Merlin, était-il là depuis le début ou … ? Choisissant la solution de facilité, elle fit comme si elle ne l’avait pas vu, se dirigeant vers le buffet le plus proche où elle se servit un verre d’eau. Le cœur encore battant, elle s’assit en tailleurs sur le canapé en face du feu, les yeux absorbés par les flammes, elle sentait les yeux du jeune Hallen lui transpercer le dos. Mais elle ne se retourna pas. Elle ne voulait tout simplement pas lui parler. Elle avait l’impression que c’était lui qui l’avait trahi et pas ce Kelian qui avait trahi la elle-April. Ce sentiment était vraiment bizarre et plus elle y pensait, plus elle sentait le mal de crâne arriver. Le silence bourdonnait dans ses oreilles, Sin sentait qu’elle pouvait défaillir à tout moment. Ne pas se retourner, ne pas le regarder, ne pas lui parler et ça irait mieux. Du moins elle l’espérait. Si il pouvait juste … partir. Mais ce n’était apparemment pas dans les plans du blond car elle pouvait toujours sentir sa présence derrière lui. La jeune Midnight lui envoya autant de mauvaises ondes qu’elle pouvait possiblement faire passer, espérant que le message serait bien clair : elle ne voulait pas lui parler, elle ne pouvait pas lui parler !

« Si je ne te connaissait pas autant j’aurais tendance à penser que tu m’en veux. Quel crime horrible suis-je censé avoir commis ? » Sin lui lança un regard assassin avant de reporter ses yeux d'ambre sur les flammes. Elle n’avait pas envie de lui parler, pas envie de lui répondre. La jeune Midnight se sentait vraiment mal et pire, elle ne pouvait pas l’expliquer, ce qui était loin de la faire se sentir mieux. Oui, elle avait vécu ce rêve comme si c’était d’elle dont il s’était agit, ce qui était ridicule. Mais elle sentait que cela n’était pas anodin, elle devait en prendre compte, elle n’avait pas le choix. En plus, elle sentait que ça aurait tout à fait été le genre du jeune homme de la trahir pour son frère. Après tout, où était-il d’ailleurs celui-là, hein? Il préparait un mauvais coup, elle pouvait le jurer. Le silence lourd s’installa … elle n’avait pas envie de le briser mais sentit bientôt qu’elle n’avait pas le choix. Non pas qu’elle allait répondre à sa question, non, loin de là, c’est sur. Sans détourner les yeux du feu, toujours en tailleurs, les mains posée sur les genoux, comme si elle faisait du yoga, elle demanda d’une voix presque tremblante : « Il va bien ton frère? » Oui, elle n’allait rien dire de plus. Que pouvait-elle dire de toute manière … la blonde était prise d’une peur irrationnelle qui ne la quitterait pas de si tôt à moins d’un miracle. Ce qui n'était pas prêt de se produire. Les yeux toujours rivés sur la cheminée, sans ciller, comme si elle avait été récemment soumise à un Impero, ce qui était loin d'être le cas, puisque c'était elle qui les lançait, elle rêvait que le regard d'Alek cesse de lui transpercer le dos car il ne faisait qu'augmenter le malaise en elle. Loin de se douter réellement de la vraie signification de son rêve, la jeune blonde n'était cependant pas assez inconsciente pour ne pas en tenir compte : malgré le fait qu'elle avait toujours considéré la divination comme un art inutile, Sin savait que les rêves nous définissaient, qu'ils ne faisait que retranscrire ce que notre inconscient tentait de nous dire pour nous avertir, ou encore d'autres disaient que cela ne faisait que traduire nos peurs. Que ce soit l'un ou l'autre, ça ne convenait absolument pas à la jeune femme : soit son inconscient la prévenait qu'Alek allait vientôt la trahir, soit elle avait peur que ce fut le cas. Rien de bien réjouissant donc. Mais par la barbe de Merlin, ne pouvait il pas poser les yeux ailleurs que sur elle?

Sans détourner les yeux du feu, la jeune femme attendait la réponse du jeune homme … qui vint d’une manière inattendue … elle sentit le contact de la main du jeune homme sur sa cuisse avant qu’elle ne remonte le long de son dos dans une caresse presque indésirable. Presque. La volonté de la blonde avait beau être de fer, elle se sentait déjà flancher alors que l’auteur du jeune homme venant murmurer à son oreille l’envoutait déjà : « Aleksander est bien loin de préoccuper mes pensée à l’heure qu’il est… » Aleksandar semblait sur de lui, comme s’il sentait que la jeune Midnight n’allait pas opposer de forte résistance bien longtemps. Mais avec ce qu’elle avait dit en sortant du dortoir et qu’il avait certainement entendu, rien de bizarre à cela supposait-elle. La jeune femme regrettait son erreur de ne pas avoir vérifier que la salle commune était vide avant de laisser libre cours à ses humeurs. C’était peut-être le moment de rectifier les choses. Prenant l’air de la jeune femme innocente que cet élan d’audace n’aurait pas adouci, elle se retourna et abattit sans pitié sa main sur la joue du jeune Hallen. Une gifle mémorable certainement, mais peut-être pas autant que celle que l’âme de la jeune femme avait prise cette nuit. Plantant son regard de jade dans celui d’Alek elle lui dit un mi-voix, d’un ton froid qu’elle aimait utiliser pour terrifier ceux qui avaient bien raison de la craindre : « Tu ne semble douter de rien, Hallen, je suppose que tu n’as pas encore eu le temps d’apprendre les bonnes manières. » Elle l’avait appelé par son nom de famille, chose plutôt courante au château, mais cela avait sonné de sa bouche presque comme une insulte. Peut-être l’attaquait elle ouvertement sur le fait que sa famille n’avait pas prit son éducation en charge, éducation d’un sang pur que lui comme elle, elle le savait bien, trouvaient essentiels. Les yeux de la demoiselle Midnight lançaient des éclairs et si son regard avait pu désintégrer tout ce qu’il touchait il ne serait pas resté grand-chose dans la pièce. S’éloignant du jeune homme, elle retourna vers la cheminée et au spectacle apaisant des flammes. Sans le regarder, elle ajouta : « Tu ne jouera pas avec moi, Alek, c’est fini. Je ne serais pas une autre de tes nombreuses conquêtes, j’ai plus de classe que ça. » De sa phrase, elle venait de marquer la fin de leur petit jeu … d’une manière qu’aucun des deux n’avait attendue. L’histoire semblait avoir voulu les rassembler, mais elle venait de s’en détacher froidement, presque sans sentiments. Et quelque part, cette petite part qui avait engendré le cauchemars qui l’avait tiré du lit, certainement, semblait bien soulagée de cette décision. Ne restait plus qu’à attendre la réaction d’Alek …

Les mains d’Alek se refermèrent sur la blonde comme un piège sur sa proie. Sin était maintenant forcée de le regarder dans les yeux, le regard du jeune Hallen avait quelque chose d’absolument dérangeant et le ton de sa voix en disait certainement autant que ses yeux : « Et si ce n’était pas un jeu ? Et si tu étais celle que j’avais choisit pour être mienne ? Serait tu capable de m’ouvrir ton cœur ou n’y a-t-il a la place qu’un bloc de glace à la place du cœur ? » La jeune Midnight se prit la réplique du jeune homme comme une baffe en pleine figure, mais elle venait de lui en donner une vraie, alors elle acceptait le un de prêté pour un de rendu. Ce qu’elle n’acceptait pas en revanche, c’était la ferme prise d’Alek sur ses bras qui l’empêchait de faire le moindre mouvement. Se tortillant quelques instant, elle finit par accepter le fait qu’il allait falloir qu’elle lui donne une réponse. Choisissant de répondre dans l’ordre et avec méthode, elle pesait chacun de ses mots, le souvenir encore brûlant de son cauchemar bien présent dans son esprit : « Tout d’abord, Alek, tu as joué avec toutes celles qu’on peut te connaître, à part ma « cousine » apparemment, mais ça c’est une autre histoire. » Il aurait pu tout aussi aisément lui retourner la remarque, mais Sin trouvait qu’elle avait fait preuve de beaucoup plus de sentiments que lui depuis le départ. Et pour quoi, songeait-elle … Elle poursuivit donc, toujours fidèle à ses principes et à ces révélations du sommeil : « Ensuite choisie ou non, jeu ou pas jeu, mon cher, je ne suis à personne, on est au 21ème siècle … » Cette réflexion-là était plus destinée à remettre les pendules à l’heure. Elle était de ces filles indépendantes à qui on ne dicte pas sa conduite malgré son éducation de parfaite petite sang pur, et si au premier abord, ces deux visions semblait se contredire, elle en faisait un amalgame parfait.

La dernière question, par contre, elle se la reçu comme un poignard en plein cœur qu’un sadique aurait joué à tournicoter dans tous les sens. L’expression ravagée de la blonde de son cauchemar s’imposait toujours à son esprit, et si elle fermait les yeux, elle savait qu’elle pourrait voir l’expression froide et impassible du jeune homme qui ressemblait tellement à celui qu’elle avait maintenant en face d’elle. Rien de cela n’avait de sens, mais Sin s’était depuis peu rendue compte que rien de ce qui les concernait tout les deux n’en avait. Se mordant la lèvre inferieure comme si elle avait peur de ce qui pourrait franchir sa bouche, elle finit néanmoins par dire : « Je ne demande que ça de t’ouvrir mon cœur, Aleksandar, mais je n’ai aucune certitude que tu en sois digne. En quoi puis-je te faire confiance ? Tu pourrais aussi bien me trahir à la seconde où il sera tien et m’anéantir en quelques instants. Quelles preuves peux-tu me donner de ta bonne foi ? » La jeune Midnight venait plus ou moins de lui déclarer ouvertement ce qu’elle ressentait. C’est une chose qu’elle n’avait jamais fait et ce sentiment nouveau de se mettre à nu par la simple parole n’était pas pour lui convenir. Elle se sentait des plus mal à l’aise et voulait remédier à cet inconfort. Pour cela, il aurait fallu qu’elle explique également au beau blond ce qu’elle avait vu cette nuit, mais elle ne pouvait s’y résoudre pour l’instant, il la prendrait pour une folle. Et malgré le fait qu’elle sache que c’était parfaitement insensé, loin de la rationalité dont elle faisait habituellement preuve, la demoiselle Midnight ne pouvait s’empêcher de douter, d’avoir des craintes d’une taille conséquente … la peur semblait vouloir l’emporter sur n’importe quoi d’autre. Sin se mit à trembler comme une feuille d’un arbre sur le point de se décrocher. En fait, seules les mains du jeune homme semblaient la tenir encore sur ses deux pieds. La petite blonde savait ce qu’il lui fallait. Il lui fallait du temps pour digérer tout ça, mais le temps semblait bien être la seule chose qu’Alek ne voulait pas lui donner.

« Manifesterais-tu là une certaine jalousie inavoué ? Je trouve ça flatteur. Mais sache que parfois tel est pris qui croyait prendre… » Sin leva les yeux au ciel de manière à désavouer cette affirmation que personne d’autre n’aurait osé lui faire. On ne disait pas ce genre de choses à la demoiselle si on tenait un temps soit peu à sa tête. C’était une insulte, ça c’était sur, mais la jeune femme n’argumenterait pas plus loin. Sin Midnight n’était jamais jalouse, de personne, c’était elle la meilleur, la plus parfaite, elle s’était assez battue pour le prouver. Elle ne dit rien de plus à ce sujet, continuant la conversation comme si, finalement, elle n’avait rien entendu, ce qui était pourtant loin d’être le cas, il venait de lui jeter en pleine figure qu’elle était jalouse de sa cousine, qui allait se marier avec son ex-fiancé et qui était la seule à être jamais vraiment sortie avec celui qui hantait ses nuits, franchement, on fait plus délicat, mais passons, elle lui avait bien relancé le sujet de sa famille précédemment, elle ne pouvait pas lui en vouloir. La suite de la conversation allait de toute façon dans le sens des déclarations, elle ne pouvait plus reculer sous prétexte d’ego froissé, ils n’en étaient plus là. Quand la blondinette finit enfin de parler, un silence lourd s’abattit sur la salle commune, on n’entendait que le crépitement des flammes dans l’unique cheminée allumée en cette heure tardive pour les élèves insomniaques ou dans son cas à elle, qui avaient dormi d’un sommeil bien trop profond pour leur propre bien.

Les secondes s’égrenaient, et la sang pur cru que jamais le sieur Hallen n’ouvrerait la bouche. S’en était à lui faire regretter ses paroles. Malheureusement, quand des mots ont été dit on ne peut pas les reprendre, parler a un caractère irrévocable par définition. Mais enfin, quand elle ne l’espérait plus, Alek dit calmement : « Un sermon inviolable ». Sin resta interloquée, un frisson lui parcouru l’échine. Ce n’était pas à l’évocation de cette pratique magique si sombre qui lui provoquait cette réaction, venant de la famille Midngiht, elle n’avait vu pratiqué plus d’une fois. Assez justement pour savoir qu’on ne se défait pas d’un serment inviolable comme on claque des doigts. Et c’était cet aspect irrémédiable qui la terrifiait. Elle ressentait quelque chose de fort pour le blond, elle ne pouvait le renier, mais de là à s’engager pour une vie entière, il y avait des limites aux yeux de la jeune femme. Mais le jeune homme était il conscient de ce qu’il venait de dire? Ne serait-il pas le premier à vouloir s’en défaire ? Les sentiments, ce n’est pas comme une promesse, ça va, ça vient, ça ne se fixe pas toujours. Mais c’était toujours un bon début malgré le fait que c’était carrément flippant. Elle avait néanmoins besoin de temps pour y réfléchir, aux termes de ce « contrat » surtout. C’est pourquoi elle lui dit, parlant presque sur un ton de businessman qui dénotait fortement avec son attitude précédente : « J’ai besoin d’une semaine ou deux pour y réfléchir, et que toi aussi tu y réfléchisse. A ce que je peux réellement te jurer, à ce que tu peux réellement me jurer. » C’était étonnamment raisonnable de la part de la jeune fille qui d’habitude aurait foncé tête baissé sans se poser de questions avec le premier gars venus, voilà qu’elle se mettait à discuter des conditions d’un serment inviolables. C’était carrément anti-romantique comme situation, mais elle ne voulait pas se tromper, ça ferait trop mal … vraiment. Mais nous parlons quand même de Sin Midnight, elle ne put donc s’empêcher d’avoir une idée particulièrement incongrue à partager ; « Juste comme ça, tu compterais demander à qui de nous e jeter ce fameux sortilège ? » La jeune femme cacha un petit sourire en coin. Elle ne pouvait s’imaginer aucun élève de ce château pouvoir lancer un sort de ce genre. La seule chose qu’elle espérait c’était qu’il ne lui demande pas de faire appel à un membre de sa famille, qui, de toute manière, désapprouverait qu’elle fréquente, quelque soit la nature de la relation d’ailleurs, un Hallen.