Klaus était dans le petit salon de l’appartement qu’il partageait avec Avril et bien entendu Gustav. Il aimait à venir travailler dans cette pièce de temps à autre, cela le détendait un peu. Simple effet psychologique à vrai dire, mais quand on était dans un fauteuil de type Angleterre des années 30, c’était toujours mieux que devant sa table de travail en acajou massif, sombre et austère, parfaite pour les études. Le jeune homme s’offrit même le luxe d’un petit thé (préparé par Gustav, est ce qu’il avait vraiment une tête à savoir faire du thé franchement ?). Assis là, avec son code dans une main et sa baguette dans l’autre, Klaus étudiait, encore et toujours, il avait vraiment l’impression de ne faire que ca dernièrement. En soi ca ne le déranger pas de travailler autant, pris entre ses deux formations, son rôle de futur duc et d’étudiant à Ealdwic. Ca ne le dérangeait pas, mais il savait qu’il ne passait vraiment pas assez de temps avec sa sœur bien aimée, Theli mais aussi avec Nate qui était après tout son meilleur ami. Mais Klaus, en roi de l’organisation, s’arrangeait pour les voir le plus possible, pas assez certes, mais il essayait, c’était le principal non ?
Fatigué, Klaus s’étira longuement et posa la tête sur le dossier du canapé, ayant donc maintenant vue sur le plafond. D’un blanc cassé impeccable, Klaus le voyait de plus en plus souvent au fur et à mesure que la journée avancée. Clairement il lui fallait une petite pause. L’allemand posa donc son livre sur la table basse et se dirigea vers la fenêtre. La pluie tombait sur le sol londonien, Klaus ne l’avait même pas remarqué avant. Il ne pouvait même pas se plaindre de cette caractéristique-là de la ville, ce n’était pas bien mieux dans son Allemagne natale. Son esprit était d’ailleurs perdu dans les profondeurs de la forêt noire lorsqu’il entendit quelqu’un entrer dans l’appartement. Il savait bien qui s’était, il ne se serait jamais trompé quant à une arrivée d’Avril. Mais celle-ci avait un goût humide de pluie anglaise… Il se retourna vers la porte d'entrée et fronça légèrement les sourcils, mécontent.

« Avril ? »

Revoir Maël. Retrouver Audran. Embrasser Sholto. Il semblait que cette journée ne devait être qu'une longue succession de mauvaises surprises et d'échec. Elle s'était littéralement enfuie tout droit vers le seul endroit où elle ne serait jamais déplacée: l'appartement qu'elle partageait avec Klaus et Gustav. Un endroit où l'oiseau pouvait battre en retraite, se couper du monde ou même se cacher pour mourir de douleur sans rien perdre de son honneur.

Le chemin ne lui avait jamais paru si long. Il ne l'était pas, pas vraiment mais subjectivement, à ce moment là, du couloir des sortilèges aux résidences nobles il y avait mille kilomètres... voire plus. Quand enfin ses mains se posèrent sur la poignet de la porte, elle s'accorda un instant, posant son front sur l'encadrement. Elle ferma les yeux. Soupira pour chasser ses démons pourtant elle savait que quoiqu'elle fasse, il saurait. Klaus saurait. Parce qu'ils étaient trop fusionnels pour passer à côté de ce genre de chose. Elle ouvrit la porte, mit un pied dans l'appartement et...

« Avril ? »

Elle baissa la tête, s'arrêta, un sourire sur les lèvres. Un epu triste peut-être.

« Klaus? »

Elle déglutit, toujours dans le vestibule, essayant d'arborer une composition plus digne mais elle semblait l'ombre d'elle même.

« Klaus ? »

Elle pouvait bien arborer un sourire, certes triste, Klaus savait déjà, à la manière dont elle avait prononcé son prénom que quelque chose n’allait pas. Leur relation était vraiment excessivement fusionnelle, mais c’était ainsi, depuis qu’ils s’étaient retrouvé ca n’allait que de pis en pis. Mais Klaus, dans toute sa subtilité fourbe et manipulatrice, ne comptait pas sauter sur sa sœur en lui demandant ce qu’il lui arrivait pour qu’elle soit triste et déboussolée comme ca. Non il savait très bien que, comme lui, Avril avait sa fierté et qu’elle n’accepterait pas ce genre de comportement. De plus il lui était absolument impossible, à lui, d’agir ainsi. Il n’était pas une Candice Johnson ou une Indiana Dashwood lui. Si son meilleur ami, Que dieu ait pitié de son âme, supportait ca, ce n’était clairement pas le cas de Klaus Adler. Alors Le jeune homme, qui avait déposé sur ses lèvres un doux sourire de convenance, se dirigea vers la porte du petit salon qui donnait sur le vestibule, et il y vit Avril avec un sourire tout aussi de convenance que lui.

« Un peu de thé ? Gustav vient tout juste de m’en apporter tu arrives au bon moment. »

En gros : « Viens me dire ce qu’il t’arrive ». Klaus, dans toute sa suprématie Adlerienne, ne voulait pas qu’Avril se sente obligée de quoique ce soit. Elle pouvait très bien refuser, dans quel cas, même si il serait inquiet comme pas deux, il le savait, il attendrait juste qu’elle veuille bien lui parler d’elle-même.

« Un peu de thé ? Gustav vient tout juste de m’en apporter tu arrives au bon moment. »
« Ce n'est pas de refus. », répondit-elle du ton qu'il fallait.

Elle suivit son frère comme son ombre. Dans le prolongement l'un de l'autre comme toujours, il n'y avait pas d'endroit où Avril se sentait mieux qu'auprès de son frère. Leur relation fusionnelle à l'extrême aurait pu prêter à médire si les jumeaux Adler n'avaient été l'un comme l'autre des modèles de droiture et parfois de sévérité. Un couple platoniquement idéal. La ressemblance était parfois même frappante.
Par exemple à les regarder prendre le thé ensemble on aurait pu se demander s'ils s'amusaient à imiter les gestes l'un de l'autre. Ou alors peut-être n'étaient-ils qu'une paire de pantins mécaniques installés dans une boîte à musique pour une chorégraphie parfaite. Non. Ce n'avait rien de si froid entre eux.

« Tu as passé une bonne journée? »

Elle eut un sourire, cette fois un vrai sourire. Elle savait déjà qu'il avait travaillé comme un fou toute la journée.

« Tu as passé une bonne journée? »
« Très agréable oui, merci de t’en soucier. »

Et par bonne journée, il voulait surement dire « pas mauvaise ». Parce que, clairement, ça journée n’avait absolument rien eut de remarquable. Comme d’habitude, Klaus avait suivi ses 7 heures de cours (merci el retourneur de temps), et comme d’habitude, il avait passé le reste du temps à travailler ces dits cours (il avait tendance à s’assoupir de temps à autre donc il préférait tout revoir en rentrant). Bref, une journée studieuse comme tant d’autres à venir pour les prochaines années… Des fois, il se demandait même pourquoi il faisait ça. Et pourtant Klaus n’était pas du genre à revenir sur une décision, pas du tout de ce genre même.
Mais ce n’était pas le plus important, le plus important était de savoir une tout autre chose. Alors que Klaus prenait un peu de thé en unisson avec Avril, il posa la tasse et la petite assiette assortie sur la table basse. Puis il cala son dos bien droit sur le dossier du canapé, et regarda sa sœur tout en pliant les jambes. Posture de psychologue, air de dire « on ne me l’a fait pas, fait attention à ce que tu vas répondre », l’allemand demanda à sa sœur jumelle, sans trahir une seule seconde son inquiétude.

« Et toi ? »

« Très agréable oui, merci de t’en soucier. »

Eut-elle été une journée en enfer que Klaus n'aurait pas répondu différemment. Ce n'était pas dans leur nature de se plaindre, moins encore de se faire plaindre. Elle savait parfaitement bien que son frère travaillait beaucoup. Beaucoup trop. Au point même de l'inquiéter parfois. Pourtant Avril était bosseuse elle aussi, mais elle craignait que Klaus ne néglige sa santé. Et elle ne parlait pas des obligations que lui avait et qu'elle n'aurait jamais. Tout cela elle le prenait en compte dans son calcul et dans la façon dans ses deux grands yeux bleus se posaient sur son jumeau.

Avril porta sa tasse de thé à ses lèvres. Deux disques d'azur surplombant le tout et dans lesquels une petite image de Klaus Adler se reflétait. Plein de droiture et d'autorité. Elle pouvait lire dans son attitude qu'elle ne s'en tirerait pas avec une conversation bateau qui aurait pu avoir l'avantage d'un divertissement sans jamais approcher le vrai problème de fond. Elle eut un sourire. Qu'il lui avait manqué ce frère qui s'accordait à elle aussi bien qu'une planète à sa jumelle, qu'une étoile à une autre...

« Et toi ? »

Elle porta sa tasse à nouveau à ses lèvres. La vaisselle de porcelaine perdait même de son éclat comparée à la blancheur de la peau de Fraulein Adler. Il y avait chez Avril Adler ce quelque chose de naturellement très étudié, comme si on avait choisi avec soin l'albâtre de sa peau pour qu'il paraisse pur mais frais. L'ébène de ses cheveux, profond et soutenu. L'azur de ses yeux, précieux, rare... La finesse de ses doigts, digne de doigts de princesse. Elle était plus petite que Klaus, comme un fait exprès, pour qu'elle puisse l'épauler et lui la protéger. Tout était donc réglé comme du papier à musique.

« Maëlan est de retour. », répondit-elle posément avant que son regard ne fuit à la recherche d'un rien qui aurait pu l'occuper de l'autre côté du salon.

Maëlan... rien que le nom lui était douloureux. Avoir embrassé Sholto, ç'aurait pu être un baume sur son coeur s'il n'y avait pas eu l'ombre du Seprentard qui planait au dessus de sa tête comme une épée de Damoclès.

« Maëlan est de retour. »

A cette annonce, Klaus n’afficha pas de réaction spéciale. Et pourtant lorsqu’il attendit que l’énergumène Dashwood était de retour à Londres, l’allemand s’en retrouvit profondément irrité. C’était bien connu que Maëlan et lui ne s’aimaient pas. Et pour cause, Klaus ne trouvait vraiment pas que Maëlan puisse être un bon parti pour sa sœur, et à vrai dire il ne l’était pas, cela dépassait de loin les aprioris du jeune homme. C’est pourquoi cela avait toujours été très compliqué pour lui de parler de ce Dashwood avec Avril. Parce qu’il savait que des fois elle avait besoin de lui parler de certains problèmes, et qu’il voulait l’aider, mais il était alors obligé de faire un effort d’objectivité sachant que viscéralement il détestait ce Maëlan. Après tout il était dealer de drogue, rustre, vulgaire, irresponsable (bien que l’argument de l’enfant à leur âge n’en soit plus un pour Klaus…). Tant de chose qui faisait qu’il n’allait pas avec sa sœur, sa grâce et sa beauté allemande, celle d’une femme issue de l’aristocratie, pas d’une bonne à tout faire. Mais il ne dirait rien, se contentant de reprendre un peu de thé avant de dire en tout simplicité ô combien il était surpris, mais à sa manière.

« C’est… une nouvelle. »

Mauvaise, mais il se censura pour ne pas insulter gratuitement l’ancien petit ami de sa sœur. Le regard de l’allemand se posa sur son double sachant très bien tout ce qui devait se passer dans sa tête. Parce qu’il l’avait vu se rapprochait de Sholto, et l’avait même encouragée, et qu’il savait que malgré l’absence de Maëlan, elle l’aimait surement toujours même si le fait qu’il l’ai abandonné l’avait considérablement affaiblie sur un plan sentimental. Revenir comme ça, sans prévenir, de la même manière dont il était parti, était du grand Maëlan Dashwood. Il n’arrêterait donc jamais de blesser sa sœur. Klaus le détestait d’autant plus.

« Il a une bonne excuse à son absence je suppose. »

« Il a une bonne excuse à son absence je suppose. »

Elle baisse les yeux sur sa tasse avec un long sourire en coin. Puis Miss Adler regarde son jumeau. Bien sûr qu'elle sait ce qu'il pense de Maëlan. Vu l'acharnement avec lequel ils s'étaient affrontés sur le terrain de quidditch l'année dernière il n'y avait guère besoin de mot pour s'en faire une idée.

« Maëlan a toujours une bonne excuse Klaus... »

Son ton ne laissait guère de doute sur ce qu'elle pensait des excuses de Maëlan mais son air las trahissait aussi des horizons compliqués et forts peu reposant, du moins pour elle. Il n'y avait guère qu'avec Maëlan que les choses étaient compliquées pour Avril Adler. Et pour cause, pour tout ce qu'elle pouvait lui en vouloir, le détestait, le maudire, elle savait qu'il n'y avait que lui pour faire battre son coeur de cette manière là. Que lui pour savoir quels jeux jouer avec elle.

Combien de souvenirs refaisaient surfacent simplement parce qu'elle avait passé cinq minutes avec lui. C'était le genre de choses qui la mettaient à l'envers. Parce qu'elle ne contrôlait pas. Parce que Avril Lucifer Adler aurait toujours dû tout contrôler. Cela aurait été plus simple.

Elle sonde les prunelles bleues de Klaus comme pour ne rien perdre de cette conversation tacite qu'ils sont en train d'avoir.

« Maëlan a toujours une bonne excuse Klaus... »

Oui bien entendu, Maëlan Dashwood a toujours une bonne excuse faute d’avoir tout le reste. Par tout le reste Klaus pensait tout particulièrement à des manières, du tact, de la convenance et de la distinction, et encore ce n’était que quelques gouttes d’eau dans l’océan d’imperfections caractéristique du britannique. L’allemand dont l’éducation et le bon gout ne laissaient pas à douter repris un peu de son thé tout en faisant en sorte de ne pas laisser pointer de cette exaspération que le nom Dashwood faisait à chaque fois naitre en lui. Il avait pourtant profité des six derniers mois comme d’un bienfait pour Avril qui, certes, était malheureuse mais avait l’air de se remettre et de se rapprocher d’un certain censeur. Un jeune bien sous de nombreux aspects si ce n’était un sens de la fête excessif. Maintenant Klaus voyait déjà à la simple vue du minois de sa jumelle que l’affait Scrymgeour prenait le large à grande voile. Tout cela à cause de quoi ? Une tempête d’imperfections. Tout cela était tout simplement... ravissant, parfait et surtout irritant.
Klaus se décida finalement à poser sa tasse sur la table basse devant lui avant de se réajuster au dossier du canapé.

« Et cette bonne excuse quels sont ses effets ? »

Ou plutôt : Cette excuse, bonne de ton point de vue et surement exécrable du mien, fait-elle en sorte que je doive maintenant souffrir de la terrible honte d’avoir Maëlan Dashwood pour beau-frère ?