Il y a une vibration dans le sol gelé, comme une plainte lancinante montant des entrailles de la terre elle même. Et ca provient de Poudlard. Dans les souterrains de La tête de Sanglier, un chemin jusque là effondré s'ouvre sur des kilomètres et des kilomètres de tunnels. L'air depuis trop longtemps confiné s'évacue par les tunnels, mais des systèmes d'aération magique soigneusement mis en place le rende innofensif. Donc, L'ouverture du tunnel, pour le moment, passe inapercu.

Plutôt, Halewyn s'absente, histoire d'aller crapahuter dans els environs de la forêt interdite, pressentant un désastre. L'air est saturé du sang à venir dit il avant de quitter.

Mais tout cela, pour le moment, est hors contexte. Ce qui nous intéresse est à L'extérieur de La Tête de Sanglier, à mi chemin entre Poudlard et l'Edifice en fait, à proximité de la cabane hurlante. Une abane tout sauf hurlante en ce moment. Le froid s'intensifie, le ciel s'épaissit et, des cieux, d'épais flocons commencent à tomber, tranquillement 'abords, ensuite en rendant la visibilité presque nulle. Assourdissant les sons...

Et au milieu, une jeune fille, en robe de nuit immaculée, pieds nus, s'avance dans la nuit. Mais il n'y a nulle trace et on peut voir au travers par intervalle, comme si elle hésitait entre L'éthéréalité et le tangible. Tanguant doucement, la tête baissée, La Muette goûte ses premiers instants de liberté.

Une petite silhouette noire attendant au milieu du chemin. Les rares qui sont réveillés à cette heure passent prêt d'elle sans la reconnaître. La voient-ils seulement? Ça lui est égal dans le fond. Elle lève le nez, il fait si froid soudain. Pourtant on avait pas annoncé de la neige pour cette semaine. Elle le savait bien pour avoir passé de longues nuits devant la télé, sur le canapé avec Ezechkiel. C'était bien agréable de pouvoir se blottir bien au chaud alors qu'on vous annonce qu'il va faire un temps terrible dehors. Cela vous laissait un genre de rictus indifférent sur les lèvres. Du moins chez Marla c'était le cas. Enfin plus vraiment depuis quelques jours mais elle avait tout du moins vu les nouvelles en début de semaine. La figure blanche, inexpressive, les cheveux noirs parfaitement coupés, on aurait dit un petit poucet qui n'était pas perdu. Une poucette plutôt. Son grand manteau noir à capuche ample lui faisait une ombre démesurée mais le coton de nuages épais qui rampait au dessus de sa tête eut tôt fait d'effacer l'ombre et la petite poucette.
Ca ne l'affola pas plus que ça. Plongée dans le noir, elle sentait une espèce d'agitation malsaine du côté de Poudlard mais ce n'était pas vraiment son problème. Elle haussa les épaules pour voir s'amener Ezechkiel, son doppelgänger. Elle allait être son ombre et lui serait le corps tangible. Puis peut-être qu'ils échangeraient. Ça n'avait pas vraiment d'importance à dire vrai.

Marla - On dirait qu'il...

... va neiger. Il neigeait. Elle n'avait rien contre pourquoi pas. Elle glissa ses doigts gantés de daim noir dans la main d'Ezechkiel, comme pour signifiait qu'ils pouvaient y aller. Silencieusement. Lui, comprenait. Ils allaient à Poudlard. Enfin c'était surtout lui qui y allait et elle qu'il n'avait pas voulu laisser derrière comme ils faisaient d'ordinaire. Il ne lui faisait sans doute plus confiance. Ca, ça ne lui était pas égal. Plus pâle que d'ordinaire, Marla affichait en vérité une grise mine, toujours sans expression mais insensiblement creusée. Son long manteau ne laisser deviner aucun dépérissement si infime soit-il, et pour Ezechkiel, il n'aurait rien pu en dire puisqu'il n'y avait plus eu de bain partagés, ni de soirée devant la télé sur le canapé, blottis l'un contre l'autre. Ce n'était pas du fait de Scylence, c'était elle qui recherchait curieusement la solitude. Elle ne dirait sans doute pas grand chose. Le froid lui picotait les lèvres. Une silhouette blanche parut devant eux. Ils avaient prévu qu'Ezechkiel emprunterait le passage de la cabane hurlante et que Marla attendrait là, n'ayant aucun désir de retourner à Poudlard. Marla se raidit. Quelqu'un en face. Une femme. L'angoisse montait vite, plus qu'avant sans doute. Ça ne tenait pas à la nature de cette femme dont Marla ne savait encore rien mais plutôt aux évènements de ses derniers jours qui l'avaient fait étrangement régresser. Elle n'avançait plus d'un pouce.

Il y avait là quelques flocons dans l'air, qui viendrait tôt ou tard. Ezechkiel le sentait, dans son veston étriqué et noir, bien serré à la taille, qui lui dessinait une silhouette haute et fine. Il avançait dans la nuit, d'un calme plat. Il avait du sang sur les mains, frais de quelques jours. Elles étaient bien propres, brûlées même par la javel et autres détergents qui avait rougis le bout de ses doigts, qui avaient attaqué à sang les jointures de ses phalanges. Tyler était mort, et Ezechkiel avait du se laver plusieurs fois, quitte à s'en brûler la peau, pour oublier. Oublier la souillure de son sang sur sa peau, à lui. Il avait recouvert ses mains de fin gant noir, de cuir synthétique. Il trouvait ça malsain de porter de l'animal mort. Pas vraiment qu'il était humain. Juste qu'il n'aimait pas les peaux sales des morts. Animaux comme humains.
Dans l'obscurité de la nuit, sa longue silhouette se découpa dans la lumière d'un réverbère. Il se dirigea doucement, simplement, dans l'air froid, jusqu'à Marla Grey, qui dans l'obscurité était aussi belle qu'une poupée. C'était la vision d'Ezechkiel. Une beauté froide et douce à la fois, malgré les traits un peu creusé. La mort touchait. Quelque part, Ezechkiel avait été blessé que ça la touche, elle. Il aurait aimé qu'elle ne dise rien. Qu'elle ne ressente rien. Ressentir une once de peine, une once de culpabilité, c'était déjà trop pour le sociopathe qui n'aurait pas supporter qu'elle pleurt pour lui. Pour ce chien, cette vermine infâme. Il s'arrêta à la hauteur de Marla, le regard bleu métallique regardant les alentours. Il sentait quelque chose de mauvais. Il pressentait. Mais rien à vu.

« On dirait qu'il... »
« Oui. Il va neiger. »

Il eut un sourire calme, et serra sa main comme elle la glissait dans la sienne. Marla était distante, alors sentir sa main dans la sienne, ça le calmait un peu. Ça lui rappelait qu'elle ne le haïssait pas comme les autres. Si elle l'avait haït, il l'aurait sûrement tué de colère. Il détestait qu'on le déteste, alors... forcément, ça le mettait toujours en boule quand Marla lui faisait la tête et se tournait dans le lit. Ne prenait pas de bain. Ne dormait pas avec lui sur le canapé. Seul. Il détestait cette sensation qu'il avait pourtant aimé durant ses premières années. La douce solitude. Il commença à marcher, d'un calme plat. Son regard balaya autour de lui et, comme Marla se raidissait en fixant une femme, il haussa un sourcil. Cette femme était... étrange. Ça sentait pas bon. Pas bon du tout. Il fronça doucement les sourcils.
Derrière la jeune femme nippone, une petite bande d'étranges choses s'avançaient dans la nuit, alors que tout autour d'eux, la neige s'accumulait à une vitesse affolante. Il faisait froid. Très froid. Ezechkiel serra un peu plus la main de Marla. Du groupe, il ne voyait que quelques ombres, ici et là. Il y avait deux enfants visiblement. Une petite fille en tutu, et un garçon dans un pyjama à rayure du siècle dernier. Le garçon était plus jeune que la fille. Derrière encore, il y avait un adolescent au sourire arrogant, et un couple qui s'embrassait à pleine bouche. Plus à gauche, une femme aux cheveux blonds d'or, au regard bleu pâle. Tout derrière eux, une jeune femme assez grande, au regard clair et aux longs cheveux bruns de nuit. Il était neuf en tout. Neuf. Ezechkiel sentit un long frisson le prendre, alors que le ciel se marbra d'un trait lumineux noir. Neuf personnes, dont l'aura ne dégageait rien de bon.
Ezechkiel enfonça sa tête dans ses épaules, comme la première fois de sa vie. Tout ça sentait vraiment mauvais. Le temps était devenu mauvais. Un homme au visage brûlé s'éleva dans l'obscurité et se rapprocha du groupe.
Il faisait noir, il neigeait, le tonnerre grondait, et pourtant, dans l'obscurité, des sortes de feufolets courraient autour du groupe. C'était... surnaturel.

Et le silence, il y a de ces silence qui apaisent, il y a de ces silences, calme, ces silence complice, silence dubitatif. Et il y a de ces silences qui tuent.

La nippone lève la tête, révélant de grands yeux expressif en amande sur une peau d'or blanc. Or blanc, parce que nous savons la couleur normale de leur peau. Un nez fin et blanc... Mais il y a deux choses qui attirent l'attention. Ses yeux enjoués et ses lèvres hermétiquement scellées.

Le silence devient opressant, chasse l'air de leur poumons tandis que le froid monte insidieusement le long de leur jambes et s'insinue sous leur manteau. Les feux follets et les autres s'agitent, tandis que La Muette demeure un modèle de calme. Dans ses yeux noirs en amande brillent... De la compassion? Tandis qu'elle s'avance vers les deux jeunes gens, hésitant encore vers le tangible et l'intangible.

Il y a un cri qui leur parvient, rauque, assourdi dans le silence. Tout ce qui compte ce sont ces yeux et ces lèvres scellées. Fubuki lève doucement la main pour caresser la joue d'Ezechiel, emmuré dans le silence. Il y a la brûlure par le froid, et il peut sentir le sommeil l'appeler. Le sommeil de l'hypothermie. Et quand bien même qu'il appellerait, il est pris dans la bulle de silence.

Du moins, jusqu'à ce qu'un flambios n'engloutisse sa geôlière, le libérant de son froid, mais nullement de son silence.

Halewyn se découpe le long des ténèbres blanches des bancs de neige, avant de simplement disparaitre... En apparence du moins. Il y a des trucs chouettes à chasser, il n'est pas question de se pousser.

La Muette traverse les flammes, furieuse. L'air avec lequel elle regarde les adolescent n'a plus rien de gentil. Marla et Ezechiel peuvent voir leur mort dans ce pâle visage.

Ezechkiel les avait vu lui aussi et il semblait partager avec elle cette opinion que cette rencontre n'engager à rien de bon. C'était une chose dont elle était intimement convaincue. Pas seulement parce que de toute façon et en toute circonstance elle n'aimait pas rencontrer des gens, encore moins à l'improviste, mais surtout à cause de toute cette neige, de ce silence pesant comme un couverte au dessus de leur tête. Ca n'avait rien d'habituel. Elle sentait les doigts d'Ezechkiel se resserrer sur les siens et elle se rapprochait un peu plus de lui. Puis elle sentit une pression incroyable dans sa cage thoracique. Peut-être parce qu'elle était taillée en de toute petite proportion. Marla avait déjà rencontrer des enfants de dix douze ans qui la dépasser en taille, ça n'avait rien d'extraordinaire. Elle ne laissait pourtant rien paraître d'autre que cette figure neutre, terriblement neutre. Elle approche, l'inconnue à la figure de porcelaine. Marla voudrait la tenir à distance, cela se voit à quelque chose d'infinitésimal, une inflexion de neutralité que seul Ezechkiel saurait percevoir peut-être parce qu'il la connait. Peut-être parce qu'à force de voir ce visage tantôt neutre, tantôt expressif si c'est seulement pour lui, il saurait discerner la neutralité, de la colère neutre, de la douleur neutre et de toutes les autres émotions neutres...

Pourtant quand cette femme étrange lève la main pour caresser le visage du jeune homme, Marla fronce clairement les sourcils. Explicitement dirais-je. Elle ouvre la bouche pour signifier à cette bonne femme qu'il serait dans son intérêt de se retirer bien vite mais aucun mot ne sort. Marla porte la main à sa gorge. Il n'y a rien de douloureux la dedans, seulement l'angoisse de se sentir contenue. Elle avait horreur de ça. Son pouls s'accélérait. Elle se plaça devant Ezechkiel, contre lui, comme pour contrer le froid mais pas seulement ça. Elle ne veut pas qu'il s'endorme.
Un sortilège de flambio, lui fit faire un bond en arrière. Elle détourna le regard, ses prunelles serpentines reconnaissant Halewyn Coeurd'Acier. Mais en se retournant c'est la face mauvaise de l'asiate qu'elle retrouve. Les doigts de Marla serrent ceux d'Ezechkiel. Ils doivent partirent, ne pas s'attarder.

Ezechkiel restât de marbre. Même quand la main se tendit doucement vers lui, caressant sa peau. Il ressentit le froid sur sa joue, le froid mordant, qui fait mal, et son visage se tordit en une expression qui était celle du dédain et du dégoût à la fois. Elle le touchait. Il leva aussitôt la main, comme pour la retirer, mais quand ses doigts auraient du toucher la peau de la nippone, ils traversèrent le corps charnel pour se toucher sa joue, à lui. Il retira aussitôt sa main. Était-elle seulement réelle? Ou une illusion d'un nouveau genre? Il écarquilla les yeux alors que Marla se mettait devant lui, comme un bouclier. Que pouvait elle croire? Qu'il allait se laisser protéger par une femme, de trois têtes moins grande que lui? Il haussa un sourcil, ne sachant plus quoi penser. Il allait lui demander de partir, mais quand il ouvrit la bouche, rien. Le néant. Le silence qui anéantit toute possibilité. Une aliénation pour quelqu'un comme Ezechkiel, qui maniait le verbe pour en faire une joute sanglante. Au final. Rien.

Un flambios déchire l'air et Ezechkiel se rends compte de ce mécontentement, que l'on voit sur les traits de la plus petite des silhouettes. Marla. La protection de Marla. La sécurité de Marla. Tout dans son crâne ne fait qu'un tour, et ça se bouscule à une vitesse qui fait mal à l'arrière de son crâne. Un éclair sourd déchire le ciel, sans son, mais il était immense et il frappe la terre, plus loin, enflammant au même moment un immeuble qui s'embrase. Quelque part d'autres, c'est les cailloux qui s'élèvent dans les airs, autour d'une enfant à tutu, qui rit en silence elle aussi, mais qui semble heureuse, alors qu'elle ne réponds même plus aux lois de la gravité, dansant dans les airs, à quelques centimètres du sol.

Il devient fou. Il le croit un instant, tout du moins. On ressert avec insistance une main sur la sienne, et quand il regarde Marla, il comprends bien que derrière cette expression toute neutre, il y a l'urgence, le besoin de partir. Alors il la tire. Il peut s'enfuir. Il le sait. Mais il a froid. Atrocement froid. Alors s'il frissonne dans la neige, il avance d'un pas, puis d'un autre, rapidement. Il faut fuir. C'est la seule issue. Il le sait.

Fubuki n'a pas l'intention de laisser partir les deux jeunes gens. Ses lèvres scellées se pincent encore plus si c'est possible alors que le froid redouble. es longs doigts fins se transforment en serres de glace. Ses yeux noirs se creusent. Des yeux dans lesquels ils peuvent admirer les tréfonds des enfers froids dans lesquels elle veut les condamner.

Il y a si longtemps qu'elle est morte, qu'elle a apporté et arpenté les hivers nippons pour apporter son lot de damnés. Peut être a t'elle été une gentille fiancée un jour. Une samourai exécutée peut être. Une geisha déshonorée... Quoi qu'elle fut, elle ne peut le dire. Ca c'est seulement si elle s'en souvient.

Une bourrasque de vent suivit d'un coup de tonnerre ébranle les jeunes gens. Et Fubuki avance toujorus, ne laissant pas de traces sur la neige, semblant flotter au dessus d'elle comme la jeune danseuse qui lévite.

Il y a si longtemps qu'elle n'a pas apporté de damnés.

Le pendentif en forme de daguer à la lame d'acier rouge chauffe légèrement dans la poche d'Ezechiel. Ca c'est s'il s'en rappelle en cet instant critique.

Mais Halewyn n'est pas loin. Il s'est lancé les sortilèges requis pour être intracable et pas crever de froid, puis est revenu dans la mêlée. Meurtrière à la main, il ne se laisse pas impressionner par le caractère apocalyptique de la situation actuelle. Ni par le silence écrasant, il est né pour être silencieux. Et avoir été possédé par un démon pendant des décennies, on n'est pas plus résistant mais moins impressionnable. En fait, ca l'excite un max. Avec un peu de chace c'est aujourd'hui qu'il crève.

Il a bien vu les changements de tangibilité de Fubuki et il en profite le salaud. Les quelques secondes où elle semble parfaitement tangible, il la plaque au sol, réapparait pour être certain d'attirer son attention comme il faut, avant de redisparaitre pour aller attaquer la danseuse.

En fait, Meurtrière a bien tranché dans le lard, mais la nippone a repris son apparence éthérée il n'a causé aucun dommage. D'où le rabattement sur une cible plus facile. Frapper la chaine là où elle est la plus fragile.

Pas besoin d'avoir fait les grandes écoles de la magie pour lire dans le regard infernal de cette poupée de glace que c'est leur mort qu'elle veut. Marla ne tente même pas de l'exprimer en mot, abhorrant la seule idée d'avoir à expérimenter une nouvelle fois la frustration. Elle voit aussi bien qu'Ezechkiel ses longs doigts de pianiste traverser la main importune et ses à elle se crispe. Qu'est-ce que c'est que ce maléfice? Une nouvelle supercherie? Une illusion? Ou quelque chose de pire que tout ce qu'ils ont jamais connus? Si le professeur Van Hellsing avait été là il aurait certainement eu quelque chose à redire là dessus. Mais Marla était bien loin de penser à lui à ce moment précis. L'éclair tomba, fracassant tout sur son passage, en silence. Elle ne pensait plus le moins du monde à sa virginité perdue, elle pensait seulement à une mort dans le silence, une mort qu'elle ne voulait pour rien au monde. Ezechkiel. Un instant ses doigts le perdent mais c'est lui l'empoigne après un regard échanger, après une autre bizarrerie contre nature. Une gamine qui danse dans les airs. Marla secoue sa tête de jais noire. Ce n'est pas possible. Mais pas vraiment le temps de penser à ça. Ils courent à toutes jambes mais cela ne les sauvera pas. Elle sent le froid s'intensifier au point de lui écraser les poumons. Elle sent sa peau se craqueler presque sous cette attaque trop pernicieuse pour que ni lui ni elle puissent y échapper. Il faut faire face.

Dans un saut souple, évitant de justesse un débris qui roulait vers eux comme un boulet de canon Marla tire sa baguette. Ils n'étaient sans doute pas le meilleur duo en sortilèges et défense contre les forces du mal pour rien, il ne lui fallait guère plus que ça pour comprendre qu'un sortilège offensif ne les aurait aidé en rien à moins qu'il ne fut particulièrement puissant, trop puissant pour assurer de ne pas les tuer tous les deux avec. Elle chassa donc ce sortilège là de sa tête et c'est un DUAECORPUS muet qu'articulèrent ses lèvres. Au même moment son regard se pose sur une autre silhouette. Un homme qu'elle se rappelle si bien pour ce qu'il l'a forcé ou presque à accepter son aide. Elle n'en voulait pas, alors on ne peut pas dire qu'elle manifeste la moindre émotion en voyant Halewyn Coeurd'Acier se poser en obstacle entre eux et l'étrange femme . Qu'importe car déjà une deuxième paire d'Ezechkiel et Marla partaient déjà dans la direction opposée. Impossible de dire lesquels étaient les vrais mais ils allaient leur filer entre les doigts à tous. Du moins c'était le plan de Marla...

Ezechkiel ne sait plus quoi penser. C'est la première fois.
Pourtant, il n'a pas peur. Oh, il pourrait trembler et se dire qu'il va mourir. Il pourrait également s'abandonner au froid, dans le désir d'y mourir, lui le pyromane. Mais finalement, rien de tout ça ne lui vient à l'esprit. Il se rappelle juste que dans ses moments là, il faut relever la tête et faire face. Il ne l'a pas appris. À lui, on aurait aimé inculquer la soumission, mais son âme est une flamme éternelle, qui brûle et virevolte, dans le seul but d'enflammer, de plus en plus, le tout. Ezechkiel est un démon. Il n'a pas peur. Il n'a jamais eut peur. Aussi, quand Hale intervient et plaque au sol la vile diablesse aux doigts de neige, Ezechkiel se recule et sort de sa poche arrière sa baguette, magnifique dans l'obscurité, car le bois noir luit de quelques reflets pourpres. Il n'avait aucune envie de mourir ici, et le feu, c'était son rayon. Si la jeune femme voulait jouer, il allait jouer. Il haussa un sourcil en voyant les corps se dédoublaient. Bien. On allait pouvoir jouer. Le deuxième Ezechkeil sortit sa baguette, et fit volte face, courant dans une ruelle. Marla-bis emprunta elle aussi un autre chemin. Marla partit, et il prit une rue adjacente.
Puis il s'arrêta et fit volte face, transplanant de l'autre côté du bâtiment. Dans la même rue que Marla. Bien qu'il fut entre elle et le fantôme qui – sûrement – ne ferait pas rien. Ezechkiel huma l'air, comme un prédateur, et finalement pointa sa baguette en l'air. Bien loin de lui, une boule lumineuse fit son chemin dans le ciel et toucha l'épais manteaux noirs des nuages. C'était son double qui appelait. Bien. Ezechkiel se pointa lui même, rapidement, et se jeta un sort d'anti-gêle, et pointa également Marla.
Pour avoir affronter un jour un Seigneur Russe – un sale dragon qui crachait de la glace – il avait rapidement compris comme ne pas mourir bêtement avec de la neige et quelques glaçons. Question de pratique.

Le fantôme approchait. L'oeil d'Ezechkiel brilla. Il n'aurait jamais pensé un instant avoir à faire ça... c'était vraiment dérangeant. Il murmura un Feudeymon et dans la ruelle, une petite étincelle fit son apparition sur le sol. Puis rien. Ezechkiel arqua un sourcil. Il n'avait jamais raté ce sort, et...

Une flammèche fit son apparition, comme une gerbe de flamme dévastatrice, et s'éleva dans les airs sous la forme la plus logique pour Ezechkiel : en un long serpent, à tête de python des fournaises. Il siffla, sa langue fine sortant et rentrant dans sa gueule. Le démon était prêt. La braise était prête, et sous la température de son corps, la neige sur le sol fondait, ne l'atteignant en rien. Le démon serpent comprit bien vite son intérêt dans la situation.

Il s'attaquerait à ce qui lui rapporterait le plus.
Les autres démons.

Dans un passé proche, Darwin avait été un enfant banal qui rêvait d'une vie de folie. Il se rappelait de cette frustration de n'être qu'un mortel, de n'être qu'un tout petit être sur cette grande terre, et de ne jamais pouvoir faire ce qu'il désirait. En réalité, Darwin aurait mérité mieux. Il était intelligent, très même, et il était surtout un artiste. Créatif. Beaucoup d'imagination. Et un talent certain pour le dessin et la peinture, ainsi que la sculpture. On l'avait toujours loué pour, mais son père – un mécanicien – avait toujours vu en lui la relève, et il avait fini par se plier à l'autorité parentale. Il aurait du devenir quelqu'un. Il était mort avant.
Maris, quant à elle, était une enfant au visage doux. Une petite fille. Il ne se rappelait pas de l'avoir entendu, mais les murmures dans les abysses vont vite, et il avait entendu parler de deux enfants. Deux seulement. Plus jeune que lui. Ça l'avait soulagé. Il avait cru, un instant, qu'il avait été le plus sale de tous les adolescents. Mais il y avait Isaiah et Marie, et il était heureux. Il regardait la petite fille s'élevait dans les airs, se jouant bien de la gravité. On disait d'elle qu'elle pouvait éclater le crâne de quelqu'un en un seul claquement de doigt. Ce claquement de doigt était d'une facilité déconcertante. Darwin la regarda, visiblement amusé, et fasciné, un peu. Elle dansait bien.
Mais le calme de leur libération fut rapidement brisé. Fubuki la muette s'était déjà éloignée, et quelqu'un approchait. Darwin le sentait. L'adolescent, les mains dans les poches, attendait d'un regard neutre – sans aucune expression – que la personne en question se montre.
Le pouvoir de Darwin, disait-on, était le plus dangereux. C'était celui du Switch à grande échelle. Darwin était le maître des sensations, un illusionniste. Peut être même le Maitre. Il aurait pu faire croire au plus terre à terre qu'il avait la tête dans les étoiles, aurait pu faire croire à un aveugle qu'il voyait, et encore faire croire à un assassin qu'il ressemblait à un lapin rose. Le lapin rose, c'était juste pour le fun. Car c'était drôle. Et qu'après quelques années en Enfer, on a vraiment envie de rire. Gardant un oeil sur Marie, Darwin fixa la silhouette qui s'approchait. Bien. C'était le moment de s'amuser un peu.
Darwin restât immobile, mais tout autour de lui, tout changea. Du tout au tout. Hale, à ce moment – et lui seul pouvait le voir, pouvait voir par exemple qu'il se trouvait dans un grand champ de fleurs blanches. L'herbe était belle, fraîche, et verte. Marie était là. Elle était une enfant, une belle enfant. En réalité, elle avait le visage de Elthiriel jeune, et à côté d'elle, il y avait Isaiah, avec le visage de son fils. Du frère d'Elthiriel. Le monde autour était beau. Magnifique. Tout cela était un paradis qui cachait un enfer.
Hale était piégé maintenant.
Darwin eut un sourire. Il était encore visible dans le décor, car il avait décidé de ne pas se cacher. Si lui était une forme tangible – grâce sans doute à sa mort encore récente – il était aussi le maître de ce nouveau monde, et nul n'aurait pu en sortir sans sa décision.
Hale faisait partit du jeu.
Ça serait drôle.

Fubuki n'est pas impressionnée par le démon de feu. Nul démon ne l'impressionne en fait. S'il est trop chaud pour qu'elle le touche directement, la Muette est trop froide pour qu'il s'en prenne à elle. La Glace, le Silence et le Froid éternel.

Elle lève une main, un tourbillon de neige et de vent attaque et enrobe proprement le Feudémon. Jetant un oeil de côté, elle voit Darwin s'amuser. Léger sourire. En effet, c'est marrant.

Personne ne peut se foutre en travers de leur chemin, les damnés fleuriront sur la terre. Dans son autre main, elle concentre son énergie, de la glace effilée commence à se matérialiser.

Pour Halewyn c'est un peu plus compliqué. Il aurait plus facilement accepté être catapulté en enfer qu'au beau milieu d'un champ en pleine floraison. Soudainement méfiant, il s'accroupit, ne laissant aucunement tomber sa dissimulation. Les narines palpitent, cherchant l'arnaque, mais une odeur de fleur riche l'envahis. Beurk, dégueulasse.

Et le pire c'est qu'il y a encore de la neige sur son coat, il peut ressentir le froid du cuir. Et pour ajouter à la merde ambiante, il y a deux gosses qui arrivent, ses gosses... La lune et la nuit. La lune en l'image de Morayeel, son fils, qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau malgré les différences flagrantes. Et Elthiriel qui ressemble plus à sa mère. C'est étrange sachant que Morayeel c'est Phoenix qui a décidé de le concevoir et qu'Elthiriel est sa fille.

Le plus étrange c'est l'air sur les deux visages juvéniles. Dissimulé dans les fleurs, Halewyn sent un frisson de danger lui effleurer la nuque. Il fait donc quelques pas de côté au moment ou le démon de flammes passe, l'évitant de peu.

Ezechkiel transplanait tout proche d'elle. Toujours attentive au moindre chose bien que leur double monopolisait cinquante pour cent de son attention, mais cinquante pour cent pour elle se n'était rien. Elle restait suffisamment présente pour les deux modèles originaux. Sans doute le résultat d'années accumulées à se renfermer en elle même plutôt qu'à chercher à tout prix à s'ouvrir aux autres.
Ce qui la perturbait le plus à vrai dire c'était l'absence de tout son, ce silence stérile qui la privait de certaines informations utiles. Son double n'avait pas ce problème puisque que la fausse Marla reposait entièrement sur le modèle original.
Un instant après qu'Ezechkiel ait lancé son feudeymon, elle lui adressa un étrange regard. Il ne pouvait pas rater ce sortilège. Non en effet. Avec un petit délais, le démon de feu surgit, avide de magie et immense.

De l'autre côté, Ezechkiel et Marla bis se figeaient un instant sur place, se retournant comme un seul homme pour suivre du regard le manège du feudeymon. La glace de l'étrange asiate, son étrange magie se dresse en mur contre le démon de feu mais Marla est prompte. Une autrefois il ne lui serait jamais venu à l'idée que la glace puisse venir à bout du feu de l'enfer mais cette fois elle ne s'y trompe pas. AQUILA MAXIMUS, la formule frappe dans son esprit aussi fort que les auraient pu, mais le silence a toujours raison d'eux. Un sortilège puissant frappe le cocon de glace qui retient le Feudeymon et pratiquement simultanément un autre, Deus Irae, la colère silencieuse. Il lui fallut un tel effort pour contrôler à ce point son double que c'est un filet de sang chaud coulant sur sa lèvre supérieur qu'elle admire - non sans une certaine fierté - le résultat de son effort.

Au dessus du feudeymon le ciel de neige convulse. C'est la foudre qui tombe, faisant exploser en un millions d'éclats mortels le manteau de glace de fubuki qui enveloppait le démon d'Ezechkiel. Le souffle émanant de l'impact est suffisamment pour projeter Marla et Ezechkiel contre le mur du fond de la ruelle, leur double ne survivent pas au choc, mais sous leurs yeux à eux, une chose étrange se passe. Dans une volute de fumée et de feu, là où la foudre est tombée, le feudeymon, serpent de feu semble s'enrouler sur lui même déployant des ailes incongrues. Un immense Rokh de feu se dresse entre les deux adolescents et leur adversaire.
Marla saisit la main d'Ezechkiel. Ils peuvent profiter de la diversion et fuir ou... s'en remettre à cet oiseau de feu, le fruit de leur deux démons pour une retraite mieux gardée mais non moins voyante. Dans le loin, les yeux d'émeraude de la jeune Grey aperçoive Coeurd'Acier qui semble complètement à l'ouest. Elle hausse les épaules. Qu'importe s'il préfère rester là pour mourir ça n'est pas leur problème.

Les ailes immenses de feu dessinent, aux yeux d'Ezechkiel, la beauté suprême. Il regarde, un instant, le Rokh magnifique. C'est un peu le fruit d'Ezechkiel et Marla, et dieu sait qu'il est beau. Un instant seulement. Déjà le froid mordant est là, et Ezechkiel sait qu'il ne peut pas réfléchir trop longtemps. Trop longtemps, ça serait signé son arrêt de mort. Pas question. Il se détache du gel, le corps droit et fier. Son regard regarde l'étrange attroupement, et finalement Marla lui saisit la main avant même qu'il ne puisse le faire. L'oeil bleu d'Ezechkiel se pose sur elle, et elle le fixe. Prête. Elle le sait. Lui aussi.

CRAC.

Dans le silence et le gel, l'oeil de Darwin regarde cet homme. Sans doute est-il fort, avec ses cheveux blancs et son oeil d'assassin. Mais il n'a aucune chance. Surtout pas si Marie et Isaiah sont à ces côtés. Ce n'est pas très loyal, mais c'est comme ça. Darwin pourrait le laisser là. Il pourrait aller plus loin. Il pourrait faire croire à cet homme tellement de chose, tellement de saveur … Il pourrait lui faire croire qu'il a mal, qu'il n'a ni bras, ni jambes. Qu'il n'y voit plus et est seul au monde. Qu'il n'est rien. Mais de tout ça, il ne fera rien. Car cet homme, aussi bon soit-il, finira par mourir, et que la mort, ça ne l'intéresse pas encore. Il a besoin d'une puissance plus pure que celle de la violence et du sang. Il a besoin du Poète. L'oeil brun de Darwin brille, et finalement il le pose sur Marie et Isaiah. Derrière leurs apparences enfantines, ces deux là sont plus dangereux encore. Beaucoup plus dangereux. Darwin hocha la tête. Il regarde Hale, et tourna le dos. Tout autour d'eux, tout changea. Tout devint noir. Et il n'y avait rien. La vue n'était rien. Mais ici, tout était abstraction. Pas de sensation de froid ou de chaud, pas de sensation de douleur, ni de plaisir, pas d'odeurs, pas de vents. Le néant aurait été plus rassurant. Darwin disparut lui même de l'illusion et laissa Hale dans l'obscurité du néant. Pour en sortir, il aurait fallu que Darwin le veuille, mais pour l'instant, il ne le désirait pas. Alors il y resterait. Le jeune homme posa sa main sur la danseuse qui le fusilla du regard, et il eut un petit rire. Isaiah, à côté, avait une mine fatiguée, des yeux cernés. Il ne dormait plus depuis des siècles. Une torture des plus horribles. Darwin regarda par dessus son épaule, et Hale était encore là. Oh, oui, il se mouvait, mais sans voir, sans rien sentir. Dans le néant des plus total, ça ne servait à rien.

« On a un rendez-vous les enfants! »

Chantonna, guillerette, Elizabeth. Si le silence était pesant pour tous, ils ne touchaient pas les fantômes. Marie eut un petit rire et suivie Elizabeth. William, derrière, gardait un oeil sur sa femme, et encore derrière, Lucius pestait sur ce qu'était devenu le monde. De tous les morts, il était le plus jeune. Le plus jeune en terme d'année de naissance. Darwin était né en ce monde cinquante ans avant lui. En somme, Lucius était le dernier venu, et le premier … était une première. Klavdia. Sous la forme d'une grande femme aux cheveux noirs et aux yeux bleus, elle humait l'air, comme un chien l'aurait fait. Elle avait un air carnassier. Elle était prête à tout.

Ils s'éloignèrent finalement, et quand le champ d'action de Darwin se fit plus fragile, il relâcha l'illusion. Hale était à nouveau libre. … pour l'instant.