Dans le manoir Grey la lumière semble fuir comme si le seul bruit des pas de Lord Lester Grey lui faisait l’effet d’un fouet cinglant. Il y a des choses qui apparaissent et disparaissent juste au bon moment. Jamais un bruit. Pas une ombre qui ait pu laisser penser que l’endroit ait pu être habité. Ni rire d’enfant. Ni domestiques se hâtant pour passer hors de la vue du maître des lieux. Il y a une assiette chaude au bout de la longue table toujours vide.

Lester y prend place et dîne. Il n’est que 18h. Ce n’est pas que les journées lui paraissent longues mais il est de baptême chez les Donovan et il a pris l’habitude de manger avant de se rendre à ce genre d’événement. Il a quitté ses habituelles fripes pour une élégante veste – toujours noire – doublée au fil d’argent. Et même là, il n’arrive pas à se débarrasser de cet éternelle aura lugubre qui lui colle à la peau. Qu’importe, il ne va pas vraiment parader, juste remplir ses obligations de Lord et discuter avec d’anciens amis. Particulièrement ceux des Grands Procès de 78, les McSwann et les Donovan justement.

Quand il arrive Rudyard l’accueille plus chaleureusement que les autres, c’est une longue histoire. Il y a cette rusée renarde de Cécilie McSwann, une beauté dans le temps mais il faut dire qu’elle a très mal vieillit.

« Lord Lester , tu te fais rare mon cher.
- On fait ce qu’on peut, répond-il placide mais amusé par son enthousiasme.
- Ce serait donc là le secret de ton éternelle jeunesse vieux roublard.
- Mh si on veut…, répondit Lester qui n’était pas le genre à se vanter de ses conquêtes. De toute manière tout le monde connaissait ses conquêtes même quand il n’en parlait pas de lui alors vu comme ça… On regardait surtout à quand un mariage et un baptême chez les Grey qui n’ayant pas de branches cousines ou parentes même de loin serait obligé de laisser leurs biens passer entre des mains par héritage de sympathie. On s’attendait donc à ce que les Donovan ou les McSwann entretiennent toujours leur amitié avec Lord Lester Grey. Dans le fond c’était ridicule parce que lui savait très bien qu’en l’absence d’un héritier légitime, il léguerait à sa nièce qu’il connaissait trop peu par ailleurs. »

« Je n’irais pas. » siffla Joleene avec sa voix de serpente, plus sombre que jamais. Joy leva un sourcil, alors qu’elle finissait de se maquiller, se mirant dans le miroir de sa coiffeuse.
« Tu n’as pas le choix. » Joy se redressa, droite dans sa robe blanche en dentelle, qui lui donnait l’air d’un ange comme elle avait des cheveux blonds très longs, tenus par des épingles fines. Joy Black était magnifique. Folle, mais magnifique. C’était tout du moins ce que s’accordait à dire sa fille unique. « Tu n’as rien d’autre à faire de ta journée de toute façon. »

Elle fixa Joy, et gronda, tournant le dos comme elle savait qu’elle avait raison, et si elle avait le choix, ça aurait été s’éclipser davantage dans l’obscurité que de ne pas faire une seule apparition à cette sottise de baptême. Donovan qui plus est. Elle passa dans le couloir, claqua la porte de sa chambre derrière elle et ouvrit sa penderie, regardant ses robes, toutes noires. Elle en avait plusieurs, mais aucune qu’elle affectionnait. Elle soupira, se regarda dans la psyché qui attendait, contre le mur. Elle était belle, c’était vrai, mais ça, ça ne suffisait pas. Elle détourna les yeux, tirant une robe sobre et simple de la penderie, retirant ses vêtements au milieu de la pièce, dans l’obscurité. Elle enfila des porte-jarretelles noires, un soutient-gorge de dentelle et sa robe par dessus. Une longue toge noire. Elle attrapa entre ses doigts ses cheveux rebelles et les releva, les attachant avec des épingles noires. Elle se pencha au dessus de la coiffeuse, attrapant son maquillage et se barda de noir. Un seul bracelet au poignet, et son pendentif d’argent en forme d’éclair, elle se regarda dans la glace. Elle était jolie. Mais ça ne lui faisait rien oublier.

En deux semaines, elle n’avait pas pu s’en remettre, et on lui demandait de rouvrir encore la blessure. Elle baissa les yeux, enfilant ses talons sombres. Elle n’avait pas envie d’y aller, pas envie de les croiser, tous ses riches à marier, quand on parlait de mariage pour elle, pour la future première des Black.
Elle n’avait juste pas envie de le croiser.

Elle tourna les talons et sortit de sa chambre. Ses cousines étaient déjà en bas, trépignant à l’idée qu’un jour peut-être elles aussi auraient une fille à baptiser, toutes fières d’être des anges aux cheveux blonds et aux robes magnifiques, brodées sans doute par d’autres anges. Joleene descendit les escaliers, l’air sombre. Sa mère se retourna et l’avisa, serrant les dents avant de persifler : « Tu crois aller à un enterrement Jolee’ ? »
Elle la fixa, et ne répondit rien, comme ça arrivait que rarement. Elle détourna les yeux, se rapprochant de Jack qui était bien habillé lui aussi. Peut-être qu’elle assistait à son enterrement. A un second grand enterrement quand on délivrait de ses péchés un enfant dans l’eau bénie.
« Tu es belle comme une Hébé, Joleene. » La voix ronronnante de Joe venait de derrière. Joleene eut un sourire amusé, penchant machinalement la tête sur le côté.

Dehors, les sombrals attendaient le départ en piétinant sur place.

A peine eut-elle mis un pas qu’elle sentit le regard de James ailleurs. Elle releva le nez, curieuse, et posa ses yeux de vipère sur Lester, de dos au loin. Il parlait avec d’autres. Elle détourna aussitôt son regard. James remarqua sa réaction mais ne dit rien. Comme elle s’éloignait des garçons, James rejoignit ses frères, Jack, Joe et Jeremiah. Joleene s’arrêta quand on se planta devant elle, et ses yeux tombèrent sur Samuel Donovan. Il la fixait, un large sourire sur le visage. Samuel avait été à l’école avec elle, il l’avait vu grandire, et avait de nombreuses fois essuyées ses excès de colère. Joleene fronça les sourcils comme il se penchait pour embrasser sa main.
« J’ai cru voir Perséphone ce soir. »
Elle posa sa main sur sa joue, y plantant à peine ses ongles, d’un air sinistre.
« Tu ne devrais pas m’emmerder ce soir, Sam’. Je ne suis pas d’humeur. »
« Tu es cruelle. » souffla le garçon en se redressant, essuyant à nouveau un échec.
« Rends-toi utile et va me chercher un verre, veux-tu. »

Samuel Donovan la regarda, puis eut un petit rire et détourna les pieds, s’éloignant pour chercher un verre à la jeune fille. Cette dernière s’esquiva vers le balcon. Le banquet n’était pas commencé qu’elle en avait déjà assez. Assez d’eux, de la foule, de tout ça. Elle remarqua un serveur qui fumait, et se rapprocha de lui. Il recula, puis finalement lui tendit une cigarette comme c’était visiblement ce qu’elle voulait. Il disparu tout de suite après, de peur de perdre sa place à flâner ici. Joleene, elle, ne bougea pas. Elle alluma la cigarette et en fuma une longue latte, expulsant la fumée juste après. Ses poumons brûlaient. Elle eut un sourire, là, seule. Elle était bien, seule. Enfin…

La cérémonie ne se tiendrait pas avant que tous soit là et visiblement certains venait de loin. En voyant entrer les Bathory autour de leur matrone en robe rouge, Lord Lester s’excusa auprès de ses amis, se sachant un bon parti, lui-même pris celui d’aller se griller sa seule cigarette de la soirée sur le balcon.

Il vit un sourire écarlate s’étirer à sa vue. Il n’y répondit pas. Il n’allait pas épouser une femme de l’Est. D’une ça aurait fait mauvais genre et encore une fois, il n’aimait pas les blondes. Quant aux femmes frivoles passait encore pour son quatre heure mais pas au delà. De toute façon il ne voudrait jamais d’une pétasse qui ne s’emploierait qu’à dépenser et à cancaner, cela régler l’éventualité de prendre femme chez les Bathory. Encore que l’épouse Hatcher fut très jolie même pour une blonde.

Il sentit la fraîcheur de la nuit tombante sur son visage et alla s’accouder à la balustrade. Ce n’est qu’en entrant qu’il avait remarqué Joleene et bien loin de faire demi-tour ou de changer ses plans, il sortit une cigarette de la poche intérieure de sa veste, presque nonchalamment avant de la saluer :

« C’est une bien vilaine habitude pour une jeune femme ça Joleene. , fit-il au bout d’un sourire toujours aussi lugubre malgré lui.

Contrairement à elle, il n’avait gardé aucun grief de la nuit qu’ils avaient passée ensemble. Il restait sur l’idée que c’était ce qu’elle avait choisi, même si il aurait préféré qu’elle choisisse autrement.

Penchée à la balustrade, elle ressemblait à une Juliette du nouveau siècle. Ses longs cheveux glissaient sur sa nuque comme des fils de nuit, où finalement il ne manquait que les étoiles. Joleene Black attendait, cigarette entre les lèvres, que la mort vienne la faucher. Ou d’oublier, peut-être. La porte s’ouvrit, et elle détourna la tête, fronçant les sourcils pour rembarrer une centième fois Samuel Donovan, dont on ne savait plus s’il avait perdu la tête à s’entêter ou si c’était pour un paris qu’il la pourchassait, comme Apollon aurait pourchasser Daphné. Sauf que Samuel Donovan n’avait rien d’un Apollon, pas même la figure. A la place de l’empoté, la figure sinistre de Lester Grey se découpa dans le noir. Ça sentait l’éclipse, comme deux astres sombres se retrouvaient ensemble.

« C’est une bien vilaine habitude pour une jeune femme ça Joleene. »

Elle le fixa, et mit un temps à comprendre qu’il parlait de sa cigarette. Elle haussa un sourcil, et son visage se découpa d’un large sourire moqueur. Elle aurait pu encore rétorquer cent choses à cette phrase là, des vulgaires et des sages, mais elle se contenta de dire, tirant entre ses doigts sa cigarette de ses lèvres rose thé :

« Je croirais entendre ma mère ; et ce n’est pas un compliment. »

Elle avait un sourire calme, amusé. Lester Grey était beau dans la nuit, et elle ne doutait pas que lui n’en avait rien à faire de toute cette histoire, de la nuit d’avant, et celle d’encore avant. Cette tendresse puait à ses yeux. Elle l’observa, puis détourna les yeux. Ses iris vert limpide se posèrent sur le groupe des Bathory qui jacassaient. Après le boucan qu’elle avait mis à l’église, Joleene se demandait encore comment elles pouvaient encore être les bienvenus. Ses yeux se détournèrent à nouveau, observant le profil de ce curieux corbeau qui s’était posé sur sa branche. Beau. C’était le mot.

« Hey Jolee’ ! »

Elle tourna la tête, déconcentrée, et remarqua que Samuel Donovan venait d’apporter deux coupes. Il avait un large sourire, mais s’arrêta en voyant Lester sur le balconnet. Il osa un petit :

« Je dérange… ? »
« Bien sûr que oui, crétin. » Elle se rapprocha de lui et attrapa les deux coupes, avec un sourire de vipère, sournois et terrible, de ceux qui avaient fait fondre la moitié des mages noires de son âge. « Tu peux partir t’amuser maintenant. »

Samuel Donovan resta bête, un instant, que trop habitué à ses changements d’humeurs, jeta un œil à Lester, puis à Joleene, et finalement recula, et partit du balcon. Il fut intercepté par une des cousins de Joleene, Juliet. La brune Artemis n’y fit pas attention, tournant le dos en perdant aussitôt son sourire de renard. Elle posa sur le rebord du balcon ses deux verres, puis reporta ses yeux sur Lester, lui tendant une coupe :

« My Lord, auriez-vous l’obligeance de m’aider à vider ses coupes ? »

Elle aurait pu dire son prénom, mais ça avait été la dernière des choses qu’elle lui avait dite, et elle ne se risquerait pas à répéter, du moins pas de sitôt. La blessure devait se refermer avant qu’elle ait à nouveau l’envie de prononcer le mot Lester.

« Je croirais entendre ma mère ; et ce n’est pas un compliment. »

Il eut un petit mh amusé. Il venait de passer la soirée avec ses amis mais c’était encore cette gamine qui lui tirait le plus facilement un éclat de rire. Allez comprendre. Lui comprenait mais restait plus ou moins lucide. Et ce n’était de toute manière pas son genre d’aller imposer son style de vie à une jeunette.

Le gamin Donovan se ramena avec deux coupes de Champagne. Lester leva un sourcil dans le dos de Joleene. Il aurait même sentit poindre une once de jalousie si Miss Black lui en avait seulement laissé le temps avant de jouer les vipères assassines. Black 1. Donovan 0. Pour lui s’était plutôt divertissant comme spectacle.

« My Lord, auriez-vous l’obligeance de m’aider à vider ses coupes ?
Ce serait bien la première fois que je me retrouverai l’obligé de quelqu’un pensa-t-il mais il garda ce genre de remarque pour lui, peu désireux de la faire fuir avec son humour douteux. Le but ici était plus de voir ce qu’il restait d’eux après leur dernière rencontre. Il aurait tout aussi bien pu lui dire je préférai quand tu m’appelai Lester la voix de Joleene exultant résonnant dans sa mémoire dès qu’il en rappelait le souvenir. Mais il s’abstint là encore.
- Avec plaisir, toutes ces mondanités ont tendance à me mettre de mauvais poil. Et dire que la moitié de ces gens là sont mes amis… ça me débecte.»

Etait-ce là une moquerie ou une remarque réellement sérieuse ? Difficile à dire mais il était certain que certains ici été ses amis. Tout aussi certain qu’il n’aimait pas ce genre de soirée. Qu’il n’aimait pas devoir sortir de sa routine quotidienne parce qu’il le fallait. Mais il aimait la présence de Joleene Black alors l’un dans l’autre, tout n’était finalement pas si mal…

« Avec plaisir, toutes ces mondanités ont tendance à me mettre de mauvais poil. Et dire que la moitié de ces gens là sont mes amis… ça me débecte. »

Elle eut un sourire, s’approcha de lui et posa la coupe sur le balcon, retirant sa main, comme si son toucher aurait pu être empoisonné. Depuis qu’il avait embrassé son cœur, elle n’avait eut ce dernier pour séduire personne. Elle était restée au manoir, avait suivi ses cours, avait même évité Mercutio, pour ne pas avoir à parler de sa mésaventure. En somme toute, elle était ailleurs. Une Joleene Black plus sombre, baignant dans sa solitude sans l’ombre d’un regret. Ce qui finalement l’embêtait le plus, c’était qu’elle puisse s’imaginer l’aimer lui, quand il n’avait sans doute rien à faire avec elle. Après tout, elle était jeune, et il n’avait pas chercher à revenir la chercher. Une coucherie d’un soir, c’était ce qu’elle avait demander, après tout.

« Vous êtes venu. C’est que quelque part, vous aviez envie. » Elle le regarda, puis détourna les yeux. Elle, elle n’avait que rarement ce choix. Si elle était libre, elle n’avait pas encore pris goût aux gifles violentes de Joy, et finalement, venir avec une trace de gifle sur la joue, c’était encore pire que venir bien habillée. Elle s’ennuyait, voilà tout. Ça se lisait sur son visage comme dans un livre ouvert, elle ne s’en cachait pas. Elle eut un petit rire finalement : « Puis après tout, ça vous fait un bon terrain de chasse pour une future Lady Grey à engrosser. »

Elle était partie sur une phrase toute simple, mais elle ne pouvait tout simplement pas. Même sans le fixer, sans avoir à le regarder, rien qu’à l’idée même qu’une de ses filles ait Lester comme elle l’avait eut, tendre et fauve à la fois, ça la mettait dans toutes ses humeurs. Elle jeta sa cigarette après l’avoir user jusqu’au filtre, et prit une gorgée de champagne sans un mot. Ses yeux étaient rivés sur le début de cérémonie à l’intérieur. Elle craignait par dessus tout le moment du dîner, puis ensuite celui des valses, puisqu’en tant qu’héritière de la première branche, elle avait ce statut élevé. Pour tout homme intelligent et cultivé, elle était la perle, une femme de mérite, jolie, intelligente. Mais elle avait la rage, et ça, ça ne plaisait pas.

« Vous êtes venu. C’est que quelque part, vous aviez envie.
- C’est vous maintenant ? Je croyais que nous avions au moins dépassé ce stade là., releva-t-il plus vraiment moqueur finalement. Il porta la coupe à ses lèvres sans la quitter du regard, figure-toi qu’être Lord ce n’est pas que la vie de château donc je ne parlerai pas de choix quoique sur l’envie il reste encore à discuter.»

Une drôle de manière de dire que maintenant qu’il l’avait sous la main l’envie de rester un peu plus se faisait jour mais il restait toutefois trop cordial pour qu’on puisse prendre ça pour une allusion mal placée. Ca ne l’était pas d’ailleurs.

« Puis après tout, ça vous fait un bon terrain de chasse pour une future Lady Grey à engrosser.
- Engrosser ? C’est charmant. Serais-ce une pointe de jalousie dans ta voix surprenante Joleene ? Je n’estime pas avoir à chasser un utérus où loger mon héritier comme un mort de faim, j’ai beaucoup plus d’orgueil que cela et entre nous je n’entends pas vraiment taper dans la grosse bertha à robe tape à l’œil. J’ai horreur des dépensières frivoles et je n’aime même pas les blondes. Ce qui évince déjà mesdames Bathory et compagnie.»
Il se retourna les coudes appuyés sur la rambarde pour s’offrir un meilleur point de vue sur les convives.

« Qu’avons nous d’autre … Mrs Hatcher je ne pense pas que Caleigh apprécierait. Temperance, non je ne suis pas encore suicidaire quoique la gamine en ait dans la tête… Camilla McSwann y a-t-il vraiment un visage derrière cette cascade de rides ?, persifla-t-il par jeu, jetant un petit regard oblique à Miss Black pour voir s’il parvenait à lui tirer un sourire, oh que dis-tu de ça : la tante Eileene, fraîche comme une rose, alerte l’œil brillant …, la femme qu’il décrivait n’était autre qu’une vieille tante Donovan qui avait largement dépassé les 100 ans et peinait à donner des ordres à sa chaise à porteurs et à ne pas s’endormir au milieu de chaque phrase. La pauvre femme n’avait jamais pu trouver un homme assez intéressé pour l’épouser et elle rebavait sans cesse la même histoire dans laquelle elle était l’amante secrète d’un lointain prince danois qui avait trop d’obligations pour pouvoir l’épouser tout de suite mais revenait la chercher en grande pompe d’un instant à l’autre… , quoi elle n’est pas à ton goût ? »

« C’est vous maintenant ? Je croyais que nous avions au moins dépassé ce stade là. » Elle resta de marbre, fixant la fête, ses yeux les fixant, un à un. Ils avaient dépassé un stade interdit. Elle n’aurait jamais dû. « …figure-toi qu’être Lord ce n’est pas que la vie de château donc je ne parlerai pas de choix quoique sur l’envie il reste encore à discuter. » Elle jeta un regard en coin, un sourire de renard sur les lèvres.
« La vie de Lord m’a l’air très difficile alors. »

Assister à des bals mondains sans arrêt, c’était sans doute, en effet, très épuisant. Quand elle, elle aimait la moto et sortir au clair de lune, comme une chauve-souris ou un chat noir, eux aimait les fêtes de fin de soirée, et c’était une abomination que de la voir au milieu des autres. Un soleil noir, c’était ce que son père lui disait qu’elle était. Un divin soleil noir au milieu de sa famille. Elle baissa les yeux, avalant une autre gorgée d’alcool.

« Engrosser ? C’est charmant. Serais-ce une pointe de jalousie dans ta voix surprenante Joleene ? »
« Comme si… » souffla t-elle, soudainement agacée.
« Je n’estime pas avoir à chasser un utérus où loger mon héritier comme un mort de faim, j’ai beaucoup plus d’orgueil que cela et entre nous je n’entends pas vraiment taper dans la grosse bertha à robe tape à l’œil. J’ai horreur des dépensières frivoles et je n’aime même pas les blondes. Ce qui évince déjà mesdames Bathory et compagnie.»

La grosse bertha. Joleene eut un sourire.

« Il faut être davantage que mort de faim pour oser l’engrosser celle-la. Davantage curieux de voir ce qui sortirait de ses cuisses après neuf mois. » Elle se retint de rajouter Lester à la fin de la phrase, refermant ses lèvres sur ce prénom avorté. Sa méchanceté gratuite trahissait cependant son éducation. Se faire nourrir par son époux, c’était une abomination sans nom chez les Black, les femmes ayant toujours travaillé pour leur confort et leur indépendance. Des amazones dans des corps de nymphe, ou de succube pour certaines.

« Qu’avons nous d’autre … Mrs Hatcher je ne pense pas que Caleigh apprécierait. Temperance, non je ne suis pas encore suicidaire quoique la gamine en ait dans la tête… Camilla McSwann y a-t-il vraiment un visage derrière cette cascade de rides ? » Elle eut un sourire doux et amusé sur le moment, imaginant un peu la tête que Camilla avait pu avoir jeune, mais même avec une imagination débordante, elle n’arrivait pas à se l’imaginer autre que comme elle s’affichait depuis vingt ans ; ridée.

« Oh que dis-tu de ça : la tante Eileene, fraîche comme une rose, alerte l’œil brillant… quoi elle n’est pas à ton goût ? »

Elle eut un petit rire, amusée cette fois-ci, vraiment amusée, et pencha la tête sur le côté, d’un air calme. Ses yeux s’étaient posés dans le vague, puis finalement sur le visage de Jack qui la cherchait dans la foule, comme pour ramener la renarde dans le poulailler, elle qui allait si mal avec les robes de nacre de ses cousines et de ses tantes. Elle redressa le visage, persiflant d’un air fier de lionne :

« Dire que j’ai connu ton lit, et que tu louches sur Eileene. J’aurais presque honte de toi, sale corbeau. »

Sa voix était gentille, ou presque. Chantante. L’espace d’un instant, elle ne lui en voulait plus, s’en amusait même. Après tout, elle était lunatique comme la lune, comme les déesses qui chassent, accompagnées de chiens pour mieux tuer le gibier qui erre dans la forêt qu’elle protège. Un paradoxe en soit. Elle souffla finalement, le fixant du coin de l’œil :

« Cependant, je retiens que monsieur me fait un cinéma pour mon âge et propose un instant Temperance Hatcher en utérus… mh, blonde pourtant. »

Parce qu’elle n’était pas folle la petite, et qu’elle ne retenait principalement que l’essentielle du propos. S’il avait imaginé quoique ce soit avec la jeune fille, qu’en serait-il avec ses cousines, plus jolies et princières qu’elle ne l’était elle-même. Elle fixait la foule, l’instant où Jack comprendrait, lui qui tournait en rond. Elle posa ses iris d’émeraude sur Samuel, plus loin.

« Dire que j’ai connu ton lit, et que tu louches sur Eileene. J’aurais presque honte de toi, sale corbeau.
- Vipère assassine, répondit-il sur le ton de la plaisanterie.»

La comparaison n’aurait effectivement pas été flatteuse pour Joleene. Ni pour Lester d’ailleurs. Le Lord suivait du regard la vieille qui menaçait de rosser un invité qui sans doute c’était moqué de son histoire de prince charmant.

« Cependant, je retiens que monsieur me fait un cinéma pour mon âge et propose un instant Temperance Hatcher en utérus… mh, blonde pourtant.
- C’est parce que j’ai un petit côté pédophile inavoué tu es déjà beaucoup trop vieille pour moi c’est tout. Je n’osais pas te le dire l’autrefois mais puisque tu insistes.

Lester arborait un air franchement sérieux, si ça n’avait pas été avec elle et dans un autre contexte, on aurait sans mal pu prendre ça pour un véritable aveu. Il laissa planer cinq secondes de silence, juste le temps de laisser ses yeux plonger dans ceux de Joleene.

Il leva les yeux au ciel amusé et dégoûté rien qu’à l’idée.

- Crois-tu vraiment avoir quelque chose à envier à Temperance ? »

Une phrase qui voulait tout et rien dire à la fois. Il vida sa coupe d’un trait et rentra comme Rudyard lui faisait signe qu’on passait à table. Il rentra et prit place à côté de la tante Eileene juste pour la blague, juste en face de la place réservée au Black d’ailleurs, de l’autre côté de la table. Le dîner promettait d’être plus qu’intéressant finalement.

« Vipère assassine. » Joleene eut un petit rire amusé, comme ce surnom lui allait si bien mais qu’elle ne l’avait jamais réclamé. Soleil Noir, c’était déjà un drôle de surnom pour qu’en plus elle n’en rajoute. Et puis elle avait trop peu d’ego de toute façon pour jouer sa mégalomane. Elle se contentait déjà de planifier la chute de Lester Grey. C’était déjà beaucoup de travail en réalité.

« Cependant, je retiens que monsieur me fait un cinéma pour mon âge et propose un instant Temperance Hatcher en utérus… mh, blonde pourtant. »
« C’est parce que j’ai un petit côté pédophile inavoué tu es déjà beaucoup trop vieille pour moi c’est tout. Je n’osais pas te le dire l’autrefois mais puisque tu insistes. »

Elle le fixa du coin de l’œil, puis eut un sourire, détournant le regard.

« Gros dégueulasse. »

Il leva les yeux au ciel et elle eut un petit rire. Elle en avait entendu des vertes et des pas mûres, et ne se choquaient plus de rien, ou presque. Elle bu sa coupe, la reposant sur le rebord du balcon dans le silence le plus complet. Jack venait de la repérer avec l’aide de Samuel. Comme quoi. Ils étaient plus intelligents tous les deux qu’il n’y paraissait. Elle se redressa, prête à accueillir son frère et son ami d’enfance.

« Crois-tu vraiment avoir quelque chose à envier à Temperance ? »

Elle posa ses yeux sur lui au moment même où il passait la baie vitrée. Elle fronça les sourcils, et baissa les yeux. Une seule chose à envier à cette petite blonde ? Rien du tout. Absolument rien. Elle secoua doucement la tête, chassant cette idée saugrenue qui venait dans son esprit et sortit avant même que son frère ne dise un mot. Elle le regarda, et posa ses yeux sur Samuel comme il était là lui aussi.

« On mange. Maman ne veut pas que tu rates le dîner, alors… »
« Je sais, ça ira. Où sont nos places ? »

Joleene n’adressa pas un regard à Samuel et suivit. Joleene contourna la table et remarqua Lester assis là, à côté de la vieille tante Eileene, mais fronça aussitôt les sourcils en voyant Joe assis à trois chaises de lui. Une de ses cousines, Joyce, se posa par ailleurs à côté de Lester en rigolant, ses sœurs s’étant mise à côté. Jack se posa à côté de Joe, et Joleene prit la dernière chaise, se retrouvant tout à fait en face de Lester. Elle le fixa quelques secondes, puis regarde Eileene… Donovan. Samuel posa ses fesses en face de sa tante, se retrouvant par conséquence à côté de Jolee’. Super. Elle était cernée. Elle chercha sa mère des yeux, mais elle était déjà loin. Jack eut un fin sourire en regardant Lester, puis sa sœur.

« Tiens, tu retrouves ton ami Jolee’. »
« On va peut-être avoir droit à des roucoulements ? » souffla Joe à côté, moqueur en fixant sa petite sœur.

Joleene ne cilla pas, levant les yeux au ciel.

« Ce que vous êtes bêtes. Tout le monde sait que L…le Lord Grey est amoureux de mademoiselle Eileene et que mon cœur n’appartient qu’à Samuel Donovan. »

Le présent Samuel leva un sourcil, étonné.

« Pour de vrai ? »
« Non, elle épousera pas ta gueule de rat Sam’ » ria aux éclats Joe.

Joleene posa ses yeux sur le plateau qu’on servait, de la salade et des gésiers chauds. Samuel, lui, avait détourné les yeux, timide. Il savait bien que c’était une blague, mais ça lui faisait toujours bizarre, à lui.

« Tiens, tu retrouves ton ami Jolee’. »
« On va peut-être avoir droit à des roucoulements ? »

L’air sombre de Lester – qui était en fait son air habituel mais encore fallait-il le savoir – n’engageait pas à plaisanter avec lui. Cet air là aurait tout a fait été de circonstance pour un enterrement par exemple. Une chance que ce ne fut pas une nouveauté pour les Donovan qui l’avaient invité sans quoi ils auraient sérieusement pu mal le prendre.

Lester porta un verre de vin à ses lèvres, laissant à Joleene le soin de gérer sa propre famille car si c’était lui, et il n’aurait pas vraiment de patience avec des gamins, cela commencerait déjà par un grand coup de poing sur la table. Le truc qui faisait typiquement peur et qui plombait l’ambiance quand ça venait d’un ex-taulard de la trempe de Grey. Mais passons.

« Est-ce que je vous ai parlé de mon Helge Lester ?, grinça la petite voix de la tante Eileene qui venait de poser sa main sur le bras de Lester pour être sûre de capter son attention…

Lester laissa les Black à leur petite conversation pour feindre de prêter son attention à la vieille dame quand son oreille capta malgré lui les mots de Joleene.

« Ce que vous êtes bêtes. Tout le monde sait que L…le Lord Grey est amoureux de mademoiselle Eileene et que mon cœur n’appartient qu’à Samuel Donovan.
- Amoureux et fidèle, prends en de la graine Samuel, répondit Lester se moquant bien de ce que le jeune Donovan ait pu être mal à l’aise.

Le pauvre garçon se leurrait visiblement depuis des années, mieux valait ne lui laisser aucun doute s’il en avait encore. On fit le premier service. Des gésiers fumants sur un lit de salade. Lester ne grimaça pas quoique le cœur lui en aurait dit mais il avait une éducation. On le servit et il feint de commencer à manger sachant très bien qu’il ne toucherait qu’à la salade, il reprit sa conversation avec Eileene Donovan jusqu’à ce qu’on le débarrasse pour le deuxième service. Ses yeux bleus passant en coup d’éclair sur Joleene de temps à autre.

Le regard clair de Joleene ne laissait rien entrevoir. Ni haine, ni tendresse, ni même un soupçon de sentiment. Elle mangea distraitement sa salade, posant de temps à autres ses yeux sur Samuel qui parlait avec Jack de ses futures affaires, comme Jack pensait lui aussi se lancer dans la finance, et qui sait, peut-être en compagnie de son ami Donovan. Joleene tirait la gueule, sombre comme à son habitude, repoussant sur le bord de l’assiette les gésiers. Son frère eut un petit rire de hyène, esquissant ce sourire de renard qu’avait la plus part des Black et ne trompait pas quant à l’unification de leur éducation :

« Si tu signes un contrat avec moi Sam’, je te propose même ma sœur en échange. »

Joleene releva les yeux sur Jack, le dardant de ses prunelles de vipère avec un mauvais sourire. Samuel eut un petit rire bête :

« Je signerais de suite. »

Elle laissa glisser son regard sur Samuel, le fixant d’un air calme :

« Profite en pendant que tu as encore tes deux mains. »
« Il n’en aura plus besoin quand il te sera marié. »
« On t’a pas parlé, Joe. »

Joleene avait l’habitude de ce genre de discussion, et si en temps normal elle n’avait aucun mal à gérer ses frères, elle se retrouvait toujours à lever les yeux au ciel d’un air dépité. Ils étaient sans gêne. Comme elle finalement. Plus loin Joy riait avec un énième riche de bonne famille. Joleene la regarda du coin de l’œil et grimaça, reportant son attention sur le second plat que l’on amenait. Du carpaccio. Elle grimaça. Joleene n’avait qu’un goût restreint pour la viande. Les viandes blanches, au plus. Tout ce qui était saignant était pas conséquent dégueulasse. Elle passa son assiette à son frère Jack.

« Et toi, qu’est-ce que tu comptes faire à la sortie de tes études ? »

Joleene releva le nez, posant ses grandes prunelles sur Samuel, penchant la tête comme à chaque fois qu’elle avait à réfléchir. Elle était déjà en troisième année de sortilèges après tout. Elle haussa les épaules, l’air désinvolte et nonchalant.

« Sans doute m’engager en tant qu’auror, ou… dans la BIM. Ceux sont de bonnes carrières à long terme. »

Samuel ne posait même plus la question des rentes. Il était clair que les Black étaient riches, mais elles avaient le travail dans le sang.

« Une vraie femme fatale… ! » sourit Jack en fixant sa petite sœur. Joleene roula des yeux.
« Mange au lieu de dire des âneries. »

Jack eut un sourire en coin et replongea son nez dans son repas. On débarrassa le carpaccio, et on servit la suite. Du canard et des patates.

« … ce fut une relation brève mais passionnée. Ne riez pas Lester, je suis même sûre que vous les jeunes vous n’imagineriez pas.
- Je ne suis pas certain d’avoir très envie d’imaginer tante Eileene.
- Quel gentil garçon vous faites. Je vous le garantis avec un si bon caractère et un si bon lignage vous n’aurez pas de mal à conclure des fiançailles intéressantes, encouragea la vieille qui visiblement se croyait quelque trente ans en arrière, en train de parler au garçon qui venait de quitter Poudlard et fêtait ses ASPICS avec le reste des Donovan, Blake et autres McSwann.

Lester eut un sourire amusé. Une chance qu’elle ne remette pas les évènements qui avaient suivis. Une main se posa sur son épaule. C’était Cécilie qui apportait une assiette de lieu noir pour Lester avec un petit clin d’œil qui tira un rictus complice à Lord Grey.

- Elle est tout à fait ravissante. Mais quand même, la différence d’âge ne vous dérange pas Lester ?, s’inquiétait la tante Eileene qui se méprenait sur les intentions de Cécilie McSwann.
- Moi ? Pas du tout.
Un autre clin d’œil à Cécilie qui levait les yeux au ciel en promesse de jouer le jeu. A ce moment là la conversation des Black lui revint aux oreilles. Le petit Samuel commençait malheureusement à tomber en disgrâce aux yeux de Lord Lester Grey, quand à Jack Black – quel nom ridicule – il prenait le même chemin sinon précédait son ami Donovan.

Cécilie arriva, et le regard de Joleene se leva sur elle. Elle pinça les lèvres, détournant le regard avec cette incroyable fureur noir bien profond dans les prunelles, que seul Jack pouvait voir pour l’avoir souvent connu. Il s’arrêta de blaguer sur le coup, Samuel continuant à parler sur les affaires de son père qu’il reprendrait tôt ou tard – le plus tard possible étant d’une hypocrisie certaine. Il s’impatientait à Ealdwic, critiquant allègrement le fait de traîner avec des sangs impurs dans un établissement qui ne répondait même pas aux critères sang-purs, ni ne fonctionnait selon la législation du gouvernement. Jack eut un fin sourire de renard encore une fois.

« En même temps, Sam’, ce n’est qu’une question de temps pour que le partit prenne le total contrôle de l’Angleterre, et cela changera la vision des autres pays. »
« Nous sommes en de bonnes voies pour être des précurseurs dans le genre. » reprit Samuel avec un sourire.
« Le Mexique et l’Italie sont déjà pleinement mangemorte si je ne m’abuse. »

Les iris de vipère remontèrent sur Jack puis Samuel. Son frère eut un petit sourire amusé, alors que Samuel fit la moue, sentant qu’elle avait encore une fois raison et qu’il venait pour le coup de dire une bêtise immonde – ce qui sous-entendait qu’il baissait dans l’estime de la jeune fille.

« Certes… » souffla t-il, un peu gêné alors qu’une serveuse venait retirer son assiette vide.

Joleene fit un signe à la jeune fille qui passait pour qu’on lui retire son assiette qu’elle avait à peine toucher. Elle reposa ses yeux sur sa cousine qui riait aux côtés de Lester, parlant avec ses autres cousines de futilité comme les garçons. Ses prunelles de vipère se posèrent ensuite sur Lester, puis sur Eileen, et enfin sur Cécile, un peu plus loin. Elle fit claquer sa langue sur son palais, cherchant à chasser cette envie impérieuse de fumer puis soupira. De toute façon, la plus part des invités avaient fini. Elle tourna la tête sur la gauche, quittant des yeux Samuel qui parlait avec un de ses oncles.

« Tu aurais des cigarettes Joe ? »

Son frère, qui parlait avec sa cousine, tâta au hasard sa poche et lui jeta le paquet qu’elle rattrapa. Elle se redressa et recula sa chaise, sans s’excuser. Après tout, elle faisait encore honneur de sa présence à cette soirée. Elle se retira sans un mot. Samuel posa ses yeux sur elle, imprimant son chemin, puis jeta un œil à Jack. L’ancien serpentard plissa le nez, devenant tout de suite plus froid quand Joleene disparaissait.

« Si tu la touches sans qu’elle ne veuille, t’es un homme mort Sam’. »

Le Donovan le fixa quelques secondes de plus et finalement se leva, prenant le même chemin que Joleene avant. Il trouva la jeune fille fumant sa cigarette au balcon. Samuel se pinça les lèvres et se rapprocha doucement d’elle. Elle se retourna doucement, ses iris verts le perçant aussitôt, relevant le nez, d’une manière qui lui convenait, la rendant totalement supérieure. Samuel n’était qu’un rat, mais un rat qui gagnait de l’hardiesse quand ils étaient seuls. Il se rapprocha encore, prêt, posa ses mains de chaque côté de la jeune fille, sur le rebord du balcon. Elle le fixa, fière, la clope rouge au bec.

« Joleene… »
« Sam’. » Un écran de fumée passa entre leur deux visage. « Tu es trop proche. »
« Du but ? Sans doute… »

Il eut un sourire en coin, follement amusé par la situation. Il se rapprochait, peu à peu, et la jeune fille grondait silencieusement, avec cet air dur sur le visage.

Le repas tire sur sa fin et les convives quittent la table qu’ils ne rejoindront que pour le dessert. Si Lester n’est pas un grand fana de sucreries, ce moment là du repas a au moins l’avantage de coller à ses habitudes alimentaires. Profitant de ce que les places se libèrent autour de Lester, ses amis les plus proches, dont Cécilie viennent prendre une place près de lui et discuter mais…

« Tu m’as l’air ailleurs Lester…, fait remarquer Lady McSwann
- Dis-le si on t’emmerde, ricane Rudyard.
- Je crois que c’est l’heure de ma pause clope et puis oui vous m’emmerdez.

Un fin sourire vient confirmer que ce n’est là qu’une boutade. Lester se lève et quitte la table l’air de rien. Quelque part il se dit qu’il a tout intérêt à trouver un autre balcon. Après tout mieux vaut laisser le jeune Donovan se casser les dents ce sont des choses de son âge et de celui de Joleene d’ailleurs. Peut-être qu’il devrait la laisser faire encore une fois un choix, après tout… à son âge et quand on a son rang, on est pressé de toute part de conclure un mariage. Mais merde, ça ne lui convient pas de laisser un autre mec sauter sa surprenante Joleene sous son nez. Ce qu’elle fait quand il n’est pas là passe encore. Mais il a largement passer l’âge d’aller se battre comme un chiffonnier, et puis ça n’a jamais trop été son style, sauf peut-être lorsqu’il s’agissait de sa sœur jumelle.

Il intercepte un serveur et lui parle. Puis le serveur retourne en cuisine pour ne réapparaître qu’un long moment après.

« Tu es trop proche. »
« Du but ? Sans doute… »
« Monsieur… pardonnez-moi de vous déranger, nous avons eu un petit soucis en cuisine et nous ne voulions pas déranger monsieur votre père mais nous avons besoin de vous, impérativement monsieur.

Lester a un fin sourire absolument moqueur. Un regard supérieur et chafouin qu’il adresse à Joleene par dessus son verre de vin et qui disparaît aussitôt que la place commence à se libérer. Il revient sur le balcon, l’air de rien.

- Tu avais plus de répondant avec moi, tu vas me vexer là Joleene., dit-il l’air de rien.

Il ne va pas non plus faire comme si il n’était pour rien dans l’éviction de ce pseudo-prétendant à la manque…

« Monsieur… pardonnez-moi de vous déranger, nous avons eu un petit soucis en cuisine et nous ne voulions pas déranger monsieur votre père mais nous avons besoin de vous, impérativement monsieur. »

L’iris émeraude de la vipère capte le sourire de Lester, et elle ne dit rien quand Samuel Donovan recule de quelques pas et suit finalement le serveur d’un air embêté et ennuyé. C’était toujours proche du but qu’il se prend un obstacle, et celui-ci est de taille.
La jeune fille, elle, ne cille pas. Un fin et long sourire sournois se dessine sur son visage, et elle recrache un épais nuage de fumée, sa cigarette se tendant sur ses lèvres rose thé, à moitié entamée, à moitié finie. De la cendre rouge qui brûle dans l’obscurité, voilà ce qu’elle est. Un point rouge sur l’astre noir. Joleene fixe le corbeau.

« Tu avais plus de répondant avec moi, tu vas me vexer là Joleene. »

Elle a un petit rire puis finalement sourit comme un chat, douce et calme, penchant doucement la tête sur le côté, s’appuyant davantage contre le rebord du balcon. Elle recrache une bouchée de fumée ; ses yeux brillent dans le noir, cherchant les pupilles azur du criminel.

« Peut-être parce que Donovan m’intéresse… »

Son sourire chafouin ne ment pas. Elle ment, c’est évident, et quand bien même elle dirait la vérité, ça ne serait pas sérieux, pas de sa taille, pas de son rang. Elle qui mange les hommes un à un, elle le dévorerait et ne laisserait que les os. Alors elle reprend, quelques secondes plus tard, de cette voix basse et chuchotante, un souffle dans la nuit, comme un aveux :

« Peut-être parce que je me lasse de répondre à ceux qui ne sont en rien intéressant. Peut-être parce que provoquer Donovan est un jeu d’enfant, et que ça n’est plus amusant. Peut-être aussi parce que j’attendais que le corbeau vienne et dévoile sa vilaine face. »

Son large sourire quand elle fixe Lester ne ment pas. Sale corbeau, a t-elle dit, et elle le pense. Il est de mauvais augure cet oiseau là. Elle retire de ses lèvres la cigarette salvatrice, soufflant une bourrasque frivole et quasi transparente d’un nuage gris, couleur des cendres. Elle le fixe, la cigarette entre les doigts, amusée :

« Serais-ce de la jalousie que je vois sur ta face, sale corbeau ? » Un instant, puis elle sourit, penchant la tête sur le côté, moqueuse et sournoise à la fois : « Crois-tu avoir quelque chose à envier à ce bon Sam’ ? »

Ses iris perçant le fixent. Le jeu redémarrerait presque, si seulement il n’avait pas ce goût d’amertume.

« Peut-être parce que Donovan m’intéresse…
- c’est vrai que vous êtes si bien assorti. »

S’il avait pu croire un seul instant à ça il se serait piqué de jalousie mais là, il ne peut même pas prétendre une seule seconde qu’il y a cru.

« Peut-être parce que je me lasse de répondre à ceux qui ne sont en rien intéressant. Peut-être parce que provoquer Donovan est un jeu d’enfant, et que ça n’est plus amusant. Peut-être aussi parce que j’attendais que le corbeau vienne et dévoile sa vilaine face. »

Il la regarde faire comme elle se croit sûre d’elle. Comme elle croit pouvoir peut-être lui faire courber l’échine ou plier le genou devant ses piques mais il reste Lester, égal à lui même, toujours aussi peu enclin à faire ce qu’on croit pouvoir forcer chez lui.

« Serais-ce de la jalousie que je vois sur ta face, sale corbeau ?
- C’est une question ou une supplique ça Joleene ? Il ne la laissera pas jouer ce petit jeu d’à qui domine l’autre. Il le lui a dit, il la possède déjà de toutes les manières qu’elle voudra, mais inexorablement. Ils se sont pris quelque chose l’un à l’autre mais il ne tient qu’à elle finalement d’accepter une réciprocité qui ne serait plus hypocrite… sinon pourquoi jouer ce jeu de dupe ?
- Crois-tu avoir quelque chose à envier à ce bon Sam’ ?
- Sa naïveté pathétique peut-être… mais même pas. »

Il se penche pour allumer sa cigarette, celle qu’il ne devait pas fumer. Le briquet jète un éclat rougeoyant sur ses yeux et lui donne l’air d’un démon à nouveau.

« Et puis, je pourrais être jaloux si tu n’avais pas tant peur de me donner une raison de l’être. Et je n’en n’ai aucune n’est-ce pas ? »

Ses yeux scintillent d’une drôle de lueur comme il fronce légèrement les sourcils en tirant sur sa cigarette. Il ne se fera pas doux comme un agneau devant les piques de Miss Black. Déjà à son âge il était un garçon difficile, mais maintenant, ayant de surcroît l’expérience des choses, il ne sera pas homme à faire la carpette.

Sa proposition est assez claire mais encore une fois il ne fera pas le choix pour elle. Il marque juste là les limites. Si tu joues à ça tu t’en prendras plein la gueule, sois cordialement en revanche et je serais un ange.

« C’est vrai que vous êtes si bien assorti. »
Elle pince les lèvres, esquissant une moue vexée. Ça, c’était franchement moche comme réponse. Elle, au niveau de Samuel Donovan. Si elle n’avait pas aucune chance de porter un jour le nom de Lady – elle se prédestinait à mourir avant sa mère de toute manière – elle avait plus de noblesse que ce dernier. Elle roula des yeux, pas d’humeur à piquer une crise. Elle avait déjà vu deux verres, ce qui signifiaient qu’encore deux et elle serait assez en forme pour coucher avec n’importe qui de toute la soirée. En soit, une bonne nouvelle pour elle qui n’avait pas eut le cran ses deux dernières semaines, sa dernière expérience restant Lester. Foutue expérience. Elle vida son troisième verre, entrant dans la phase juron, et le posa à côté de son premier verre vide. Elle n’avait plus envie de rire finalement.

« Serais-ce de la jalousie que je vois sur ta face, sale corbeau ? »
« C’est une question ou une supplique ça Joleene ? »

Elle le fixa, de ses yeux couleur algue, et eut un vilain sourire sur le visage. Touchée. Une fois. Elle roula des yeux et détourna le regard. Son verre était vide. C’était la première fois qu’elle voulait passer au stade 13ème verre sans passer par le reste. Dormir, ce n’était pas si mal que ça finalement. Vomir avant. Vomir Lester, ce maudit baiser sur son cœur. Sale corbeau de merde.

« Crois-tu avoir quelque chose à envier à ce bon Sam’ ?
« Sa naïveté pathétique peut-être… mais même pas. »

Elle roula des yeux. Cette discussion devenait ridicule, totalement absurde. Elle soupira, l’air lasse, et fuma les derniers centimètres de sa cigarette sur le sol, l’écrasant du bout du pieds. Elle n’aurait jamais du revenir, ou tout du moins, venir à cette foutue soirée.

« Et puis, je pourrais être jaloux si tu n’avais pas tant peur de me donner une raison de l’être. Et je n’en n’ai aucune n’est-ce pas ? »

Ses yeux se relevèrent sur Lester, le détaillèrent. Il aurait été tellement plus simple de se laisser aller, de juste voir ce que ça donnait après tout, de venir et de se pendre à ses lèvres. Mais justement, c’était trop simple. Joleene se décolla doucement du rebord du balcon. Ses iris étaient de plus en plus sombres, et son aura étalait plus loin encore cette ambiance lugubre que Lester avait laissé après son passage. Elle pouvait avoir n’importe qui ce soir, et ce n’était pas sa présence qui allait changer quoi que ce soit.

« Tu n’as aucune raison d’être jaloux. Après tout, nous ne sommes rien, et nous ne serons jamais rien. »

Elle avança de quelques pas et s’arrêta à la hauteur de Lester. Ses yeux le fixaient en coin, détaillant son profil. Dire qu’il était la perfection de l’idéal de Joleene au niveau du physique, et que son caractère avait quelque chose de sensuel… Si seulement il n’avait pas autant de gueule.

« Reste solitaire ; ça te va bien mieux… »

Elle hocha la tête et sortit, rejoignant la table. Samuel n’était toujours pas revenu, et Jack parlait moldu avec Joe. Elle posa ses fesses. Plus la soirée allait, moins ça allait. Justement.

« Tu n’as aucune raison d’être jaloux. Après tout, nous ne sommes rien, et nous ne serons jamais rien.
- Encore une fois c’est toi qui en fait le choix. »

Le regard de Lester a changé. Il est plus incisif, plus froid. Si ça n’était que lui, il n’en ferait pas tant d’histoire mais elle a cette manie de lui tourner autour en lui faisant croire qu’elle ne mange pas de ce pain là et ça, passer un moment, ça commence à l’agacer prodigieusement. Comme il l’a dit, il a suffisamment d’écart en âge avec elle pour ne lasser vite de ces petits jeux.

« Reste solitaire ; ça te va bien mieux…
- Ca c’est encore mon affaire et non la tienne Joleene. Du moins pas tant que tu t’en tiendras à cette version de l’histoire. Mais surtout, ne viens pas dire ensuite que j’ai été un salaud.»

Là dessus il pose son verre sur la rambarde et rentre toujours avec la même prestance. Il a l’air posé mais en lui c’est tout autre chose. Elle a réussi à l’agacer pour de bon.
Le dessert arrive et il ne lui accorde plus un regard puisque mademoiselle s’est mis en tête de lui mener une petite guéguerre typiquement Blackien c’est vrai mais qui n’est absolument pas la tasse de thé de Lord Lester Grey.

Le dîner se terminant, ses amis le rejoignent et les conversations se concluent petit à petit. Certains partent, Lester va rester là pour la nuit.

« Encore une fois c’est toi qui en fait le choix. »
Vulgaire passif. Joleene gronda mais ne répondit pas, pas à celle-la. Quelques pas suffirent à rompre la distance de leur deux corps . Elle le fixa, un instant, ses yeux se lassant de regarder ce visage qu’elle ne connaissait que trop hélas.
« Ca c’est encore mon affaire et non la tienne Joleene. Du moins pas tant que tu t’en tiendras à cette version de l’histoire. Mais surtout, ne viens pas dire ensuite que j’ai été un salaud. »
Mais tu as été un salaud. Joleene le fixa, et finalement détourne la tête et s’en va, la tête haute et l’air fier, le visage renfermé mais ça, ce n’est qu’une habitude pour la jeune fille. Elle s’assoit à table et son regard ne touche plus Lester du repas. Elle parle avec Jack de futilité, ignore totalement Samuel, reprenant ce ton cinglant et agressif qu’elle a quand les verres se sont accumulés. Elle mange son dessert en silence, jetant au hasard un œil à sa mère qui rit avec Duncan Hemmington. Elle souhaite la fin du repas, et finalement se lève dès qu’elle le peut, s’éclipsant dans les toilettes pour respirer encore une fois sa propre haine, la chassant au mieux.

Elle ressort après quelques longues secondes et se rapproche de Jack pour danser. Elle glisse sa main dans la sienne, reste à une distance normale et danse. Elle le fixe, parce que lui la fixe en retour. Ce n’est pas une habitude de Joleene Black de danser. Elle danse avec son petit air de chat furibond. Elle en veut à la terre entière, rembarre Samuel quand il l’invite à danser et reste accrochée aux bras de son frère aîné. Vers la fin de la soirée, quand peu de gens sont restés, elle souffle finalement :

« Est-ce tu déclencherais une bagarre pour moi, Jack ? »

Son frère aîné la fixe, et rigole finalement aux éclats, malgré l’air vexé du chat aux yeux de vipère.

« Je l’ai déjà fait, je crois. La dernière fois que j’ai cassé la gueule au fils de Erik. »
« Mh… » Elle le fixe, puis soupire, lasse, et baisse les yeux.
« T’es amoureuse ? » Jack sourit, moqueur jusqu’au bout des lèvres.
« Je ne pense pas. » Elle hausse les épaules. « Si je l’étais, je n’aurais pas envie de tous les mecs célibataires du coin, Jack. » Il la fixe, réfléchit, puis rigole :
« Pendant un moment, tu m’as fais peur. »

Elle le regarde, et finalement s’arrête de danser pour la soirée. Jack file avec Joe chez deux filles de bon sang, laissant Joleene seule. Elle part rejoindre Joy, mais sa mère est déjà endormie dans une chambre du manoir. Soit. Elle se rapproche du banquet alors, la pièce est complètement vide. Elle balaye la salle du regard, ose allumer une clope à l’intérieur, une autre, et se sert un verre. Le quatrième. Le fatidique. Elle le fixe, le regarde, le fait tourner entre ses doigts. Le boire ? Ne pas le boire ? Elle recrache une volute de fumée, et finalement s’assoit à une table et pose son verre dessus. Elle est seule, totalement seule. Elle lève la main, défait l’épingle magique qui soutenait jusqu’alors sa crinière et la laisse retomber sur ses épaules. Sombre, la pièce plongeait dans la pénombre, éclairée par quelques chandeliers de flamme rouge, elle fixe le verre, fait son rebord du bout de l’index. Elle est sombre comme une tombe…et tout ça, c’est de sa faute.

« Avec lui, Jolee’ ? » Les iris verts glissent sur le côté et tombe sur la face de Samuel Donovan. « Avec ce vieux ? Tu sais quand même qu’il a l’âge de mon oncle ? »
« Va te branler, Sam’, ça te détendra. Tu saoules plus que mon verre. »

Elle soupire, ressert entre ses doigts le verre. Si elle le buvait, elle pourrait clairement coucher avec Samuel au milieu d’ici, dans la salle de réception pour sûr, puisqu’elle est vide. Cependant, les plans ne se déroulent jamais comme prévu.

« Qu’est-ce qu’il a de plus que moi ? »
Joleene le fixa et roula des yeux. Vulgaire Joleene.

« Je dirais approximativement 10 centimètres. »
Samuel fronça les sourcils et envoya son pied dans la table, la renversant. Joleene avait son verre entre les doigts.

« C’est ça que tu cherches chez un mec ?! C’est ça ?! »
Il hurlait littéralement, faisant son scandale. Elle fronça les sourcils et bu son verre cul sec, se levant aussitôt après de sa chaise. Son œil vert était mauvais, et elle serrait les poings d’un air de dire ne m’emmerde pas, ne m’emmerde surtout pas, mais Samuel Donovan n’écoutait pas. Il hurlait encore comme on égorge un cochon. Il posa ses mains sur sa ceinture et commença à la défaire, sifflant des « tu vas voir ». Joleene ne bougeait pas, le regardant, une lueur s’allumant dans son regard.

« T’es juste qu’une putain… ! »
Il venait juste de finir d’écarter les pans de son jeans sur son caleçon vert. Joleene le frappa d’un poing si fort que Samuel tomba en arrière, s’éclatant sur le sol. Elle grimpa à califourchon sur lui, posant aussitôt ses deux mains sur sa gorge, le tenant fermement contre le sol. Les bras de Samuel aussitôt s’étendirent en croix sur le carrelage vert sombre. Il la fixait, d’un œil qui hésitait encore la colère ou justement l’excitation. Ils étaient bassins contre bassins. Il allait crever là.

« Je suis très loin d’être une putain, Sam’… très loin… » Et comme elle soufflait cela, ses mains se resserrèrent sur la gorge de l’ancien serpentard. Un simple petit coup de reins contre Sam’ suffit alors à lui tirer un grondement d’impatience et de plaisir. Elle le fixa, mais serra plus fort ses doigts et continua à onduler sur lui. Samuel perdait pieds à ce si simple contacte. Joleene serra les dents. Ça n’allait pas. Ça n’allait pas. Même quand elle était au dessus, Lester la possédait, la tenait, la prenait véritablement. Samuel n’était rien. Elle plissa les yeux, son regard se faisant perçant.

« Tu… » Joleene desserra ses doigts de sur la gorge de Samuel. « T’es juste qu’une grosse merde. T’es une carpette. Une tâche. Une pédale en somme. Tu veux savoir pourquoi ça ne marchera jamais entre nous ? Parce que t’es tout ce que je déteste. Un putain de rentier qui s’est jamais sali les mains. Un putain de blanc-bec qui croit que la vie se résume à Londres et à son petit chemisier griffé Armani ou Gucci. Tu dois t’astiquer en pensant à ta mère, prenant ton pieds à te faire passer pour un mafieux ou quelqu’un d’important quand bien même ta mort ne ferait pleurer que ta mère Jocastienne, qui n’a jamais supporté que tu tombes amoureux d’une autre femme qu’elle. Ta vie entière est une plaie dans mon existence.. Tu gangrènes. Tu veux savoir ce qu’il a de plus que toi ? Tout. Absolument tout. Si j’étais une putain, j’aurais couché avec toi, dans le noir, pour pas voir ta sale gueule de rat, mais entre nous, non… » Elle le fixa, releva le nez, fière. Lui ne disait plus rien, calmait. Il avait même débandé. « Lester peut-être tout et n’importe quoi, Sam’, mais franchement… T’es rien. Qu’une pauvre merde. Alors que lui… »
Samuel la fixa, et releva les yeux. Deux pieds étaient juste à côté de sa tête, juste là. Et ce n’était pas ceux de Joleene qui n’avait pas bougé, le regard fixé sur le sol, les poings serrés.

« C’est ça que tu cherches chez un mec ?! C’est ça ?!, l’éclat de voix interpella les quelques sorciers qui ne s’était pas retirés. On reconnut assez facilement la voix nasillarde de Samuel Donovan. Lester Grey leva un sourcil n’ayant pas trop de mal à se représenter la scène qui se déroulait dans la salle désertée du banquet quoi qu’il ne poussait pas jusqu’à ce qui se passait réellement. Si Donovan Junior n’avait rien ajouté, Lester n’aurait pas fait grand cas de tout ça. Il serait aller se coucher et point barre. Mais il avait fallu que Samuel ajoute c’est quelques derniers mots : T’es juste qu’une putain… ! »

Lester termina son verre comme il ne craignait pas pour Joleene. Il n’était pas le genre d’homme a faire d’une femme une assistée ou une faible créature qui a besoin de se pendre à son bras pour survivre. Bien au contraire. Sans quoi il aurait épousé n’importe quelle femme objet un tant soit peu agréable à regarder en sortant d’Azkaban. Et dans un second temps il ne voyait même pas comment le pauvre Samuel Donovan aurait pu avoir raison de Joleene Black.
Le Lord anglais réajusta sa veste, glissant ses mains dans ses poches se qui lui donnait l’air d’autant plus désabusé et flegmatique. D’un pas lent après avoir souhaiter la bonne nuit à Cecilie et Rudyard qui visiblement partageaient un peu plus que quelques souvenirs, il éteignit la lumière et glissa comme une ombre jusqu’aux deux gamins dans la pièce d’à côté.

« Lester peut-être tout et n’importe quoi, Sam’, mais franchement… T’es rien. Qu’une pauvre merde. Alors que lui… »

Voilà qui avait de quoi lui accrocher un sourire de requin sur les lèvres. Ses pieds encadraient pratiquement la tête de Samuel Donovan.

« Tu devrais te relever gamin, ce genre de femme n’aime guère les carpettes et encore moins les serpillières. Tu saurais faire la différence si tu avais vu un peu plus de vraies putains dans ta vie. Dégage de là avant que ça ne m’énerve. »

Il restait toujours aussi calme, rien à voir avec ce fou furieux qui aurait tué sa sœur pour avoir séduit son meilleur ami. Là vraiment il était au mieux de sa prestance, au mieux de sa grandeur et son aura lugubre en imposer de trop pour qu’on s’amuse à tester un peu plus sa patience. Il y avait même longtemps que Lester Grey n’avait pas été si digne de son titre de Lord. C’était que Joleene Black devait avoir une bonne influence sur ce sale corbeau comme elle disait.

Un instant, lourd, passa. Joleene resta là, silencieuse, les poings serrés, alors que Samuel remarquait deux pieds. Le corps qui allait avec, Joleene le connaissait par cœur. Elle resta calme pourtant, calme parce que ivre, calme parce qu’elle venait de sortir tout ce qui lui était resté au travers de la gorge toute la soirée, ou presque. Le reste n’allait pas tarder.

« Tu devrais te relever gamin, ce genre de femme n’aime guère les carpettes et encore moins les serpillières. Tu saurais faire la différence si tu avais vu un peu plus de vraies putains dans ta vie. Dégage de là avant que ça ne m’énerve. »

Samuel fixa Lester, mais à l’air, il n’osa rien dire.. Il repoussa doucement Joleene qui se laissa tomber sur les fesses, sur le sol. Samuel décampa, sortant en courrant du hall de réception. Joleene resta sur le sol, calme… Elle baissa les yeux, soupira, et leva la main, frottant son front du revers de sa main.

« Quelle abominable soirée encore, tous les deux. »

Elle releva le nez, assise sur le carrelage froid, et le regarda. Ses yeux azurs croisèrent son regard de vipère. Elle ne souriait pas. Elle semblait ailleurs. Elle l’observa, puis baissa les yeux. La fatigue de ses deux semaines peut-être s’accumula sur le bord des yeux, mouillant ses iris, les rendant plus brillant. Elle n’allait pas pleurer, juste ressentir cette vague d’émotion. Elle ramena contre elle ses jambes, restant sur le sol, chuchotant alors :

« T’as pas le droit de me dire que tout est ma faute alors que tu vas te lasser de moi. »
Elle révélait là peut-être sa plus grande peur en réalité.

Lester regarda le gamin décamper, amusé plus qu’autre chose. Peut-être que d’ici deux ou trois prostituées il saurait un peu plus s’affirmer. Ca ne serait pas encore assez pour avoir Joleene et donc ce serait très bien pour Lester.

Ses yeux bleus se posèrent sur ce petit bout de femme qui devait contenir en elle quelque chose comme … un dragon à moins que ce ne soit une forteresse.

« Quelle abominable soirée encore, tous les deux. »

Il eut un sourire et s’accroupit devant elle, tendant la main pour encore une fois remettre cette éternelle mèche de cheveux bruns qui ne voulait pas rester en place. Son pouce effleura doucement la joue de Joleene. Il paraissait débarrassé de sa contrariété de tout à l’heure sur le balcon.
Elle ramena ses jambes à elle comme un bouclier contre les agressions du monde. Contre lui aussi sans doute. Mais cette fois il ne se moquerait pas, appliquant à la lettre la règle de l’ange et du démon qu’il avait fixer pour eux deux.

« T’as pas le droit de me dire que tout est ma faute alors que tu vas te lasser de moi.
- Je me lasserai d’une amante Joleene. Parce que tous les amants sont lassants à la longue quand ils ne sont justement rien de plus que des amants., la main toujours posé sur son visage, il se pencha pour déposer un baiser sur sa joue puis sur sa tempe, cesse de me faire la guerre. Je ne cherche pas à te déposséder de toi-même, à t’enfermer dans quelque chose qui ne te ressemblerais pas ni même à te changer. Je t’apprécie telle que tu es surprenante petite Joleene.»

Il se recula pour ne pas l’étouffer comme il devinait à quel point l’amazone avait peur qu’on la fasse femme muette. Il sourit, rassurant mais restant à une distance raisonnable. Patiemment, il s’adossa au mur, restant assis près d’elle sans rien dire.

Elle ferme doucement les yeux quand il remet en place une mèche de cheveux, ronronnant comme un chat. Elle est calme, un ange finalement. C’est ridicule. L’alcool qui doit la rendre nerveuse la rend douce et lente. Groggy, c’est le mot. Elle rabat ses jambes, pas sûr de ce qu’elle fait. Peut-être qu’elle a peur, mais…Jooleene Black n’a peur de rien que d’elle-même dans le fond.

« T’as pas le droit de me dire que tout est ma faute alors que tu vas te lasser de moi. »
« Je me lasserai d’une amante Joleene. Parce que tous les amants sont lassants à la longue quand ils ne sont justement rien de plus que des amants » Joleene ferma les yeux et tendit presque le visage comme il lui embrassai la tempe, rouvrant ses yeux couleur algue sur lui « cesse de me faire la guerre. Je ne cherche pas à te déposséder de toi-même, à t’enfermer dans quelque chose qui ne te ressemblerais pas ni même à te changer. Je t’apprécie telle que tu es surprenante petite Joleene. »

Elle le fixa, et comme il reculait, elle baissa les yeux. Mercutio et Caym avaient déserté. Un jour ou l’autre, elle serait seule, et Lester aurait trouvé quelqu’un, quelqu’un comme Temperance Hatcher, ou Cécilie. Elle leva la main, la passa sur son front et soupira. Elle ne savait plus où elle était, qui elle était. Ni même ce qu’elle foutait ici. Il l’avait déboussolée. Elle releva doucement le visage, plantant ses yeux dans ceux de Lester, et s’avança doucement vers lui. Elle passa une jambe par dessus les siennes et vient se coller tout doucement à lui, avec cette tendresse qu’elle n’avait que rarement.
Elle nicha son visage dans son cou, passant ses bras autour de lui. Elle respira son odeur quelques longues secondes avant d’extirper son visage de sa cachette. Son nez commença à frôler la joue de Lester.

« Sois jaloux. » Ses paupières se fermèrent à moitié, ne laissant entrevoir qu’une partie majoritairement verte de ses prunelles. Elle ronronnait doucement, bercée par ses propres pensées. Ses bras serrèrent un peu plus Lester un moment, comme elle chuchotait : « Je ne veux pas voir de Cécilie, d’Eileene, Temperance ou de Bathory avec toi… Sois à moi. » Elle s’arrêta un instant, jalouse à l’intérieur, mais se calma aussitôt, ses bras se desserrant doucement sur lui, quoi qu’ils restaient en place.

Il l’entoura de ses bras comme elle venait chercher leur sécurité, posant son menton sur sa tête. Il était doux lui aussi , comme chaque fois qu’elle ne lui avait pas fait la guerre.
« Sois jaloux… Je ne veux pas voir de Cécilie, d’Eileene, Temperance ou de Bathory avec toi… Sois à moi. »

Lester eut un sourire amusé comme de toutes les femmes elle ne citait que les plus improbables. Mais malgré tout, cette petite pointe de jalousie sincère faisait chaud au cœur.
Il se laissa le temps de la réflexion, non pas parce qu’il ne savait pas quoi dire, mais parce qu’il voulait éviter les traits d’humour qui auraient pu la blesser ou la vexer alors que finalement ils n’étaient rien d’autre qu’un jeu sans conséquence.

« A qui d’autre ? »

Il sourit et finalement, lui relevant le menton :

« Reste avec moi cette nuit, je me suis ennuyé de ta présence ces deux dernières semaines. »

Un aveu pour un aveu. Il n’avait aucune honte à le dire. Il y avait peu de gens qui auraient osé y redire quoique ce soit sauf peut-être les Black elles-mêmes mais ça n’était pas ce qui allait le faire fuir ou l’effrayer lui. Il lui souriait, attendant une réponse sans toute fois en exiger une. Il n’y avait pas la moindre pointe de lubricité dans son regard. Passer du temps avec elle ne nécessitait pas forcément de s’engager dans ce genre de relation à ses yeux. Parce que justement elle n’était pas juste une amante.