Depuis son retour de la forêt interdite, Fedorus n'avait pas fermé l'oeil de la nuit et était assis à table, dans la salle à manger, face à une étrange petite boîte noire laquée qui semblait creuse et ne comportait ni gonds ni serrures. Amarante avait fini par aller se coucher et Noisette, lui, roupillait grassement tout contre le petit chat angora de Fedorus qui était étalé de tout son long sur la table. Fedorus voulait percer le mystère de cette étrange boîte tiède par lui-même, c'était comme une sorte de défi dont l'échéance se produirait vers midi, heure à laquelle Fawn passerait et trouverait certainement comment ouvrir cette boîte. Fedorus avait tout essayé pour ouvrir cette boîte et était en train de consulter son grimoire de métamorphose. Tellement concentré sur ses lectures, il n'aperçut pas Amarante se lever, ni le soleil en faire de même, ni entendre partir sa cousine en cours. Il était là, les cheveux hirsutes, la barbe naissante et les paupières lourdes à tenter tout ce qu'il pouvait pour ouvrir cette boîte... Aucun enchantement ne semblait fonctionner mais la métamorphose semblait au contraire donner de meilleurs résultats. Et ce fut vers 8h30, alors que Noisette s'étirait en baillant, que Fedorus réussit enfin à déballer cette boîte étrange et à observer, perplexe, son contenu... Ni une, ni deux, il se leva et barbouilla vite fait un parchemin qu'il s'empressa de sortir pour le donner au hibou de la maison.

A son retour, Noisette venait de dresser la table pour le petit déjeuner tout autour de l'oeuf et s'était mis à faire chauffer un marshmallow au dessus de ce dernier. En voyant faire le lutin, Fedorus sourit et dit à Noisette de préparer d'autres couverts pour une invitée, demande que le lutin exécuta avec une certaine joie, mais seulement après avoir confié son marshmallow à l'animagus... Quel était donc cet oeuf si chaud qu'il pouvait chauffer des aliments ? Fedorus se demanda un instant s'il était possible que ce fût un oeuf de dragon et se demanda alors s'il n'aurait pas dû écrire à Tadeo plutôt... Mais en se regardant dans la glace et en voyant sa tête, il se ravisa aussitôt. Quoi que tout d'un coup, il avait très envie de voir son chevaucheur...

Le lutin acquiesça même s'il n'avait rien compris et se dirigea naturellement vers l'oeuf pour se réchauffer les mains. Fedorus partit alors dans la salle de bains pour se laver tandis que le lutin invoqua un petit cercle de feu vert tout autour de l'oeuf pour maintenir sa température...

Une bonne douche avait le pouvoir naturel de chasser les nuits blanches, comme si ces dernières coulaient en même temps que l'eau bienfaitrice. Enfin, presque. Car au moment où Fedorus se regarda dans la glace pour se raser, il avait toujours la même tête et les mêmes cernes. La journée allait être rude, il le savait déjà. Maintenant rasé, il se sentait un peu mieux mais redoutait déjà la digestion du petit-déjeuner qui allait l'assommer certainement pour de bon. Remarque, connaissant Jocelyn, cette dernière viendrait sûrement le voir le plus vite possible et elle lui permettrait certainement de ne pas s'endormir bêtement, au moins ce matin. Alors qu'il sortait de la salle de bains, nu comme un ver et sifflotant gaiement un air que le vitrail Mélusine chantait en choeur, il tomba nez à nez avec Jocelyne qui s'affairait autour de la table...

Instinctivement, Fedorus s'avança pour enlacer son amie mais il s'aperçut bien vite qu'il était pas très habillé pour un tel accueil. Aussi, il se mit à rire, lui demanda "un instant, s'il te plaît" puis se dirigea rapidement vers sa chambre où il enfila des vêtements. Aujourd'hui, il n'irait pas en cours car il ne voulait pas s'endormir en plein amphithéâtre donc il choisit des vêtements simples, un pantalon en toile et un tee-shirt avec un gros cocotier imprimé. Pendant qu'il s'habillait, Noisette sourit à Jocelyn et lui indiqua avec ses mains et son charabia habituel la place qu'elle devait prendre pour le petit déjeuner. Il escalada ensuite une cruche de jus de citrouille et inspecta minutieusement les plats pour être sûr que rien ne manquait. Thé aux herbes fumantes, brioche tiède, jus d'orange, de citrouille, marmelade, confiture de cerises d'Ealdwic, toasts, beurre, tout y était ou presque... Fedorus sortit de sa chambre, maintenant habillé et s'avança une nouvelle fois vers Jocelyn, l'enlaça affectueusement et déposa un gros baiser sur sa joue.

Jocelyn aurait sûrement plein de questions à lui poser, on n'envoyait pas tous les jours un parchemin où l'on parlait d'objets qu'on avait pris des poches de braconniers, mais pour l'heure, l'estomac de l'animagus était la priorité. Aussi il s'assit à table, coupa la brioche, se servit un grand verre de jus de citrouille, le but d'un trait et regarda enfin Jocelyn. Noisette, lui, transplana dans la cuisine et commença à jouer avec les fourneaux, en témoignaient le crépitement des flammes et de ses rires diaboliques...

Fedorus s'apprêtait à pointer du doigt le cercle de feu qui était autour de l'oeuf mais une assiette d'omelette juteuse apparut devant lui et il se contenta d'un "wouuh"...

Fedorus écouta avec attention les propos de Jocelyne tout en mangeant par petits bouts son omelette. Alors qu'il se servait du thé, il se demanda si le lutin, lui, savait ce qu'était cet oeuf. Il avait invoqué un petit cercle de feu vert et ce n'était certainement pas pour faire joli même s'il reconnaissait volontiers que Noisette aimait bien décorer les intérieurs à sa façon. Mais cette attention toute particulière semblait venir d'ailleurs. En tout cas, cet oeuf supportait visiblement ce feu et ne craquait pas. A vrai dire, il commençait même à devenir légèrement translucide et on pouvait à peine y distinguer une forme plus sombre à l'intérieur. Bien qu'il aimait beaucoup s'occuper de créatures fantastiques, il n'avait jamais vu un tel oeuf et était à ce moment encore loin d'imaginer ce qui se préparait à la vie dans sa coquille ignifugée. Jocelyn souleva alors un autre souci, la date de la ponte. Malheureusement, la boîte ne contenait que l'oeuf, aucune indication et Fedorus n'avait pas très envie de retrouver ce braconnier pour lui demander quand cet oeuf avait été pondu. Ce fut accompagné d'un large sourire que Fedorus répondit ensuite à Jocelyn :

A cet instant, Noisette réapparut sur la table dans un "pop" léger et se dirigea naturellement vers Fedorus en baragouinant des sortes de mots incompréhensibles mais qui voulaient certainement demander si l'omelette était bonne. Fedorus acquiesça du menton et satisfait, le lutin se dirigea vers Jocelyn avant de poser sa main sur sa tasse de thé pour vérifier qu'elle était toujours bien à température. Tout allait bien, les convives avaient tout deux l'air d'apprécier le menu et le lutin en était donc tout simplement ravi. Maintenant que les "grands" étaient sur le point d'être rassasiés, le lutin quitta la table et se mit à aller soigner les différents occupants de la maison, à commencer par les salamandres qui commençaient à s'impatienter dans la cheminée...

Fedorus n'en revenait pas. Pas de l'apparition de sa tante, non, mais de cet oeuf sur cette table. C'était donc un oeuf de phénix. Noisette avait dû le sentir ou le savoir ou même peut-être les deux. En tout cas, cet oeuf devait certainement manquer à ce braconnier et Fedorus pensa alors qu'il était déjà plus en sécurité ici. Il écouta attentivement les particularités qu'égraina Lily au sujet de l'animal et regarda à nouveau l'oeuf, émerveillé...

La voix de Fedora retentit dans la pièce. Dans son tableau, elle protestait vivement et cela agaçait presque le cygne qui était peint à côté d'elle. Fawn sourit et tendit sa main vers son aïeule.

Blague ou pas, Fawn n'était maintenant plus là. Cela ne perturba nullement son neveu qui continuait de regarder l'oeuf avec un sourire béat.

Le petit lutin fit alors de grands signes pour attirer l'attention sur lui et sauta dans les airs avant de s'enflammer et de tomber au sol...

Alors qu'il continuait de parler, il se leva de table et prit sa baguette avant de se rendre vers la cheminée. Il lança d'abord un sort de gèle-flammes sur lui, vivement observé par Gwendolyn qui était exposée juste au dessus, puis il ouvrit un bocal de petits piments et en jeta une poignée dans le feu crépitant de salamandres. Il se mit ensuite à genou et mit sa main dans le feu pour grattouiller le cou du petit dernier de la portée de la plus gourmande qui se ruait déjà vers les piments cuits. Il prit ensuite un des cailloux chauffés à blanc qui était près du feu, invita poliment une salamandre à s'y poser puis revint à table vers Jocelyn. Le petit feu vert de Noisette était une bonne idée mais la salamandre serait certainement mieux. Alors il posa sur la table le gros caillou et sa salamandre près de l'oeuf. Elle le renifla à trois reprises puis enlaça ce dernier avec sa queue enflammée pour le rapprocher du caillou bouillant.