Cela faisait deux semaines que Harper hantait ses pensées. Il avait bien sur trouvé tout de suite là où elle habitait, sur le campus en fait, grâce à l’accès qu’il avait aux fichiers du Ministère de la Magie. Le jeune prince danois avait ensuite élaboré tout un plan très simple : aller chez elle, frapper, et lui expliquer par le menu que de un, on ne le plantait pas comme ça et que de deux, elle n’avait aucun raison de paniquer : il voulait juste apprendre à la connaître, ce qui était une première, en somme. Mais il était aller rôder dans le coin quelques fois pour remarquer que la jeune femme avait un coloc’. Non pas qu’il soit jaloux, non, mais il se demandait si il était la raison pour laquelle Harper avait paniquée quand la bague s’était ajustée à son doigt. Il avait décidé de la prendre entre quatre yeux, le soir, après son travail. Mais pendant quinze jours, elle n’y fut pas. En congé, selon son patron. Le jeune homme ne savait pas trop quoi en déduire : si c’était à cause de lui, il trouvait ça un peu radical comme réaction quand même. Enfin bref, il l’avait attendu, jusqu’à la fin de son service, ce soir-là. Il l’avait vu sortir du bar, fermer derrière elle et renvoyer chez eux les derniers qui trainaient encore. Mais quelque chose l’avait empêché de lui parler à ce moment là. Quoi, il ne saurait le dire. Il l’avait donc suivie jusque chez elle, telle une ombre bien discrète. Mais Andreas vit la jeune fille se retourner plusieurs fois, le faisant redoubler de discrétion. Il se cacha dans l’ombre tant qu’elle monta dans son appartement.

Andreas attendit que de la lumière filtre par les fenêtres que les volet de masquaient pas encore avant de sortir de son recoin. Il se sentait légèrement ridicule d’agir de la sorte. Ca ne lui ressemblait pas vraiment. Mais c’était vraiment très important pour lui cette fois-ci. La rentrée approchait à grand pas. Il fallait qu’il se débarrasse de cette fichue malédiction. Et vite. Et Harper était celle qui l’en délivrerait, la bague l’avait affirmé. Le jeune homme s’avança furtivement vers le centre de la cour quand il buta dans quelque chose au sol. La chute fut inévitable et Nielsen étouffa un juron. Une fenêtre s’ouvrit et Andreas se fit aussi petit que possible. Mais il ne pouvait décemment pas rester au sol, il se releva donc aussi gracieusement que possible, époussetant sa cape. C’était … humiliant. Levant la tête, son humiliation fut encore plus totale quand il aperçu Harper à la fenêtre. Il fallait qu’il se rattrape et vite. Il avait vu faire un truc une fois dans une cour en France, il allait essayer. Il posa un genou au sol, levant la tête vers la jeune femme pour dire :

« Gente demoiselle, accepteriez vous de prendre un dernier verre avec moi ? »

Bon ok, quand il l’avait vu faire c’était pour une demande en mariage, ça sonnait mieux, mais bon, on fait avec ce que l’on a, hein !

Les yeux levé vers la fenêtre de la jeune femme, Andreas trouvait que les secondes passaient telles des heures. Qu’allait donc lui répondre la jeune femme. Un claquement de fenêtre fut la seule réponse. Voilà, c’était fini. Le jeune Danois se releva légèrement dépité. Non, cela ne pouvait pas être comme ça que ça devait se passer. Il avait besoin d’elle, elle le savait alors pourquoi réagissait-elle comme ça? Le jeune homme ne bougea pas, figé de stupeur. Mais quelque instant plus tard, la porte s’ouvrit et la jeune femme sortit. Le jeune Nielsen retint un soupir de soulagement. Peut-être enfin le signe de la fin de sa malédiction … enfin !

« Voilà sire. Mais j'accepte uniquement parce que je n'ai pas eu le temps de vous la rendre l'autre soir... »

Andreas la regarda retirer son pendentif et le mettre dans sa main. Quand il l’ouvrit, il y vit son anneau maudit, objet qu’il ne pensait pas revoir de si tôt. Il eu donc quelques instant d’inertie que Harper combla en lui expliquant :

« Il faut que vous sachiez que je ne pensais pas qu'elle m'irait. Je n'aurais vraiment jamais cru... »

Andreas sourit. D’un vrai sourire sincère que peu de gens pouvait se venter de lui avoir vu. Il comprenait très bien la surprise de l’étudiante. lui-même n’y avait tout d’abord pas cru. Et aucune fille n’y avait cru quand elles l’avaient toutes essayer. Et pourtant voilà ce qu’il en était. Ils n’avaient désormais ni l’un ni l’autre plus le choix. Enfin si, elle avait le choix de l’ignorer et de continuer sa vie, mais c’était bien mal connaître le jeune homme que de penser ne serait-ce qu’un instant qu’il accepterait une telle décision. Il passerait sans hésitation dans le clan des harceleurs si c’était ce qu’il fallait pour qu’elle le regarde, pour qu’elle accepte leurs destins désormais commun. C’est pourquoi il la lui retendit en disant :

« Tiens, elle est à toi maintenant… »

N’attendant pas qu’elle la reprenne, il la lui remis dans la main. Levant la tête, il constata que la nuit était belle … calme. Le parfait reflet de ce qu’il ressentait à l’instant présent. Harper était là, devant lui, avec dans la main la bague qui lui allait parfaitement signe que sa vie allait bientôt retourner à la normale. Il aurait presque pu dire pour la première fois depuis bientôt quatre ans qu’il était heureux. Presque; il ne le serait totalement que quand son calvaire serait enfin terminé. Et il savait que pour cela, il fallait qu’il développe des sentiments pour la jeune femme et surtout qu’elle en ait pour lui. Ce n’avait pas l’air d’être tout à fait gagné encore. C’est pourquoi il lui dit, préférant changer de plan pour quelque chose de plus propice à cela :

« Aller s’enfermer par une si jolie nuit serait dommage. Que penses-tu plutôt d’un verre sous les étoiles ? »

Andreas sortit sa baguette, signe qu’à sa demande, il pouvait très bien leur faire apparaitre une bouteille en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.

« Ça m'ira d'autant mieux... »

Andreas ne comprit pas sa réflexion avant de se souvenir qu’elle travaillait dans un bar, ce dont il n’avait pas réfléchit avant. Cela devait en effet l’arranger de ne pas passer encore du temps dans cet endroit. Le Prince Danois pointa sa baguette vers le rebord du parterre de fleur ornementant la cour pour y faire apparaitre deux verres en cristal et une bouteille du vin de goblin que sa famille faisait préparer ordinairement en septembre, même s’il se doutant qu’avec le dérèglement que la nuit perpétuelle avait causé, cette année n’était pas gagnée. Il se pencha pour attraper la bouteille et la déboucha d’un geste vif pendant qu’Harper lançait la conversation, ce qui l’arrangeait plutôt bien, il n’était pas doué dans ce genre de choses, il n’avait jamais eu à le faire, aller vers quelqu’un. Et il ne savait pas encore si c’était un exercice qui était susceptible de lui plaire:

« Tu es venu en Angleterre pour le Tournoi ou est-ce uniquement à cause de cette malédiction? »
« Pour ça, et pour te trouver toi ! » le jeune homme eu un sourire qui se voulait charmeur mais qui pourtant resta plutôt froid. Il fallait l’en excuser, il était novice dans ce genre de choses. Il lui tendit un des verres qu’il venait de remplir, avant de prendre le sien. Le jeune Nielsen avança son verre dans un geste qu’il avait maintes et maintes fois répété à tous les évènements des gens biens nés auxquels il avait pu participer en déclarant d’une voix presque trop solennelle :
« A ma chance d’avoir fait ta rencontre donc ! »

Était-il trop présomptueux? Peut-être bien, c’était dans sa nature de toute façon, mais il aimait à penser que cette soirée pouvait finir en confidences allongés dans l’herbe humide les yeux rivés sur les étoiles. Il n’avait jamais été un grand romantique, non, mais il savait que c’était ce qui marchait, il n’était pas né de la dernière pluie pour autant. Ce n’était jusque pas des méthodes qu’il avait employé jusque là, mais ce n’était pas une relation qu’il avait cherché jusque là non plus. Tout était trop nouveau et c’était peut-être ce qui faisait toute sa maladresse, loin de son charme froid qui avait fait tomber dans de filles du Nord, certes, mais peut-être serait-ce tout aussi efficace …

« Mh et quelle chance... »

Andreas ne put s’empêcher de remarquer la réticence d’Harper. Il le comprenait parfaitement, il sortait de nulle part, lui disant qu’elle avait désormais la lourde charge de le défaire de sa malédiction, qui impliquait des sentiments réciproque … c’était vraiment loin d’être gagné. Non, vraiment, le jeune homme se demandait pourquoi elle n’avait pas déjà fuit en courant, criant partout qu’il était fou. En tout cas, c’est comme ça qui lui-même aurait réagit si c’était un coup qu’on lui avait fait, en plus réservé certes, mais quand même. De plus, la jeune femme ne le connaissait pas vraiment, comme il s’était acharné depuis le départ à cacher celui qu’il était en réalité : un homme sans scrupules, mortel et froid, et fier de l’être de surcroit. Oui, il avait jusque là bien caché son jeu et continuerait à le faire temps qu’elle accepterait sa compagnie, le temps de gagner sa confiance en fait. Car, il en avait vraiment marre de cette malédiction et était prêt à tout, même à se montrer sympathique, chose toute nouvelle pour lui, pour s’en débarrasser. Car bien qu’on ne soit pas maudit sans raison, le jeune danois pensait intimement que rien, absolument rien, ne pouvait valoir une telle punition. Avait-il eut l’air ailleurs pendant une seconde, lors de ces réflexions ? Apparemment puisque la jeune femme jugeait utile de se mettre en mouvement. Ou alors avait-ce plus à voir avec les énergumènes ivres qu’il apercevait déjà au bout de la rue ?

« On ne devrait pas rester ici, ce n'est pas que je tienne absolument à t'emmener dans le parc mais... c'est un endroit qui gagne à être vu et personne ne viendra nous déranger. » Il n’eut pas le temps de répondre qu’il trouvait l’idée formidable qu’un des jeunes hommes cria avec une voix particulièrement éméchée : « Je suis désolé mon p'tit pote mais cette belle rousse c'est le grand amour de notre vie tu vois. »

Harper semblait à la fois amusée mais surtout désolée de ce dérangement. Andreas ne l’était pas du tout. Dans son pays, l’amour d’une femme se méritait par les actes plus que par les paroles, enfin du moins, c’Est-ce qu’il en était pour les petites gens du peuple dont les amours n’était pas dirigés par l’argent, la politique ou la manipulation, trois choses essentielles dans son éducation à lui qui avait fait de lui ce qu’il était. Cependant, on l’avait appris à se battre justement dans le cas où son éducation, ses bonnes manières et son esprit machiavélique ne seraient plus suffisant pour le sortir de telle ou telle situation. Avec un sourire, il dit doucement à la jeune femme, reprenant ce ton cérémonieux qu’il avait travaillé durant tant de temps avec ses précepteurs biens des années auparavant :

« Pour vous, chère demoiselle, je me débarrasserai volontiers de ses opportuns »

Sans attendre sa réponse, il lui fit un baisemain, un peu pour le protocole et surtout pour agacer le jeune homme ivre de l’autre côté de la cour avant de se diriger vers les perturbateurs de ce moment qu’il aurait voulu mémorable. Le jeune Prince sortit sa baguette d’un geste sec qu’il avait travaillé afin de le faire menaçant et qui maintenant tenait plus de l’automatisme que du réfléchi. Au jeune homme, il lança:

« Et cette jolie jeune femme pourrait bien être l’amour de ma vie également, alors battons nous en duels, comme de vrais gentlemen pour savoir lequel de nous est le plus méritant. »

Le jeune Danois fit claquer ses talons sur le pavé, levant sa baguette, se mettant en position, prêt à commencer le duel, faisant sortir de sa baguette de petites étincelles vertes, procédé habituel d’intimidation. Il avait été habitués à combattre dans les règles de l’art et ça se voyait.

« Oh non l'autre quoi... l'amour de SA vie, tu la connais que depuis ce soir si il faut! Mais ok ça marche. Celui qui gagne passe la nuit avec Harper! »

Andreas ne bougea pas. Il n’avait rien contre les termes de leur accord même s’il aurait plus fait rimer nuit avec vie, mais bon, ce n’était qu’une question de point de vue. Les deux antagonistes se saluèrent dans un nouveau claquement de talons de la part du Danois. Il allait attaquer le premier quand Harper les arrêta :

« Si je peux me permettre... Ronnie... les gars, arrêtez votre cirque cinq minutes. Vous ne pouvez pas vous battre pour m'avoir, d'une parce qu'il me semble que c'est encore moi qui choisis et de deux parce que nous sommes mariés. »

S’il s’était attendu à ça … en fait, non il n’aurait jamais imaginé un truc pareil. Un sourire franc vint orner ses lèvres, vraiment heureux, comblé même, du fait que la jeune femme prenne autant à cœur cette histoire de malédiction. Elle semblait décidément plus disposée à l’aider qu’elle ne voulait bien le laisser voir. Bien sur, Andreas se doutait bien qu’elle ne faisait cela que dans le but de faire déguerpir les jeunes gens, mais quand même, quelque part ça le touchait et Dieu seul savait combien il était peu sensible … certains disaient même qu’une pierre était capable de ressentir plus de chose que lui, et pas vraiment à tort. Mais vraiment, le fait qu’elle porte sa bague au doigt suffisait à mettre du baume au cœur du jeune homme, ou du moins à le faire se sentir étrangement satisfait. Un regard en coin de la jeune femme lui indiqua cependant qu’il ne s’était pas trompé sur le fait que c’était juste pour la mise en scène. Il lui adressa un regard entendu, après tout, c’était déjà un bon début et les étudiants en face semblaient y croire dur comme fer:

« Alors ça si je m'attendais... » Le jeune Nielsen s’approcha d’Harper et passa son bras autour de sa taille, l’attirant à lui dans un geste qui ne pouvait que confirmer ce qu’ils essayaient de faire croire. Il trouva néanmoins cette proximité tout à fait plaisante. Poussant le bouchon peut-être un peu (trop) loin, il déposa un baiser au coin des lèvres de la jeune femme. Ca réaction n’avait absolument pas été préméditée, et il avait agit plus par automatisme, sa réaction l’étonnant lui-même. Mais il était maudit après tout … et si c’était ça, l’effet que ça faisait de l’être, alors il voulait l’être encore et encore. S’adressant aux perturbateurs, sans pour autant lâcher Harper, il leur dit, presque sur le ton de la confidence:

« Je pense que c’est le moment pour vous de déguerpir avant qu’un malaise s’installe … »

« Hum oui euh … bonne soirée alors. »

Andreas regarda les jeunes gens déguerpir rapidement, tels des lapins apeurés dans les cambuses. Ils étaient (enfin) seul. La jeune femme toujours serrée contre lui, il n’avaient en fait, pas envie que ce moment cesse, mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, Harper s’éloigna de lui, disant :

« Excellent jeu d'acteur, je m'y serais laissée prendre moi-même... »

Le prince Danois lui lança un regard entendu qui aurait pu vouloir dire « j’ai fait ça toute ma vie », mais qui en réalité signifiait plutôt « c’est parce que c’était plus vrai que nature ». Il aurait bien aimé que tout cela ne fut qu’un jeu dont il était le grand gagnant comme il l’avait toujours fait dans sa vie auparavant. Mais cette fois-ci, c’était différent, différent parce que tout son avenir en dépendait, différent parce qu’il savait qu’il avait besoin de cette fille comme de respirer … et ça lui faisait peur. Le jeune homme était bien loin de sa superbe habituelle et de sa réserve froide, glaciale qui jusque là avait fait tout son charme. Il se sentait changé et n’aurait su dire si c’était en bien ou en mal. C’était encore trop nouveau, et pas irrémédiable, espérait-il. Le jeune homme eu un instant d’absence, de rêverie du futur dont le sortit la jeune femme :

« Ils ne sont pas bien méchants, juste un peu envahissants après quelques verres... »Il la suivit alors qu‘elle l‘invitait à le suivre vers le parc, hochant la tête pour approuver : des jeunes hommes aussi collant et bornés, on ne voyait pas ça tout le jours. Enfin, le jeune Nielsen commençait à se dire que c‘était peut-être un trait spécifique aux anglais qu‘ils avaient tous en commun car rares étaient ceux qu‘il avait connu ici qui n‘ai pas un fort caractère, chose qu‘il détestait par-dessus tout, habitué à dominer son monde.« J'imagine que tu dois être habitué à tout autre chose n'est-ce pas...? »

Andreas s’assit dans l’herbe du parc qu’ils avaient enfin atteint alors qu’elle lui posait cette dernière question. Elle le décontenança légèrement. En fait, il ne voyait surtout pas où elle voulait en venir. Il attendit qu’elle l’eut rejoint avant de penser à répondre. Oui, c’est vrai, il n’avait pas vraiment d’expérience dans les « vraies » relations humaines. Son monde avait toujours eu quelque chose de surfait, de contrôlé, de faux peut-être, mais c’est ainsi qu’il aimait la vie : ordonnée. Avait-il manqué des choses essentielles de la vie? Ce n’était pas son point de vue, même si la question était récurrente. Mais quelle réponse exactement avait-il droit de formuler? Pas celle-là en tout cas, cependant il prononça des mots qui devaient plus ou moins s’en rapprocher :

 « Je n’ai pas la même vie que les autres, est-ce que ça veut dire qu’il n’y a pas de cette sorte d’énergumène dans mon monde … pas vraiment, les mots sont simplement plus voilés … ça ne doit pas avoir beaucoup de sens là, maintenant pour toi, mais tu verras par toi-même »

A mots couverts, il parlait déjà d’un avenir commun, manière de tester si la jeune femme était prête pour la suite du déroulement de la soirée. Il avait des choses en tête qui risquaient de l’effrayer si elle n’était pas prête à ça.

« ... si je joue le jeu est-ce que tu me laisseras poser quelques conditions? » Andreas hocha la tête pour lui intimer de continuer. Il n’était pas de ceux à qui on posait des conditions mais il était toujours bon de connaître les revendications des autres individus pour agir comme il le convenait. En plus, il voyait mal ce qu’il pouvait lui donner et qui serait une contrainte pour lui : argent, titre, royaume, il lui offrait tout ça autant qu’elle voulait. Autant dire que le jeune homme n’était pas vraiment préparé à ce qui allait suivre. « Je... je consacrerai toutes mes nuits à t'aider mais en contre partie tu ne me demanderas pas mes jours à moins que la proposition vienne de moi. Tu ne poseras pas de questions et tu ne chercheras pas à savoir ce que je fais du temps que je ne t'accorde pas. » Le jeune Nielsen resta interloqué quelques instants. Ca, ce n’était pas vraiment conventionnel comme demande. Mais il ne voyait pas trop ce que ça changerait pour lui, en fait. Qu’elle occupe son temps comme bon lui semble, du moment qu’elle ne salisse pas son nom, c’était le top pour lui. Car oui, malgré le fait que la jeune femme lui plaise beaucoup, il ne supportait pas trop cette histoire de mariage arrangé par le destin de connivence avec une saleté de fée. Il prit sa main dans la sienne, lui assurant qu’elle pouvait parler librement : « Je sais que ça n'a pas l'air très sérieux comme ça, mais je suis sincère. J'ai besoin de savoir que je peux te faire confiance là dessus sinon j'y perdrai plus que tu n'y gagneras et ce n'est pas ce que je veux. ». Andreas affermit involontairement sa prise sur la main de Harper. C’était la première fois que quelqu’un prenait réellement à cœur le fait de l’aider, le considérait lui. Cette pitié n’était pas nouvelle, mais d’habitude, elle s’accompagnait d’un certain dédain. Et bien, oui, après tout, s’il était maudit, c’est que ce n’était pas un saint. Il ne pouvait donc décemment rien objecter : « Moi ça me va, du moment que tu ne fais rien pour salir mon nom, c’est parfait … mais tu sais que tu peux me faire confiance, tu peux tout me dire. Je peux tout entendre je pense. » Il ne savait plus trop quel baratin il lui avait servit à propos de sa malédiction, mais il aurait été près à lui raconter tout, la vérité, dans ses moindres détails, et même à avouer ses péchés s’il le fallait pour savoir ce qu’elle voulait lui cacher. Elle avait piqué sa curiosité au vif!

« Non ça je ne le sais pas encore, mais je suis là pour l'apprendre. Je te demande juste... ce n'est pas si simple et je sais que tu ne peux pas vraiment me faire confiance comme ça, d'un claquement de doigt, juste pour mes beaux yeux. Mais si tu peux respecter ça moi je te donnerai tout le reste. »

Andreas savait que la jeune femme avait raison. On ne donnait pas sa confiance comme ça à n’importe qui, il fallait du temps et des preuves pour ça, c’était d’ailleurs la première chose qu’il prônait. Mais un je ne sais quoi lui faisait penser qu’ils n’avaient besoin ni de temps ni d’aucune autre chose pour être en phase. Et pourtant, Merlin lui-même sait à quel point le jeune Prince était méfiant. Mais ce je ne sais quoi était simplement une malédiction. Et mettre tout ces bons sentiments sur le compte de la magie avait quelque chose de rassurant pour le jeune homme comme ça ne lui ressemblait absolument pas, mais en même temps, il ne pouvait s’empêcher de trouver cela absolument dommage. De plus, il ne savait que penser de la pression de la main que lui rendait Harper. Le silence avait fait sa place et pourtant, Andreas n’osait le rompre. Oui, que répondre de plus à cette vérité qu’il ne portait pas vraiment dans son cœur ? Si tout avait pu être aussi simple qu’un conte de fée dans lequel la princesse tombe immédiatement sous le charme du beau prince … Mais ici, c’était la vrai vie et il devait accepter que la jeune femme ait des réticences tout comme lui en avait. Quand enfin, la jeune étudiante rompit le calme de la nature qui les entourait, ses propos l’étonnèrent, en fait :

« Et je ne ferais rien pour salir ton nom. Je risque de commettre quelques impairs c'est sûr, mais il suffira que tu m'apprennes ce que je ne sais pas déjà. »

Un sourire vint orner les lèvres du Prince Nielsen. Cette phrase sonnait certes tout comme un mariage arrangé, mais un mariage arrangé par le destin, peut-être avaient-ils une chance d’être plus heureux que certains autres? Andreas n’avait jamais été un grand rêveur, mais un ambitieux, toujours, et être heureux était même le but des gens mauvais, catégorie dans laquelle il se rangeait avec fierté. Sans se défaire de son sourire, il mit un genou à terre, prit la main de la jeune femme entre les deux siennes et lui demanda, d’un air cérémonieux :

« Mademoiselle Anaël Harper Flynn, accepterez vous de devenir ma femme. »

La demande avait jusque là été implicite, mais maintenant les conditions posées, il ne voyait pas l’intérêt de la taire. De plus, elle avait déjà l’anneau qui en toute logique pour lui serait le symbole de leur union.

« Oui, j'accepte... » La pression de la main d’Harper se fit plus forte sur sa main, et malgré sa voix évasive quand elle avait répondu, Andreas était désormais certain de sa réponse. C’était officiel, il était fiancé. C’était un tel soulagement qu’il aurait pu hurler sa joie au monde. Il était flatté d’avoir une fiancée aussi séduisante, et même s’il ne la connaissait pas encore vraiment, il avait un pressentiment sur le fait qu’ils allaient vraiment bien s’entendre. Ses yeux dans les siens ne pouvaient en décrocher, et même si tout cela était légèrement dû à sa malédiction d’après son expérience, ce n’en était pas moins agréable. La comparer à Irina, il ne pouvait pas, les deux jeunes femmes n’avaient rien d’autre en commun que d’avoir été fiancées à lui et le fait d’être d’une compagnie particulièrement agréable. Le jeune Danois vit le visage de la jeune sorcière se rapprocher doucement du sien dans un geste d’une sensualité à tomber. Et pourtant elle tourna la tête au dernier moment. Ce n’était pas plus mal songea après coup le prince, le protocole avant tout n’est-ce pas, mais il ne pu s’empêcher d’être quand même un peu déçu sur l’instant. « Je vous demande pardon Prince Andreas... ça ne se fait pas.... de ce que je connais des malédictions je dirais que la vôtre, ou plutôt la nôtre, n'est pas étrangère à ça. Je... je serais plus vigilante... ». Les yeux d’Harper étaient légèrement fuyants comme si elle cherchait à dissimuler le fait que tout comme lui elle avait vraiment envie de ce baiser. Posant son deuxième genou à terre, la position devenant légèrement inconfortable, Andreas posa délicatement une de ses mains sur la joue de la jeune fille, dans une caresse, comme s’il cherchait à mémoriser la moindre courbe de son visage avant de lui dire:

« Je pense que la presse voudra l’exclusivité de nos premiers baisers » Andreas était une célébrité de par le monde, en quelque sorte, à cause ou plutôt grâce à son titre et sa malédiction n’en était pas moins légendaire. Leur mariage allait donc être un des évènements les plus médiatiques du siècle. « Et tu peux arrêter de me vouvoyer et de m’appeler Prince aussi » Il se rassit dans l’herbe aux côtés de la jeune femme. Il espérait qu’elle savait dans quoi elle s’était embarquée et surtout qu’elle savait ce qui se faisait ou non d’après le protocole, même s’il fallait qu’il lui apprenne quelques petites choses. Il vérifia donc : « Tu as compris tout ce que ça implique, ce mariage? Je ne suis pas uniquement un personnage du monde magique, ma famille règne également sur la partie moldue de notre pays. Après ça, tu seras une célébrité, dans le monde sorcier aussi bien que pour ceux qui l’ignorent totalement. Et eux ne connaissent pas la malédiction … » Le jeune homme marqua une pause. Dit comme ça, cela semblait vraiment effrayant, il n’en dit donc pas plus préférant passer à quelque chose d’autre, sujet non plus léger : « Et il va nous falloir une date à donner à la presse … » Tout cela était très terre à terre et peut-être un peu rapide, mais le jeune homme était totalement séduit et il ne voyait pas trop pourquoi perdre plus de temps qu’il n’en avait déjà perdu alors qu’il était maintenant persuadé qu’il ne lui faudrait jamais personne d’autre dans sa vie que cette jolie rousse.

« La...? Oh oui bien sûr, je n'avais pas pensé à ça. » L’étonnement de la jeune femme ne surpris pas Andreas. Il savait bien qu’elle n’avait pas eu le temps de penser à ça et que c’était bien la dernière chose à laquelle le commun des mortels pensait. Mais cela faisait partie de son quotidien et il calculait tout en fonction de son image depuis son plus jeune âge et s’était même révélé très doué dans ce domaine : la presse internationale l’adorait. Chaque détail était travaillé et ce mariage allait être le plus gros buzz médiatique de sa vie. Un mariage princier, il n’y avait que ça pour régaler les petites gens et les sortir de leur monotonie quotidienne. Après ça, il serait adulé et pourrait tout à son aise se débarrasser de son père pour prendre sa place, ce qui était tout de même son but ultime. Mais la jeune femme n’était pas encore prête à ça, et il s’en rendait bien compte. Il allait falloir tenir le secret un petit bout de temps, le temps qu’ils lui apprenne ce qu’elle devait savoir : « Je me suis engagée à t'aider, ce n'est pas dans mes habitudes de me défaire de mes promesses même si je ne regretterai sans doute jamais autant ma tranquillité qu'une fois que nous serons mariés, mais puisqu'il n'y a aucun autre moyen de te défaire de ta malédiction, et puisque de toute manière, je n'envisageai pas de me promettre à qui que ce soit, je pense qu'on peut dire que ce n'est pas un si mauvais compromis. » Le prince danois se demanda bien entendu pourquoi la jeune femme n’avait jamais pensé se marier, mais il chassa bien vite cette idée qui n’avait aucun sens: pour lui Harper était une jolie jeune fille qui ne le savait juste pas assez et basta. Il n’allait pas aller chercher de réponse plus loin. Il avait d’autre préoccupations, du reste, comme par où commencer pour lui apprendre le protocole : « Du reste je ne sais de ce qui m'attend que ce que la plupart des gens connaissent de la royauté. Tu sais j'ai grandi en Irlande, en pleine campagne. Mes parents sont des moldus, des gens honnêtes et travailleurs... ». Andreas lui sourit gentillement avant de la rassurer « Ne t’inquiète pas, je t’apprendrais, ce n’est pas bien compliqué … » Non, ça ne l’était pas, ou du moins, ça ne l’avait jamais été pour lui alors pourquoi en serait-ce autrement pour elle ? « Je me rappellerais toujours avoir regardé le mariage du Prince Charles d'Angleterre à la télé comme si... comme si je voyais un conte de fée prendre vie sous mes yeux. C'est amusant à quel point les choses semblent si simples quand on ne se pose pas de question. » Le sourire du jeune homme s’évanouit légèrement. Cette réflexion prouvait qu’il restait quand même pas mal de boulot aussi critiqua-t-il avant de lui demander une date : « Le prince Charles n’est qu’une image, il n’a aucune pouvoir. Notre mariage sera beaucoup plus grand, plus somptueux, même si les médias ne seront peut-être pas aussi présent… » Harper semblait avoir décrypté son léger changement de pensée car elle répondit aussitôt: « … il serait peut-être plus prudent d'attendre... un peu. Au moins le temps que tu aies pu faire de moi une épouse convenable. Je ne crois pas que qu'une roturière puisse s'improviser princesse peu importe en quel pays. Me trompai-je? » . Dans un sourire le jeune homme lui expliqua : « Je pense qu’il serait préférable d’attendre encore un peu effectivement … »

« Je serais toi je n'irais pas dire à un bon sujet de la couronne d'Angleterre que son futur roi n'est qu'un sujet de décoration au sommet de la pièce montée. » Andreas failli exploser de rire, se rattrapant au dernier moment. Il avait certes le droit d’être médisant mais pas le droit de ce moquer. La nuance était bien mince mais pourtant, il savait qu’il n’avait pas intérêt à franchir la ligne qui séparait les deux: bien que le prince d’Angleterre ne fasse que de la figuration, ce que tout le monde savait d’ailleurs, le jeune prince Danois ne lui en devait cependant pas moins respect et égards. Le jeune homme s’autorisa néanmoins un sourire: l’image du prince Charles habillé de plastique au dessus d’un gâteau avait quelque chose de totalement hilarant. La sur l’instant, il se sentait comme le plus heureux des hommes. Les débuts de cette histoire les mettaient sous des hospices qu’il pensait vraiment favorables. « Puis-je espérer te retrouver ici demain soir? … » Le jeune Nielsen eu un sourire. Il fallait croire que la jeune femme maitrisait déjà les bases de son art à lui. Elle aurait pu tout aussi bien lui dire : « Il se fait tard, il faut que je rentre » mais non, elle le fait subtilement, en demandant une promesse supplémentaire. Non, pas qui lui en coûte quoi que ce soit, mais il ne pouvait qu’admirer.

Le jeune homme se releva doucement, prit délicatement la main d’Harper dans la sienne pour l’aider à se relever avant d’y déposer un baiser. Tout ses gestes semblaient mesurés, calculés, et c’était bien le cas. Mais il se faisait tard et il avait à faire le lendemain. Il lui répondit donc :   « Ce sera avec plaisir » Il déposa un baiser sur sa joue, ce qui dépassait de loin le cadre autorisé, mais qui saurait après tout hein ? Il tourna ensuite les talons, certains que s’il ne partait pas sur l’instant, il ne voudrait tout simplement pas partir. Un dernier regard en arrière, juste le temps de sentir son cœur, chose nouvelle, tambouriner un peu dans sa poitrine et il disparu à l’angle de la rue.