Un univers bouleversé *ft. Aelys McNamara

La journée avait, pourtant, commencé normalement. Un agréable samedi comme les autres au Mocca Cacao. Isa avait, jusque là, servi les boissons et petits encas – parts de tarte, part de moelleux, pains au chocolats, croissants et autres viennoiseries – à ses clients, comme à chaque fois. La matinée avait été pluvieuse, pourtant le café n’avait pas désempli. Peut-être à cause de cette pluie qui tombait à torrents et poussaient les gens à s’abriter pour ne pas finir aussi détrempés qu’une serpillière miteuse en plein service. L’avantage de ce genre de journée, c’étaient les pourboires qui tombaient à foison à partir de moment où l’on restait souriante, ce qui était le cas de la jeune femme. Elle aurait, pourtant, volontiers troqué cette journée de travail contre une journée au chaud, dans un petit chalet de montagne, enroulée dans une couverture sur un canapé au coin d’une cheminée illuminée d’un bon feu de bois. D’où lui venait cette idée ? Elle n’en savait rien, mais elle la chassa rapidement afin de en pas se laisser distraire dans son travail. Dans un quart d’heure, elle sortirait les poubelles et prendrait sa pause. Une pause bien méritée après les deux heures de service non stop qu’elle venait d’enchaîner. Certains jours, Is’ pouvait enchaîner plusieurs heures de travail sans sentir la fatigue. Mais il s’agissait des jours calmes, et ce n’était clairement pas le cas ce jour-là. La jeune femme s’essuya le front du revers de la main qui tenait le chiffon avec lequel elle venait d’essuyer la table qu’elle avait débarrassée et nettoyée. Oui, sa pause serait, incontestablement, la bienvenue, même si elle se retrouverait trempée après. Qu’à cela ne tienne, elle utiliserait la magie pour se sécher. Après tout, elle était dans le Londres magique et était majeure, même si elle était une née-moldue (du moins le croyait-elle).

La jeune femme termina rapidement son service et sortit les poubelles pour prendre sa pause. Elle ne durait que quinze minutes, et elle comptait bien en profiter en se promenant un peu sous la pluie. Si ce n’était pas le temps qu’elle préférait, il n’en restait pas moins que cela l’amusait toujours de voir les gens se presser pour essayer de passer entre les gouttes. Un sourire se dessina sur le visage dégoulinant de la jeune métamorphe. Aujourd’hui, ses cheveux étaient auburn et sa peau pratiquement diaphane. Son regard clair, parfois dérangeant, était souligné de noir pour le rendre encore plus perçant encore. La jeune femme était cependant assez sobrement vêtue : un jean serré, des bottines à talons et un pull à col montant en laine noire. Par-dessus, elle portait une veste en cuir brut qui ne craignait pas la pluie. Elle se promena ainsi pendant la durée de sa pause, faisant du lèche-vitrine, sans pour autant entrer dans les magasins et revint vers le Mocca Cacao.

C’est en rouvrant la porte de derrière que la jeune femme entendit un gémissement de douleur et un rire à vous glacer le sang dans les veines. Elle s’arrêta net, la main sur la poignée et tendit l’oreille. « Tu vas crever, chien de cracmol… Tu vas supplier pour que je t’achève… » La voix lui fit froid dans le dos et elle l’assimila sans peine à celle d’un mangemort. Son discours parlait pour lui… La jeune femme sortit sa baguette de son étui de bras et se précipita en direction de la voix, sans même prendre le temps de réfléchir. Tout juste se prit-elle à songer au discours de Peru Savage lors de la conférence. Pour la première fois, Isa se sentit la volonté d’utiliser la magie noire. Pas pour son plaisir, mais pour sauver une vie innocente. S’il le fallait, elle était, même, prête à tuer. Du moins le pensait-elle…

La jeune femme arriva dans le dos de l’assaillant et découvrit une scène qui lui retourna l’estomac. Un enfant gisant dans une mare de sang, pourtant toujours en vie. L’enfant devait avoir une dizaine d’années, à peine et l’homme qui lui faisait face – et tournait le dos à Isaïah – devait bien mesurer dans les 1m95 minimum. Chauve, longiligne, tout de noir vêtu, la métamorphe ne voyait rien d’autre de lui et cela lui suffisait amplement. Elle lança, tout d’abord, un expelliarmus informulé et la baguette jaillit de la main de son propriétaire sans même que celui-ci ne s’y attende. Dans la foulée, alors qu’il amorçait un demi-tour sur lui-même, elle le stupéfixa et il tomba en arrière. Et maintenant ? Devait-elle le tuer ? Oui, sans aucun doute. Mais pouvait-elle le faire ? L’urgence n’était même pas là, de toute façon, l’urgence était de secourir l’enfant. Elle se jeta à genoux dans la flaque ensanglantée pour le prendre dans ses bras et écarter une mêche de son visage. « Ca va aller. Tu vas sentir des petits picotements, mais tu vas vite guérir… » Du moins, c’était ce dont elle-même aurait voulu être persuadée. Elle créa un mini patronus qu’elle envoya à Sainte Mangouste pour quérir des secours et, elle, essaya en vain de ralentir le flot de sang, par des moyens moldus et magique, mais rien n’y fit. L’enfant rendit l’âme entre ses bras. Plaquant le petit corps contre elle, la jeune femme voulut brandir sa baguette pour venger l’enfant quand une présence se fit sentir, la forçant à ranger sa baguette. Elle tourna vers le bruit un visage ruisselant de larmes et de pluie.

Le moins que l'on pouvait dire c'était que pour une fois les promesses du gouvernement avaient effectivement été suivies d'effet. Il était bien loin le temps où sur le chemin de traverse on entendait pester contre le bon vieux ministre Scylence qui faisait supprimer la brigade anti loups-garous au lieu de s'occuper d'améliorer le fonctionnement de Gringotts (tout le monde sait bien que les gobelins sont des rapiats et qu'ils vous embourbent dans des procédures interminables à la moindre occasion pourvu que ça vous décourage de retirer le moindre gallion)...

Non. Depuis que le gouvernement Blake était en place, il suffisait que la grande Inquisitrice ou Madame le Second Lord au gouvernement décrète quelque chose pour qu'on en voit immédiatement les effets. Cela allait du chemin de traverse qui n'était plus réservé qu'aux sangs purs (et aux fraudeurs mais n'en disons rien), à l'immense muraille qui c'était dressée en une nuit autour du quartier qui abritait l'Université pourtant si prestigieuse de Ealdwic. Mieux encore, le nombre de cadavres de nés moldus que les oubliators ramassaient tous les matins à leur ronde, juste avant que le couvre-feu ne soit levé. Et ne parlons pas non plus des malheureux qui avaient la chance de se faire cueillir en train de faire la manche, ou de fureter à la recherche d'un peu de nourriture. La ville était de très loin le pire endroit où vivre pour tous ceux qui n'étaient pas nés de sang pur.
Cela n'empêche pas la vie de suivre son petit cours tranquille, quasi imperturbable pour certains... On s'étonna d'autant plus de voir un énorme norvégien à crête argenté apparaître dans le hall de Sainte-Mangouste et demander de l'aide. Les deux infirmières standardistes échangèrent un regard perplexe, une fois remise de leur frayeur et aussitôt le Service d'Aide Médicomagique d'Urgence fut dépêcher avec, comme il était de rigueur depuis début septembre, ses deux représentants de la BIM affectés.

L'agent O'Connor adressa un regard au reste de l'équipe comme pour signifier qu'ils attendaient là. Et, comme son adjoint aussi discret qu'une ombre lui emboîtait le pas, O'Connor contourna le petit café qui portait l'insigne Mocca Cacao. Là, entre les quatre poubelles que le restaurant d'à côté avait déchargée en douce, les agents de la BIM reconnurent un de leur comparse mangemort un peu trop raide pour être dans son état normal. O'Connor cilla et se pencha sur le côté. Son regard noir tomba sur une pauvre fille dont il décida d'emblée qu'elle était en infraction, et un petit garçon inerte qui baignait dans une marre de sang.

« Agent O'Connor de la Brigade d'Intervention Magique. Je vous prierai de bien vouloir présenter votre baguette ou tout autre pièce d'identité que vous puissiez avoir sur vous... C'est bien vous qui avez demandé les urgentistes? » , débita-t-il d'un ton monocorde.

Dans son dos, les urgentistes en question essayer de jauger la situation, l'air tendu.

« Il est mort celui-là. Pas de baguette. » , commenta le deuxième agent qui était venu s'accroupir près de l'enfant.

Isaïah pleurait sur ce petit corps ensanglanté qu'elle serrait contre elle et n'avait pu sauver. Elle pleurait pour ce petit mort qui n'avait rien demandé. Rien d'autre que vivre. Rien d'autre que rire. Elle ne le connaissait pas, mais ce n'était pas grave. Il n'y avait pas besoin de savoir qui il était pour le pleurer. Elle ferma les petits yeux que peur et douleur avaient quittés. Jamais encore auparavant, elle n'avait voulu tuer quelqu'un. Mais quand vie et innocence étaient volées aux plus jeunes, on ne pouvait rester de marbre. Pas lorsqu'on avait un coeur. Surtout lorsqu'on avait un coeur. Sainte Mangouste arriverait, mais trop tard. Pourquoi n'avaient-ils pas transplanés? Avec ce petit corps mourant dans ses bras, elle, elle ne le pouvait pas. Pas sans le mettre gravement en danger. Mais de toute façon, cela n'aurait rien changé. Il serait mort dans le voyage. Et rester sur place ne l'avait pas protégé.

Après avoir créé le petit patronus, et après avoir essayé la magie, elle avait posé sa baguette pour comprimer les blessures de l'enfant, sans succès. Après sa mort, à présent qu'il était plongé dans un sommeil éternel, elle voulait tuer. Teur celui qui avait fait ça. Elle tendit la main pour ramasser son canalisateur de magie, mais un bruit l'en dissuada, la poussant à resserrer son étreinte sur le petit mort, comme pour le protéger. De quoi? On ne pouvait rien lui faire de pire. Dans son dos, une voix glaciale retentit « Agent O'Connor de la Brigade d'Intervention Magique. Je vous prierai de bien vouloir présenter votre baguette ou tout autre pièce d'identité que vous puissiez avoir sur vous... C'est bien vous qui avez demandé les urgentistes? » , à laquelle elle répondit entre deux sanglots: "C'est moi. Mais il est trop tard. Ma baguette est par terre, à côté de moi." « Il est mort celui-là. Pas de baguette. » L'urgentiste confirma rapidement la mort de l'enfant, et Is' lui lança un regard empli de désespoir, comme s'il pouvait faire revenir le petit à la vie. Mais il ne pouvait rien faire et, sans nul doute était-il avec cet agent O'Connor.

Lentement, elle lâcha l'enfant qu'elle laissa reposer sur le sol et se retourna pour tendre sa baguette à l'agent, la tenant par la pointe. Elle indiqua simplement que "Je l'ai désarmé et l'ai stupefixé. C'est tout. Et j'ai essayé de sauver cet enfant après avoir appelé les urgences." Rien de bien méchant, en somme, mais elle ne pouvait que se sentir soulagée de n'avoir rien attenté d'autre contre l'homme dont la manche relevée indiquait qu'il s'agissait un Mangemort. Un frisson la saisit alors qu'elle ne pouvait s'empêcher de penser que O'Connor, comme une grande majorité des membres des autorités devaient en être aussi. "Je retournais travailler après ma pause quand j'ai entendu un hurlement, celui de l'enfant." Une nouvelle larme roula le long de sa joue. Elle aurait tellement voulu pouvoir le sauver...

"C'est moi. Mais il est trop tard. Ma baguette est par terre, à côté de moi."

De toute évidence cet aveu n'eut pas l'effet escompté. Bien au contraire. O'Connor, toujours aussi impassible, fit signe qu'on ramasse et la baguette, et le cadavre et la fille qui serait bien évidemment accusée d'office dès lors qu'on aurait examiné sa pièce d'identité. Les disgraciés ont toujours tord de toute manière.

"Je l'ai désarmé et l'ai stupefixé. C'est tout. Et j'ai essayé de sauver cet enfant après avoir appelé les urgences.Je retournais travailler après ma pause quand j'ai entendu un hurlement, celui de l'enfant."
" Isaïah McBird. Sang de Bourbe de votre état...", énonça O'Connor plein de morgue tout à coup, " Vous avez entendu Messieurs, vous pouvez disposer ce n'est rien qu'une née moldue. Vous ne voudriez pas que je note dans mon rapport que vous avez porté assistance à... ça. Emmenez donc monsieur avec vous, vous ne vous serez pas déplacé pour rien.", fit-il en désignant d'un geste nonchalant l'homme qui avait été victime du sortilège de stupéfixion.

O'Connor notifia à ses sbires de se saisir de la demoiselle.

" Vous... travaillez ici donc Miss McBird? Serveuse, je présume. Ou préposée aux ordures peut-être...", l'insinuation était bien assez claire comme ça.

Fallait-il qu'il rappelle que les sang de bourbe n'étaient pas autorisés à travailler dans les lieux que fréquentaient les sangs purs ou à la rigueur pouvaient ils être tolérés mais seulement pendant les heures de couvre-feu...

Dans quelle merde s’était-elle fourrée ? " Isaïah McBird. Sang de Bourbe de votre état..." Dans une merde noire, visiblement. Sans doute avait-elle à faire aux copains du Mangemort qu’elle avait assomé. Pourquoi n’avait-elle pas changé d’apparence, et pris un autre nom ? Etant métamorphe, cela lui aurait été tellement plus simple… Il lui aurait suffi de prendre l’apparence de Kaprice, par exemple. Elle ne lui aurait sans doute pas attiré d’ennuis. " Vous avez entendu Messieurs, vous pouvez disposer ce n'est rien qu'une née moldue. Vous ne voudriez pas que je note dans mon rapport que vous avez porté assistance à... ça. Emmenez donc monsieur avec vous, vous ne vous serez pas déplacé pour rien." Isaïah fut prise d’un tremblement lorsque l’homme la considéra comme une chose. Qu’allait-il lui arriver ? Elle jeta un appel à l’aide muet à l’infirmier d’un regard. Elle était innocente, après tout. Qu’aurait-elle dû faire ? Regarder ? Visiblement, oui. Regarder, et se taire.

”Je n’ai rien fait de mal” murmura-t-elle, pas assez fort pour que les Mangemorts l’entendent cependant. Non, elle n’avait rien fait de mal. Cette certitude enflait dans son cœur, dans son âme, dans tout son être. Elle n’avait rien fait de mal. Uniquement voulu sauver une vie innocente de l’attaque injuste d’un Mangemort. La pire engeance qui puisse exister sur terre. Elle tourna la tête vers O’Connor, lui lançant, malgré sa ‘condition’ un regard digne, brillant d’un feu vif. S’ils avaient su, tous, qu’elle n’avait en fait rien d’une née-moldue que l’éducation, les choses auraient-elles été différentes ? Pour autant, la jeune femme, ignorant tout de son véritable sang ne regrettait pas d’être ce qu’elle pensait être. Elle eut le temps, malgré tout, de voir le signe du type à l’adresse de ses collègues. Arriverait-elle seulement au tribunal avec des types comme ça ? Il y avait fort à parier qu’il n’y aurait même pas l’ombre d’un procès et qu’elle serait tuée avant même d’y parvenir. Elle ne put empêcher son cœur de se serrer à cette idée. Elle voulait vivre.

" Vous... travaillez ici donc Miss McBird? Serveuse, je présume. Ou préposée aux ordures peut-être..." Mens lui souffla une petite voix. Mens pour eux… Un éclair sauvage passa dans son regard qu’elle détourna pour qu’il ne puisse pas le voir, baissant la tête comme si elle avait honte. ”Je suis préposée aux ordures aux heures où… » Dieu que le mensonge était difficile. Mais cela ne l’en rendait que plus probable. ”les sangs nobles peuvent venir. Quand les… » Dur… Très dur. Trop dur… ”…impurs peuvent, j’ai le droit de les servir pour que les sangs nobles ne soient pas souillés par leur présence. » La réalité des faits était autre, mais ils n’avaient pas à le savoir.

Par ailleurs, il était pour la jeune femme hors de question de se faire arrêter pour un crime qu’elle n’avait pas commis. Mais comment faire ? N’y avait-il personne pour venir à son aide ? Personne d’assez courageux ? Londres n’était-il peuplé que de lâches ? ”LACHEZ-MOI ! » hurla-t-elle quand les collègues du type l’attrapèrent. Alors, elle commença à se débattre comme une diablesse, ruant, mordant, esquivant. ”A L’AIDE ! QUELQU’UN !!!! »

Les agents du Ministère hochèrent la tête silencieusement. Sans le savoir, Isaïah venait d'éviter à son patron une descente de l'inspection qui n'aurait pas été très agréable. Par ailleurs maintenant qu'ils la savaient préposée aux ordures, ils n'en concevraient que plus de dégoût pour elle mais au moins, le plaisir malsain qu'ils allaient tirer à la savoir plus bas que terre lui épargnerait le pire.

”LACHEZ-MOI ! ”A L’AIDE ! QUELQU’UN !!!! »
” La ferme. Tu vas pas en plus être désagréable McBird, n'aggrave pas ton cas.», jeta O'Connor avant de laisser une note pour le gérant sur la porte de l'arrière boutique.

La note officielle du ministère suffirait amplement à expliquer la disparition de la serveuse, ou plutôt de la préposée aux poubelles. Ensuite, la procédure était simple...
Il y eut un crac sonore et l'étrange cortège disparu sans que personne ne soit venu à l'aide de la pauvre Isaïah. Cela ne voulait pas dire pour autant que personne n'avait entendu son appel au secours.

” Vous me listez ces effets personnels et vous me l'expédiez dans le district E. J'ai pas de temps à perdre avec toutes les souillons de Londres moi!», invectivait toujours O'Connor quand ils réapparurent dans le bureau des Aurors, leur prise ficelée dans un joli noeud de sortilèges.

A ces mots, il s'éloigna, préférant laisser les basses tâches à des aurors moins gradés.

” Toi tu viens avec nous!», cracha-t-on en empoignant Isaïah sans plus de ménagement.

Le périple fut long et silencieux. On emmena Miss McBird aux départements de la justice magique où, derrière chaque porte, on entendait un père supplier qu'on épargne sa famille, ou un autre jurer qu'il n'était en rien lié aux exactions de l'Ordre du Phoenix. Enfin on poussa une porte derrière laquelle il y avait un étrange vortex argenté. Aucune décoration dans cette pièce mais les murs eux mêmes semblaient avoir du mal à rester en place, comme si tout semblait aspiré vers le milieu de la pièce comme par un trou noir.

” Allez bon voyage l'amie!», se moqua l'auror préposé aux sales besognes en poussant Isaïah dans la pièce. La porte se referma derrière elle et alors, irrémédiablement, la jeune femme allait commencer à se sentir irrémédiablement aspirée par le vortex au centre de la pièce...

” La ferme. Tu vas pas en plus être désagréable McBird, n'aggrave pas ton cas.» Instinctivement, Isaïah rentra la tête dans ses épaules, craignant un coup qu’elle ne pourrait pas parer, vu qu’ils la tenaient, mais qui ne vint pas, fort heureusement. Tout comme personne ne vint à son secours. Elle eut beau continuer à se débattre, elle transplana néanmoins de force, ficelée comme un saucisson par des sortilèges. Dieu qu’elle avait horreur de ça… ” Vous me listez ces effets personnels et vous me l'expédiez dans le district E. J'ai pas de temps à perdre avec toutes les souillons de Londres moi!» District E ? Elle le traversait tous les jours pour rentrer à Ealdwic. Mais ça, ils n’avaient pas besoin de le savoir, où ce n’était pas là bas qu’elle finirait, mais au fin fond de l’Himalaya et sans baguette ni vêtements chauds, s’il vous plait… Ca, elle en était bel et bien persuadée. Elle s’efforça donc de se taire, les maudissant tous autant qu’ils étaient, leur souhaitant de mourir dans d’atroces souffrances. Comment pouvait-on ne pas venir en aide à un enfant ? Comment pouvait-on laisser ce genre de crime impuni ? Une larme glissa silencieusement sur la joue d’Isaïah ” Toi tu viens avec nous!» qui ne réagit même pas lorsqu’un autre lui parla pour l’entraîner dans un long calvaire, direction le département de la justice magique. Elle fermait simplement les yeux, serrant les poings lorsqu’elle entendait, derrière les portes, un parent supplier pour son enfant, sa femme, son mari, sa famille. Dans quel monde vivait-on aujourd’hui ? Un monde qui la répugnait de plus en plus. C’était un fait. C’était même une certitude.

” Allez bon voyage l'amie!» Je ne suis pas ton amie, connard… pensa la jeune femme en décochant un regard noir au type qui la balança dans une pièce avec un étrange vortex en son centre. Dès que la porte se referma, Isaïah se sentit attirée par le vortex. Non pas qu’elle ait envie de passer à l’intérieur de celui-ci, mais plutôt qu’il l’aspirait. Dès lors, elle recommença à se débattre, tentant de s’agripper aux murs, se retournant un ongle contre l’un d’eux en hurlant et en laissant une coulée de sang. Mais, finalement, elle fut bel et bien entrainée à l’intérieur du vortex. Comme un tourbillon dans l’océan, elle eut l’impression de tourner sur elle-même avant de disparaitre à l’intérieur du syphon, en direction d’une destination plus ou moins connue…

Lorsque l'on jetait quelqu'un derrière la porte marquée d'un grand "E", on s'attendait au mieux à entendre quelques cris avant d'être débarrassé de la "nuisance" que l'on avait si gentiment expédiée. Débarrasser définitivement ou plus ou moins. Mais il y avait au ministère des agents qui ne l'entendaient pas de cette oreille. C'était le cas par exemple de Mélian de St-Ange, ancien chef des Aurors qui pourtant avait tout l'air de se complaire dans ce nouvel ordre des choses.

Ledit Mélian passa devant la porte, l'air de rien, son éternel sourire de chat sur les lèvres.

***

Lorsque le vortex se rouvrit pour régurgiter Miss McBird, quelqu'un la saisit par les épaules avec douceur. Un jeune homme aux cheveux châtains, l'air un peu dandy qui avait une vilaine entaille à l'arcade mais un sourire jusqu'aux oreilles.

Autour d'eux, une ambiance chaleureuse. Un beau parquet de chêne couleur miel et un bon feu qui crépitait dans l'âtre. En face d'Isaïah, une jeune femme blonde au visage enfantin. Aelys McNamara. Un visage que les sorciers du tout Londres connaissaient pour l'avoir vu placardé partout et associé à l'Ordre du Phoenix. Voilà donc ce que c'était que la grande terroriste dont il fallait se méfier.

Ce qu'il y avait de sûr c'était qu'ici c'était tout sauf le District E.

" Est-ce que ça va? Pas trop de casse?", demanda le jeune homme." Je m'appelle Eli. Et voici Aelys."
" Je suis navrée de ce qui vient de t'arriver Isaïah McBird, sincèrement.", dans la voix de la jeune femme on ne décelait qu'une extrême sincérité.

Elle se leva et posa sa main sur l'épaule de l'autre jeune femme.

" Si tu n'as pas d'endroit où te cacher nous pouvons t'en fournir un mais sache que désormais, tant que Blake sera en place, il vaudra mieux éviter de te montrer en public."

Où avait-elle atterri ? La jeune femme n’eut même pas le temps de prendre ses marques pour essayer de se repérer que des mains se posèrent sur ses épaules, la faisant sursauter et pousser un petit cri de surprise avant qu’elle ne se retourne vivement vers celui qui la prenait par derrière. Il n’avait pas l’air de lui vouloir du mal, mais elle fronça tout de même les sourcils sur ses yeux couleur glacier, avant de se détendre devant son sourire jovial et l’ambiance chaleureuse communicative qui régnait autour d’eux. Tournant sur elle-même, Isaïah regarda où elle se trouvait, sans pouvoir déterminer où elle était. A nouveau, elle fronça les sourcils à cette idée. Sa seule certitude, c’était qu’elle n’était pas dans le District E. Tout ça avait l’air trop… Elle n’aurait su dire trop quoi, mais une chose était sûre, ça l’était. " Est-ce que ça va? Pas trop de casse?" Ces quelques mots eurent la bonne idée de lui rappeler sa main et elle baissa les yeux vers le doigt à l’ongle retourné, à moitié arraché. « Juste un peu de casse, mais ça ira… » dit-elle en levant la main ensanglantée.

" Je m'appelle Eli. Et voici Aelys." Elle tourna vivement la tête vers la jeune femme blonde dont elle avait croisé le regard. Aelys ? Aelys McNamara ? La seule, l’unique Aelys McNamara ? C’était ce petit bout de femme ? Il lui semblait bien que son visage lui était familier, mais elle l’aurait imaginée plus… Plus… Grande ? Ouais. Plus… Marquée par son combat ? Le visage strié de cicatrices ? Aussi, oui… Plus… Musclée ? Définitivement, oui. Pour un peu, on aurait pu voir, comme dans les films d’animation de Tex Avery, le menton de la métamorphe tomber littéralement au sol tant elle avait du mal à en revenir. Se rendant toutefois compte de la façon dont elle dévisageait la chef des Rebelles, elle se reprit rapidement et se présenta à son tour. « Isaïah McBird. » " Je suis navrée de ce qui vient de t'arriver Isaïah McBird, sincèrement."

Isaïah haussa les épaules. Ici, elle savait qu’elle pouvait être honnête. Elle répondit donc : « C’est ce qui arrive lorsque l’on ne supporte pas de voir un enfant injustement… » Sa voix se brisa, pourtant, elle se força à reprendre : « attaqué et vidé de son sang. La justice est morte… Il ne fait pas bon être quelqu’un de bien par les temps qui courent. » Elle secoua la tête, tristement, une larme roulant sur sa joue sans même qu’elle ne s’en rende compte à l’évocation de l’enfant qui était mort dans ses bras. " Si tu n'as pas d'endroit où te cacher nous pouvons t'en fournir un mais sache que désormais, tant que Blake sera en place, il vaudra mieux éviter de te montrer en public." « Je… J’ai un endroit ! » s’exclama-t-elle « Je suis étudiante à Ealdwic ! Je vis avec une amie ! » Qu’était entrain de sous-entendre la jeune femme ? Qu’elle n’allait plus pouvoir mener une vie normale ? A cette pensée, son cœur s’emballa. Elle allait devoir tricher ? Se faire passer pour une autre ? Car elle avait toujours moyen d’utiliser son don pour se mêler aux autres. Mais le voulait-elle ?

Eli et Aelys se regardèrent, amusés par l'expression de surprise de la jeune femme. Finalement c'est Aelys qui rompit le silence en éclatant de rire. Un rire de celte, éclatant et lumineux comme un rayon de soleil. Un rire que les circonstances et la culture moderne ne pouvaient pas comprendre, du moins pas tout à fait. C'était comme si cette étrange elfette tout droit débarquée d'un autre monde ne pouvait être marquée par les vicissitudes de cette existence parmi les sorciers. Décidément, Aelys McNamara surprenait toujours.

« Je… J’ai un endroit ! Je suis étudiante à Ealdwic ! Je vis avec une amie ! »
« Ealdwic est de notre côté mais la doyenne ne peut pas prendre le risque de filtrer les entrées. Ce serait signer son arrêt de mort devant le ministère et ce n'est pas dans l'intérêt de Una de se retrouver encore un peu plus enclavée... », Una de Shalott, la doyenne de l'université bien sûr...« Si les pro Blake te voient à l'Université alors qu'il y a une procédure de confinement sur ta tête, j'ai bien peur que tous les efforts de l'Ordre ne puisse te tirer de leur griffe. Désormais Isaïah, il faut que tu en aies conscience, tu es sur la liste des personnes les moins enviables de cette société... »
« Il y a des rafles tous les matins après le couvre-feu. Si un sang pur te dénonce ou qu'un détraqueur te repère pour toi c'est la mort. », compléta Eli, le plus sérieusement du monde.
« En gros ton statut légal en Grande-Bretagne vient de passé de "indésirable" à "tirez-moi dessus" mais je te rassure, ici dans l'ordre c'est pas ça qui nous empêche de vivre. »

Aelys eut un sourire, comme s'il pouvait y avoir quoique ce soit de réjouissant dans ce qu'ils venaient d'expliquer. A ses yeux c'était sûr, rien de tout cela ne devait provoquer l'abattement mais plutôt réveiller la flamme. Eli lui, plus rationnel, moins celte surtout, s'attendait à un peu plus de difficultés.

« On te fournira une autre identité pour Ealdwic et quelqu'un passera de temps à autre au Disctrict avec ton apparence histoire de faire acte de prés- »

Eli s'interrompit en entendant une porte claquer. Il fronça les sourcils et s'excusa auprès des deux jeunes femmes avant de presser le pas et de disparaître dans le couloir.

« L'ordre est un peu... débordé ces temps-ci. », expliqua Aelys McNamara sans en dire plus.

Pourtant l'agitation à côté suggérait qu'il y avait beaucoup plus à en dire mais Isaïah était-elle prête pour ça? En avait-elle les épaules?

« Ealdwic est de notre côté mais la doyenne ne peut pas prendre le risque de filtrer les entrées. Ce serait signer son arrêt de mort devant le ministère et ce n'est pas dans l'intérêt de Una de se retrouver encore un peu plus enclavée... Si les pro Blake te voient à l'Université alors qu'il y a une procédure de confinement sur ta tête, j'ai bien peur que tous les efforts de l'Ordre ne puisse te tirer de leur griffe. Désormais Isaïah, il faut que tu en aies conscience, tu es sur la liste des personnes les moins enviables de cette société... » « Il y a des rafles tous les matins après le couvre-feu. Si un sang pur te dénonce ou qu'un détraqueur te repère pour toi c'est la mort. » « En gros ton statut légal en Grande-Bretagne vient de passé de "indésirable" à "tirez-moi dessus" mais je te rassure, ici dans l'ordre c'est pas ça qui nous empêche de vivre. »Etait-il possible de blêmir plus encore que ce qu’elle avait déjà fait ? Isa’ fut prise d’un vertige, la poussant à trouver quelque chose auquel s’appuyer à défaut de s’asseoir. Mon Dieu… Elle savait que l’Angleterre avait changé, mais elle n’aurait jamais pensé que c’était à ce point. Où donc était passée son insouciance ? Les choses pouvaient-elle être pire encore que ça ? Oui, et elle ne savait pas encore à quel point.

« On te fournira une autre identité pour Ealdwic et quelqu'un passera de temps à autre au Disctrict avec ton apparence histoire de faire acte de prés- » Ce n’était pas possible… Elle faisait un cauchemar, ou quelque chose comme ça ! Devoir devenir quelqu’un d’autre ? Elle pouvait le faire, et facilement, encore, du fait qu’elle était métamorphe. Mais que quelqu’un d’autre devienne elle ? Pouvait-elle laisser quelqu’un d’autre courir ce risque ? Mais le jeune homme qui avait commencé à lui expliquer tout cela ne put même pas finir qu’une porte claqua, la faisant sursauter et sortir de son état second.

« L'ordre est un peu... débordé ces temps-ci. » Isa releva la tête vers Aelys. Celle qui était considérée comme un danger public semblait pourtant aussi inoffensive qu’un agneau venant de naître. Et elle lui inspirait confiance. Et eux, ces inconnus, proposaient de l’aider à mener une vie à peu près normale. Elle repensa à ce qu’il s’était passé quelques jours plus tôt, à la conférence. Elle repensa à tous ceux qui, comme elle, avaient eu à faire à des salopards. Pouvait-elle se contenter d’être une victime ? Dans les jours, les semaines à venir, elle le serait plus ou moins, mais pas à cause d’aujourd’hui. Depuis le temps que tu veux faire quelque chose, tu as enfin la chance de pouvoir le faire… se secoua-t-elle.

Elle se racla la gorge, avant de plonger son regard couleur glacier dans celui, limpide, d’Aelys. « Je ne peux pas laisser qui que ce soit risquer sa vie pour moi, sans faire quelque chose en retour. Je suis métamorphomage, et… Et je veux vous aider. Je supporte pas ce qu’il se passe là dehors. La mort de cet enfant, dans mes bras à cause d’un Mangemort… J’ai voulu le tuer. J’ai voulu venger l’enfant. Je sais que l’Ordre œuvre pour le bien. Je voudrais en être. » Et c’était bien là sa seule certitude…

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