CHAPITRE 1. "PEDALE DE MERDE"« Parce que c'est la première chose qui m'est venue.
- Oui mais ce n'est quand même pas anodin
pédale de merde.
- Parce que vous vous vous préparezun petit speech bien écrit que vous apprenez par coeur en prévision du jour où vous pourriez vous accrocher avec quelqu'un? Ben moi pas. Je vous l'ai dit c'est juste la première chose qui m'est venue. Ca ne justifie pas un rendez-vous ici par semaine à mes yeux mais soit. »
Silence« Mhmh. Votre oncle est homosexuel.
- Je ne vois pas le rapport.
-
pédale de merde peut-être?
- Mon oncle n'est pas une
pédale de merde.
- Avouez que c'est troublant.
- Si vous le dites.
- Ça a bien dû vous venir de quelque part. On ne jette pas des insultes homophobes sans raison. Ce serait une première.
- Eh bien dites que c'est une première.
- Mettez-y un peu du votre mademoiselle Scylence. Vous reconnaîtrez que ça ne vous ressemble pas. Quand on regarde votre dossier scolaire, pas un seul incident de parcours. De bonnes notes. Faible participation à l'oral mais tout de même... et tout d'un coup vous passez de l'élève discrète à ça?
- Vous me brossez quoi là Docteur? Je ne sais pas si vous êtes au courant mais la sociopathie c'est rarement héréditaire et ça pousse pas non plus comme un champignon au milieu de l'adolescence. »
Silence à nouveau. Le Docteur Godwin observe Sunshine Scylence assise en vis-à-vis de lui.« Vous vous entendez bien avec votre oncle?
- Je m'entends très bien avec mon oncle.
- Et avec son concubin? Monsieur Campbell c'est ça?
- C'est ça. ...
- ...
- ...
- Alors?
- Alors quoi?
- Vous éludez la question.
- Je n'élude rien du tout. Je m'entends bien avec mon oncle. je m'entends bien avec son concubin. Je n'ai pas de problème avec les homosexuels...
- Mais vous n'aimez pas les psy...
- Parce que vous les aimez vous? Tsss.
- De l'humour.
- S'il faut.
- Vous avez quel type de relation avec les Whiteley?
- Qu'est-ce que ça ... oh. Encore les homosexuels. Je vous ai dit que je n'avais rien contre les homosexuels.
- Mhmh. Admettons que je vous pose la question dans un tout autre contexte -
- Oui mais vous la posez dans celui-ci.
- Comment vous entendez vous avec les Whiteley? »
Silence. Sunshine Scylence darde le psychologue de l'école de ses deux prunelles bleu assassin.« Némaniah est mon frère. Je l'aime tout autant que j'aime Isaïe. Ses deux pères sont des mecs sympa qui m'offrent toujours un cadeau pour mon anniversaire et pour Noël et chez qui j'ai beaucoup de plaisir à aller. Voilà. Comment on dit déjà? Le ciel est bleu, l'herbe est verte, Spectre c'est chouette.
- C'est curieux cette manière que vous avez de dire
mon frère. Quand on n'y regarde bien vous n'avez aucun lien de sang et vous n'avez même pas été élevés ensemble quant à Isaïe, demi-frère serait plus juste.
- Si vous aimiez une femme et qu'elle avait déjà un gamin ce serait quoi? Votre moitié de gamin ou votre gamin? Vous prenez vraiment des raccourcis à la con Docteur Godwin
- ...
raccourcis à la con... mhmh.
- Oui c'est vulgaire. Il paraît que ça ne me ressemble pas.
- Vous n'aimez pas qu'on vous catégorise n'est-ce pas?
- Je n'aime pas qu'on me réduise. C'est très différent.
- Qui vous réduit?
- Personne justement.
- Vous vous sentez menacée?
- Pourquoi je devrais?
- Ne soyez pas pédante.
- Par qui je devrais me sentir menacée...
- Je ne sais pas. Ce n'est pas évident à votre âge d'avoir un lien de parenté avec la Directrice et avec le Ministre de la magie.
- Et avec trois grands criminels de l'histoire de la Grande Bretagne. Non mais vous pouvez le dire je vous traiterai pas de
pédale de merde.
- Pourquoi luttez-vous contre moi? Je vois bien que ça vous agace ce rendez-vous mais vous êtes une fille intelligente... vous ne croyez pas qu'on aurez déjà terminé si vous ne vous braquiez pas?
- Je ne me braque pas. Vous posez les questions. Je réponds. Si je ne cadre pas avec votre grille de réponses prévues ce n'est pas de ma faute. Et puis... finir vite pour remettre ça la semaine prochaine, de toute manière vous ne pouvez pas me lâcher après 15h donc tout va bien.
- En effet. »
Le Docteur Godwin ramasse le stylo qu'il vient de faire tomber. Ca ne fait rien que dix minutes qu'il a commencé à le faire tourner autour de son pouce. Quelque part, il y a comme une petite prouesse là dedans.« Tout à l'heure vous me parliez de sociopathie...
- Vous savez très bien pourquoi je dis ça.
- Oui mais ce qui est amusant c'est que moi je n'avais rien insinué. Je sais parfaitement que vous n'êtes pas une sociopathe.
- Ca ne vous empêche pas de me faire assoir ici pour une malheureuse petite insulte. Vous ne faites pas ça avec tous les élèves je me trompe.
- Vous ne vous trompez pas. »
Silence.« Et qu'est-ce qui a valu à Hurley ce
pédale de merde.- Il avait insulté mes parents.
- Ah! vos parents...
- Ah mes parents. »
Le Dr Godwin griffonne une note pour lui même qu'il relira plus tard. Le bruit de la plume sur le parchemin donne l’impression d'un ongle qui gratte une croute pour voir si ça saigne. Sans vouloir y prêter attention, on n'entend vraiment plus que ça dans le petit bureau du psy. « Vous voulez bien me parlez de votre vie chez vos parents. Vous vous en souvenez bien?
- Je n'ai pas très envie de parler de ça.
- Ça se passait mal?
- Ça se passait très bien. Mais j'ai pas envie d'en parler.
- Vous n'en parlez jamais à personne?
- Pourquoi faire? Vous parlez des pâtés que vous faisiez dans le bac à sable vous? Non. Ben voilà.
- Je ne cherche pas à vous faire revivre des choses désagréables.
- Je n'ai jamais dit que c'était désagréable. On était une famille.
- Quel genre de famille?
- Normale. Enfin je crois. C'est un peu con comme mot
normal quand on parle de singularité.
- ... vos deux parents étaient présents?
- Oui très.
- Votre père aussi?
- Tant qu'il l'a pu oui.
- C'est quelqu'un d'important pour vous n'est-ce pas?
- Mh.
- Vous vous fiiez à son jugement.
- Le plus souvent oui. Mais sur certaines choses non. Mon père avait pas mal de... phobies disons.
- Qu'est-ce qu'il pensait de votre oncle et de son couple? Vous pensez que c'était une famille qu'il aurait pu envisager pour vous.
- Je pense que ni mon père ni ma mère n'avaient envisagé ce qui s'est vraiment passé ensuite. Vous voulez que je vous dise ce que mon père pensait des homosexuels? Que c'était des pédales de merde mais ça ne l'empêchait pas d'apprécier oncle Zachk, parce que c'était son frère même s'il nous offrait des peluches débiles et même si dire ça c'est s'avancer un peu quand on parle d'un sociopathe. C'était mon père et je me fiche de savoir pourquoi ou comment, à travers quoi, mais je sais qu'il nous aimait, en tant que famille. »
Silence.« Des peluches débiles?
- Sérieusement?
- Oui.
- Un renard. »