Des minutes, des heures... des nuits... Autant de temps passé à rêver de lui sans comprendre, à se réveiller, le corps en sueur et les tempes battantes au rythme d'un désir qui ne trouvait pas d'assouvissement. Avalon tentait de résister au sommeil mais elle en arrivait à rêver éveillée. La fatigue pouvait se voir désormais sur son visage mais cela ne l'empêchait pas d'effectuer son travail... avec quelques périodes d'absence plus ou moins longues. Ce jour-là n'échappa pas à ce qui était devenu la règle. La jeune femme avait eut l'impression d'être en présence de Xzander plusieurs fois, à tel point que le chef de service la renvoya chez elle non sans l'avoir vertemment tancé.

Compatissante, l'une des collègues d'Avalon vint la voir dans le vestiaire pour parler. Elle trouva la jeune femme assise et prostrée, des larmes roulants sur ses joues encore plus pâles qu'à l'ordinaire. Avec une infinie patience, la rousse amena l'aveugle à se confier. En dissimulant les détails les plus gênants, Avalon murmura ce qui hantait ses nuits. La rousse sourit, évitant de rire pour ne pas blesser la jeune femme qui prenait apparemment cela tellement au sérieux! Avec un rire dans la voix, elle avoua qu'elle connaissait de nom celui qu'Avalon cherchait. La jeune femme se redressa ausstiôt tandis que sa collègue lui disait où et comment aller à l'endroit où elle l'avait croisé.

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Il ne fallu pas longtemps à l'Alchimiste pour rejoindre le chemin de Traverse. Elle erra durant de longues minutes à chercher l'allée des Embrumes et finalement, elle la trouva tout à fait par hasard et suivit son intuition pour achever son chemin. Son bâton planté entre ses mains, elle le serra jusqu'à ce que ses jointures blanchissent, hésitant ouvertement entre franchir la distance qui la séparait de la porte d'entrée du Knock Knock. Elle n'aimait pas courrir après les gens mais elle voulait comprendre pourquoi elle rêvait de lui. En pensant à cela, elle frissonna et ferma les yeux à demi. Il fallait qu'elle se décide... et vite.

Si elle ne cessait de rêver de lui, Gavril n'arrivait à se détacher de son odeur, de son parfum qu'elle avait dégagé toute cette soirée qu'il avait passé près d'elle. Toute une soirée, qui n'avait duré, en sommes et pour toutes, une bonne petite heure, voir deux. Le démon n'avait de cesse de penser à tout un tas de choses à ses côtés. Et le fait de lui faire l'amour en faisait largement partit. Passant des nuits à s'occuper, plutôt qu'à dormir pour le bien de son réceptacle, Gavril en était devenu silencieux, ne recevant plus beaucoup à la boutique. Et lorsque Narek lui en fit la remarque, et qu'ils en discutèrent, ils surent qu'ils étaient temps. Si les choses avaient été faites par Narek, rien de tout cela ne serait arrivé. Mais cet espèce d'amour qui le liait à son jeune fils était fort, étant donné ces nombreuses années, décennies, centaines voir millier qu'ils avaient passé quasiment ensemble, à défendre une cause, une seule qui leur avait tenu particulièrement à cœur. Les voilà maintenant obliger de rebrousser chemin à cause d'un échec cuisant. Les créatures, les enfants de Dieu n'avaient pas leur comparable. Et même si de par le passé, les démons s'étaient vantés de leur stupidité, de leur vanité, et de la façon dont on pouvait si aisément les corrompre avec un peu de pouvoir, Narek et Gavril pouvaient désormais penser autres choses. Des choses qui plus d'une fois, lorsqu'ils croisèrent leur regard, leurs faisaient trembler l'échine.

Car malgré tous ses défauts, rien n'est plus beau que sous la vision d'un humain. Tant que l'on a pas vécut une vie, ou un extrait, un passage, un morceau de vie selon leur point de vue, on ne peut s'en apercevoir.

Ce qu'ils trouvaient beaux, ce qu'ils aimaient auparavant, avaient un tant soit peu changer. Et par désir de se convaincre du contraire, Narek avait élaboré une théorie concernant les désirs inassouvies d'un hôte depuis trop longtemps utilisé. Peut-être du vrai là dedans... Mais pour des démons, des esprits et ou des anges débutants. Pas à leur niveau. Gavril n'avait de cesse de penser à cette dernière, et lorsque le ressentit était trop puissant, et qu'il sentait la virilité de son hôte vouloir prendre le dessus, c'était à grand coup d'eaux sous la douche, qu'il tentait de calmer un corps qui n'était pas le sien. Il fermait les yeux, il avait l'impression de ressentir chaque caresse, son souffle sur son visage, sur son cou. Son odeur l'enivrait, il avait l'impression qu'il allait la croiser à chaque coin de rues de Londres, de Pré-au-Lard, et même de St. Saint-Pétersbourg lorsqu'il s'y rendit. Trop de choses, elle en devenait une obsession. Et les obsessions virent aisément au cauchemar lorsque l'on s'en rend pas compte. D'autant plus, lorsque l'on est un démon à la base. Car quoiqu'il arrive, il commençait à comprendre : « L'amour est le pouvoir le plus puissant, et le plus dévastateur. » Une chose que l'on ne peut comprendre lorsque l'on a passé plus d'un millénaire dans le monde d'en dessous.

Mais cette fois, il le savait. Elle était là. Et lorsqu'il était entrain de finir le carnet qu'il devrait laisser à la famille de son hôte, Gavril redressa la tête, posant la plume dans son encrier (au risque de saccager la plume), se levant plus vite qu'il ne l'aurait pensé. Ses pas se firent rapide, il aurait pu manger des kilomètres. Son pression artérielle augmenta sensiblement, tandis qu'il ouvrait la porte du Knock, Knock et qu'il l'aperçut dans la rue, devant la boutique. Il en ferma les yeux de plaisir, laissant l'odeur d'Avalon venir à lui. Un sourire apaisé, malgré lui, vint se dessiner sur ses lèvres. Et avant qu'il n'eut l'idée de quoique ce soit, son corps s'était matérialisé devant Avalon.

« Alors comme ça, tu m'as retrouvé... Avalon. »

Un sourire, il ne peut s'empêcher de l'enlacer dans ses bras. Son esprit hurle, son esprit rage... Il est faible, il devient faible. Mais il s'en fout, il avait besoin de cela. La façon dont il était partit la dernière fois avait été trop momentané pour... Pour.

« Entrons. Tu n'es pas en sécurité au dehors. »

Elle était sur le point de se décider à partir, se maudissant pour avoir eut une telle initiative. Frémissante tant de froid que de fatigue et d'envie, elle cherchait en elle la force d'abandonner la partie. Sa raison lui hurlait de le faire, de rentrer chez elle et de boire une potion sans rêve pour espérer avoir enfin un nuit de sommeil tranquille. Son coeur et son corps, eux, voulaient qu'elle franchisse la distance qui la séparait de la porte... Porte qui s'ouvrit et le mouvement d'air lui apporta l'odeur qu'elle cherchait. Elle trésaillit d'un plaisir inattendu, son visage se détendit, un sourire apparu sans qu'elle ne s'en appercoive.

« Alors comme ça, tu m'as retrouvé... Avalon. »

Elle n'eut pas le temps de réponse qu'il l'enlaça. Elle prit le temps de respirer son odeur qui lui a tant manqué puis, elle glissa à son oreille.

« On a finit par avoir pitié de moi... J'espère que je ne te dérange pas... »

Elle se décala suffisamment pour faire voler ses doigts jusqu'à son visage qu'elle effleura avec douceur. Il souriait. Elle se souvenait parfaitement de son sourire quand il lui avait permit de le voir comme il était réellement. Blottie contre lui, elle se réchauffait lentement.

« Entrons. Tu n'es pas en sécurité au dehors. »

Pourquoi disait-il cela? Elle fit taire la question qui lui brûla les lèvres et le suivit à l'intérieur. Une fois en sécurité, elle fut assaillie par une symphonie d'odeurs et de bruits à la fois étranges et familiers. Elle se décala pour se presser contre lui, le laissant la guider là où il le voulait.

« Tu étais occupé? »

« Non... Non, bien sûr que tu ne me déranges pas. Entrons. Tu n'es pas en sécurité, au dehors. »

Il la serra contre lui, conservant l'étreinte bien cinq minutes. Lorsqu'il la lâcha, il se trouvait dans le salon de la boutique, la porte d'entrée se fermant violemment. Gavril eut un léger sourire, tandis qu'il s'éloignait délicatement d'elle pour ranger une dague aux gravures étranges et dégageant une aura malfaisante. La posant dans un carton, qu'il posa sur la grande table salle à manger, Gavril fit attention à ne pas piétiner les livres de son père que ce dernier avait foutu par terre lorsqu'il avait fait le tri de ce dont il comptait garder, ou jeter. Dans la pièce, mais également dans toute la maison, il y régnait un bordel sans nom. Le départ semblait imminent. Mais on avait plus cette impression de fuites précipités, suivi d'une fouille barbare faites par des chasseurs, ou encore des aurors, voir des brigadiers.

« Tu étais occupé ? »

Gavril leva la tête, souriant doucement. Son regard se perdit dans les traits du visage de la jolie russe, avant qu'il ne réponde, bien cinq minutes après.

« Oui. Nous n'avons plus rien à faire, ici. »

Ici. Gavril parlait, bien entendu, de la Terre. Repartir pour l'Enfer semblait être devenu le seul objectif des Hatelji. Néanmoins, cela ne les empêchait pas de prendre leur temps, histoire de partir sans rien oublier derrière eux de compromettant à leur encontre, comme à celle de leur hôte. Narek était d'ailleurs, partit dans les derniers lieux où ils s'étaient installés avant de venir sur Londres, pour tout brûler dans des flammes d'un noir de jais, destiné à détruire toute trace, toute cellule humaine qu'ils auraient pu laisser derrière eux. Derrière chaque endroit brûlée, on aurait presque pu entendre la terre poussait des gémissements de douleur.

« Crois-tu donc, que je me saurais amusé à m'effacer de ta mémoire sans aucune raison, Avalon ? »

Un léger sourire sur son visage, il continuait de faire son tri, jetant des parchemins dans les flammes noirs de la cheminée.

Ah son odeur... Elle aurait pu en faire un parfum pour s'y noyer avec délices. Et son étreinte...? Elle n'osait même pas y songer. Elle qui avait promis de ne plus devenir accro à quelqu'un, elle avait lamentablement échoué... Pire que tout, c'était un démon... Pas n'importe lequel si elle avait bien comprit... Elle sursauta quand la porte se referma derrière eux. Pénétrant dans un environnement nouveau, elle sentit de l'apréhension grimper le long de son échine jusqu'à faire accélérer les battements de son coeur... déjà rapide avec la proximité de Xzander. C'était toujours ainsi quand elle ne connaissait pas les lieux. Elle avait une méthode bien à elle pour les découvrir mais elle n'était pas sûre que cela plaise à l'homme qui s'était déjà éloigné d'elle.
Avalon l'entendit bouger avec prudence, comme si des choses le gênaient pour avancer. Ce qui la poussa à ne pas bouger de sa place. D'une voix qu'elle voulait assurée, elle lui demanda s'il était occupé. La réponse qu'il lui fit la cloua sur place, les lèvres entrouvertes. Elle n'avait pu retenir une exclamation surprise, presque douloureuse. Ses joues se colorèrent de rose, elle baissa le visage pour dissimuler son trouble. Etrangement, elle se sentit mal, comme déchirée à l'annonce de cette nouvelle. Elle frissonna.

« Crois-tu donc, que je me saurais amusé à m'effacer de ta mémoire sans aucune raison, Avalon ? »

Elle releva la tête aussitôt, un sourcil haussé. Elle mit quelques instants à comprendre. Il venait de lui jeter cette bombe au visage et continuait son ménage comme si ne rien n'était. Avalon se râcla la gorge et sa voix fut claire quand elle brisa le silence.

« Je ne sais pas ce que tu as fait mais il semble que tu t'es lamentablement raté. Parce que non seulement je ne t'ai pas oublié mais en plus je ne fais que penser à toi et je rêve de toi... »

Ses joues s'enflammèrent à l'évocation de ses rêves. Elle passa une main sur sa nuque, comme pour se donner une contenance.

« C'est pour cela que je suis là. Pour que tu m'expliques... Mais visiblement, tout est dit. »

Son visage s'était fermé et pourtant, il était clair que pronnoncer sa dernière phrase lui avait mit le coeur à vif. Elle secoua doucement la tête et leva une main pour se guider jusqu'à la sortie.

Visiblement, il l'avait blessé, et instinctivement, il ne put s'empêcher de se mordre la lèvre, avant de disparaître dans un panache de fumé, pour réapparaître juste devant elle. Gavril posa ses mains sur les bras de la russe, lui faisant comprendre qu'elle n'avait pas à partir, et que si elle le souhaitait, il lui donnerait les explications. Mais il fallait bien qu'elle comprenne, que c'était pour son bien à elle. Du moins... Principalement. Il ne souhaitait pas du tout s'étendre sur le sujet concernant son hôte, car il aurait de toute bonne raison de la laisser partir. Pourtant...

Il ferma les yeux, se refusant de regarder son visage trop longtemps. Gavril l'amena doucement vers un fauteuil pour le moins confortable, balayant du regard tous les bouquins et autres affaires en direction du mur, par le simple fait de son regard. Gavril se recula quelques instants, s'agenouillant devant elle, tandis qu'il lui prenait doucement les mains.

« Hm... Ce n'est pas réellement ce que tu crois... Je me devais de le faire pour mon hôte, et surtout, pour éviter que tu souffres. Nous sommes des Démons. Le fait de s'être embrassé t'as lié à moins d'une manière... Que je ne saurais réellement définir. »

Gavril leva une de ses mains à la hauteur de la joue d'Avalon qu'il effleura avec une certaine tendresse.

« Mais visiblement, je l'ai raté... Et je t'ai fais, te fais souffrir. »

Il la lâcha, et se leva avec délicatesse, se reculant doucement pour s'asseoir en face d'elle, la contemplant tout en sachant très bien, que c'était la dernière fois qu'il la verrait.

Elle était réellement prête à partir malgré la déchirure et la souffrance qu'elle engendrait. La main tendue en espérant trouver la porte pour s'enfuir, elle cherchait son chemin dans cet endroit inconnu. Elle avait une technique bien à elle pour parvenir à apréhender un lieu... mais elle se refusait de le faire, question de dignité toute féminine. Elle perçu la disparition de Xzander et sursauta à peine quand il réapparu devant elle et posa sa main sur son bras. Sa peau se hérissa et ferma à demi les paupières, comprennant ce qu'il cherchait à lui faire comprendre. Cela ne voulait pas dire qu'elle l'acceptait. Il y avait longtemps qu'elle n'avait plus eut envie de lutter pour quelque chose. Et la paume de Xzander lui donnait cette envie. Avalon soupira doucement puis accepta de se laisser entraîner jusqu'à un fauteuil dans lequel elle prit place avant de remettre en ordre les plis de sa robe, plus pour se donner une contenance qu'autre chose.

Ses mains furent englobées par celles de son compagnon. Elle leva les yeux vers lui et l'écouta lui parler sans qu'aucune émotion ne fasse frémir le masque de son visage serein. Eviter qu'elle souffre... Elle haussa à demi les épaules. Il n'était pas le premier à imprimer une blessure à son coeur mais serait probablement le dernier. Elle avait cru et s'était encore trompée et ne se donnerait plus une chance. Il posa une main sur sa joue, elle sourit avec chaleur, pressant son visage contre sa paume tel un chat réclamant sa caresse.

« Mais visiblement, je l'ai raté... Et je t'ai fais, te fais souffrir. »

Elle entrouvrit les lèvres pour répondre mais ses mots mourrurent quand il se leva et s'éloigna. Elle eut soudain froid et mit quelques instants pour réaliser qu'elle devait répondre.

« Oui... A croire que le lien qui nous unit est bien plus puissant que tu ne l'as imaginé... »

Sa voix était pensive, le reste de ses idées étaient en suspend. Elle s'enfonça un peu plus dans son fauteuil et murmura doucement.

« Je pourrais te décrire à la perfection tout ce qui s'est déroulé depuis des jours, Xzander... Mais tu le sais, n'est-ce-pas? »

Elle lui sourit de nouveau puis se leva et, en quelques pas, franchit la distance qui la séparait de lui. A son tour, elle s'agenouilla devant lui, posant ses doigts sur le haut de ses genoux pour garder un semblant d'équilibre. Elle n'eut pas l'audace d'aller chercher ses doigts malgré l'envie de frôler plus que son visage cette fois-ci.

« Tiens-tu réellement à me faire tout oublier, Xzander? »

Les mots résonnèrent longtemps dans sa tête, mais il ne se pressa pas pour lui répondre. Il n'en avait pas vraiment envie, d'autant plus qu'il ne savait quoi répondre. Dans un des cas, il passait pour un connard aux yeux d'Avalon, la poussant à se fermer vers le bonheur, qui un jour, frapperait sûrement à sa porte, lui apportant ce qu'elle attendait réellement d'un homme, mais d'un autre côté, il était persuadé d'agir par égoïsme. Et ce, sur plusieurs plans. Notamment le fait de vouloir à tout prix qu'elle l'oublie, mais aussi pour qu'elle ne pense plus à lui. Vous allez me dire... Mais qu'est ce qui a d'égoïste là dedans ? Et bien, c'est qu'Avalon ne souhaitait visiblement pas que les choses se passent ainsi. Et après quelques inspirations longues, il finit par briser le silence.

« J'aimerais que tu ne souffres pas d'avantage... Je ne suis pas l'homme qu'il te faut. »

Il se tut, baissant le regard. Ses yeux lui piquaient à mort. Comme si...

« Mon emprunte disparaîtra. Lorsque je repartirais, les jours seront plus durs que jamais au début, puis tu continueras ta vie, mais avec un petit arrière goût amer. Et ça, je ne le veux pas. J'ai... »

Gavril se passa une main sur le visage, avant de relever le regard, larmoyant. Il préférait ne pas poser son regard sur le visage de la russe, de peur de craquer, ou de quoique ce soit d'autre. Ce n'était guère le moment. Il fallait la convaincre, que ce qu'il avait fait, il l'avait fait pour son bien. Mais au plus la conversation avançait, plus il avait l'impression de tenter de se convaincre en même temps. Une étrange sensation s'était emparée de son corps, tandis que ses pensées et ses émotions lui broyaient coeur, ventre, et tête.

« J'aimerais tellement te donner mes yeux pour que tu puisses voir le monde comme je le vois désormais... Il y a beaucoup à faire, mais c'est ce qui le rend si attirant... Vous êtes les créatures préférés de Dieu. Et je commence à comprendre pourquoi... »

Gavril finit sa phrase dans un murmure à peine audible tandis qu'il laissait tomber sa tête entre ses mains.

Pas de réponse... Devait-elle en déduire qu'il n'y avait plus rien à dire à ce sujet? Probablement pas... Intuitivement, elle saisissait que de tous les deux, c'était lui qui avait le plus de mal, lui pour quoi c'était réellement nouveau. Avalon avait eut des expériences et n'avait donné son coeur réellement qu'une fois... il y avait longtemps. Un frisson remonta le long de sa colonne quand elle se rémémora le visage de son premier... amour? amant? Quel nom devait-elle désormais lui donner? Elle n'en savait rien et secoua doucement la tête pour chasser ces idées agaçantes et réellement déprimantes.
Elle ne se releva pas malgré le temps qu'il était nécessaire à son compagnon pour répondre. Elle patientait avec une certaine tranquilité qui dissimulait à la perfection sa propre nervosité. Et enfin, il lui répondit, la surprenant au-delà de son imagination. La flamme de la colère vint durcrir ses traits avant de disparaître rapidement. De quel droit décidait-il de ce qu'il lui fallait. Une seule fois on l'avait décidé pour elle, elle avait perdu son jumeau. Elle trésaillit mais ne dit rien, souriant de nouveau comme si tout allait bien. Or, rien allait, elle en avait conscience mais elle préférait le laisser continuer de parler.

Elle leva la main vers le visage de Xzander quand il passa la sienne dessus. Elle effleura sa joue, lu ses émotions plus aisément qu'elle ne les ressentait au même moment. Elle comprenait la nécessité qu'il avait de chercher à la convaincre et ne trouvait pas le courage de lui dire qu'il n'y parviendrait pas. Elle ne voulait pas perdre ses souvenirs, ne voulait pas insulter ce qui pouvait bien les lier. Il termina sa phrase et Avalon sentit son visage tomber entre ses mains. Elle demeura un moment silencieuse puis glissa ses doigts sous son menton pour lui faire relever la tête.
D'autorité, la jeune femme prit place sur les genoux de son compagnon afin de le serrer contre elle. Avec tendresse, elle murmura.

« Accepter que tu t'effaces de ma mémoire, c'est insulter ce qui nous lie. Oui, je vais souffrir, tu vas me manquer... Mais Xzander... Il n'y aura rien d'amer quand je penserais à toi. Pas un seul regret... »

Le poids du vécu était clairement perceptible dans sa voix. Elle avait aisément accepté l'idée qu'il allait partir, qu'ils n'allaient plus se revoir... Après tout, c'était une fin logique pour une histoire comme la leur. Pas de happy end, Avalon n'y avait jamais songé.

Il avait sentit sa main sous son menton lui levait le visage. Son regard croisa le regard invisible de la belle russe, tandis que cette dernière semblait lui parler, lui pardonner ce qu'il voulait faire, mais surtout, lui faire comprendre qu'il s'y prenait de la mauvaise façon avec elle. Il ne l'entendait pas vraiment, comme ci sa voix n'était qu'un arrière-son de la scène qui se déroulait en ce moment-même. En faites, à ce moment-précis, il voyait autre chose en Avalon. La promesse d'un avenir meilleure, la promesse que sa vie ne s'arrêterait pas à l'enfer. Et quelque chose ne cessait de lui tracassait l'esprit... Aucune vision de son futur, rien ne concernant celui de Narek. Pour la première fois de sa vie, il sentit les mains de Dieu sur son avenir. Il ne savait pas si il allait mourir, ou si il allait vivre, mais quoiqu'il en soit, l'épée de Damoclès, celle qui déciderait de son destin, est que trop présente. Et devoir quitter Avalon sans être réellement sûr de la revoir un jour, même par de-là une vision, ou par une fenêtre, le torturait. Peut-être parce qu'il savait ce qu'il ressentait maintenant.

Un amour particulier. Un amour dévorant. Un amour comme il n'avait jamais connu de son vivant, il y a très, très, très longtemps. Les années et les siècles qui le séparaient de sa vie d'antan étaient si nombreux... Gavril sentit une larme perlait et glissait le long de sa joue. Finalement, il se laissa aller. D'une brève pulsation de son pieds sur le sol, il se dressa vers le visage d'Avalon. Xzander effleura ses lèvres des siennes, avant de l'embrasser de la façon la plus sérieuse qui soit. Il agissait avec le coeur, avec ce qu'il pensait ne plus avoir.

Ses mains effleurant le corps d'Avalon, il ne devait cesser de l'embrasser que lorsque la fatigue le gagnerait, les gagneraient. Quand l'amour aurait été consommé de la plus belle façon qu'il soit. Il n'avait pas prit le temps de trouver sa chambre, de l'y mener par une simple pensée. Non, il ne le pouvait, car à cet instant, il ne pensait plus. Il n'y avait qu'une chose qui semblait compter, et il comptait le mener à bien. Sachant ce qu'il devait faire, ce qu'il fallait faire, Gavril épousa le corps d'Avalon.

Plus tard, peut-être le lendemain même, alors qu'Avalon se réveillerait, elle se trouvera seule. A côté d'elle, près des vêtements, il y aurait un collier en or avec un anneau légèrement travaillé fait d'or blanc. Un petit mot écrit avec tendresse, c'était ce que Gavril lui laissait pour qu'elle puisse penser à lui à travers le temps et les âges.

Elle ne savait pas s'il l'entendait réellement. Dans tous les cas, il ne résista pas quand elle lui fit lever le visage tout en continuant à lui parler. En cet instant, elle regrettait de ne pas voir car elle ne pouvait observer ce qui pouvait se voir dans ses prunelles qu'elle savait écarlates la plupart du temps. Cela ne l'empêchait pas de sentir la brûlure de son regard sur elle sans arriver à deviner ce à quoi il pouvait penser. Pourtant, elle ne l'interrogea pas, respectant son silence quand elle eut terminé de parler. Elle resta là, posée sur ses genoux, l'esprit emplis de questions qu'elle ne comptait pas poser. Une part d'elle profitait pleinement de ces derniers instants en compagnie de Xzander, les gravant dans sa mémoire de manière indélébile. Elle respirait son odeur, jouait doucement avec la peau fine de son cou pour se souvenir de sa douceur.

Et lui? Pas de réponse, pas de réaction. Elle le sentait inquiet puis soulagé pour une raison qui lui échappait totalement. Avalon ne se décida à réagir que quand elle sentit une larme rouler sur la joue de son compagnon. Elle la cueillit du bout des doigts et n'eut pas le temps de la porter à ses lèvres que Xzander en prenait possession. La jeune femme frémit, glissa ses mains sur sa nuque pour le rapprocher encore d'elle. Sans même réfléchir deux secondes, elle s'abandonna à lui, comme elle avait tant rêvé de le faire... Le temps s'arrêta de manière étrange pour l'aveugle dont le sommeil prit possession beaucoup plus tard.

La première chose qui la frappa quand elle commença à s'éveiller, fut qu'elle était seule. La chaleur de Xzander s'effaçait déjà de la couverture dont il l'avait couverte. Allongée sur le dos, les yeux clos, une seule larme roula sur sa joue pâle. Elle ne la chassa pas, la laissant sécher avant d'ouvrir les yeux et de se redresser. Au cours de son habillage, elle trouva le mot et les présents. Un large sourire dansa sur son visage alors qu'elle se parait des bijoux qu'il lui avait offert. Le mot fut déchiffré puis glissé dans une poche en attendant d'être rangé autre part. Immobile au centre de la pièce, elle mit quelques minutes pour se décider à bouger. D'un pas sûr, elle sortit, refermant la porte avec douceur.

Elle tournait une page de sa vie... Elle ne l'oublierait pas.