Ses pas remuèrent les galets du chemin qui mené aux marches de l'église du village. Suivant la foule, l'adolescent s'arrêtant néanmoins devant les marches, incapable d'avancer plus. Malgré la distance qui le séparait du porche, le garçon commençait à ressentir des malaises, si bien qu'il recula longtemps avant de retrouver son calme. Tremblant, il observa le ciel, puis le sol, et prit le chemin inverse pour retourner chez lui. Il avait trois heures avant que sa famille ne rentre, largement le temps de faire ses sacs et de laisser une note. Claquant la porte derrière lui, il grimpa les marches en bois qui craquèrent sous son poids. Ralentissant la cadence, il s'arrêta devant la porte de la chambre de sa petite soeur, caressa la plaque qui annonçait fièrement "Lenka" en lettre brillante qui remontait à sa petite enfance. Il trouvait ça ridicule pour une fille de seize ans d'avoir encore ce genre de truc sur sa porte. Sourire aux lèvres, il se recula précipitamment, une voix lui soufflant qu'il avait des choses à faire de la plus haute importance. Tirant sur les manches de son pull, il continua dans le corridor pour pousser une porte et entrer dans sa chambre. Observant la pièce, assez vide de décorations personnelles, il s'approcha du bureau, ouvrit le premier tiroir et sortit du papier blanc et sa trousse. Cherchant son stylo bleu préféré, il finit par le décapuchonner pour rédiger de son écriture maladroite et penchée.
« Pardonnez moi.
Vous avez tant fait, à commencer par continuer de m'aimer malgré la magie qui court dans mes veines. Je n'ai jamais vu l'éclair de la honte ou de la peur traverser votre regard et pour le respect et la tendresse que vous m'avez apporter, je ne vous remercierais jamais assez.
Mais mes fautes sont bien plus grave et je crois qu'avant de vous demander pardonner, et de Lui demander pardon, je dois me pardonner moi-même. J'ai commis un acte dont je paie le prix chaque jour que Dieu fait. Je me suis perdu sur le sentir de la raison et emprunté le mauvais chemin.
Malgré vos sermon, père, j'ai failli. Je me suis laissé tenter, je ne suis désormais qu'une âme pécheresse, à l'abandon qui n'a nulle lieu ou se repentir. Puisque les seuls lieux où je pourrais demander le pardon divin me sont interdits. Sans doute l'absence de mon âme m'interdit elle de présenter mon visage au Seigneur.
Je demande pardon pour ne pouvoir en dire plus, pour ne pouvoir me sauver mais je ne demande pas pardon pour mon geste. Il était tout réfléchi et c'est sans doute ça qui est le pire. Prenez soin de ma tendre petite soeur, mon âme est toute sienne ainsi que mon coeur.
Matthias. »
Il jugea de la qualité de la lettre, qu'il trouva médiocre, mais il n'avait jamais été bien doué pour exprimer ses sentiments, à l'oral comme à l'écrit. D'autant plus, qu'il avait bien trop peur de leur réaction si il détaillait plus le mal dont il était frappé. Du moins, le mal auquel il avait fait appel.
Tout ça pour Lenka. Seulement Lenka. Juste elle. Sa douce petite soeur pour laquelle il avait accepté de perdre ce qu'on considérait de plus important. Sa soeur avait été frappé d'une maladie dont on ignorait encore le nom, du moins les médecins n'avaient pas réussi à trouver ce qui causé ces températures, ces pertes de consciences et cette douleur. Suivant les consciences de ses parents, matthias avait prié, prié avec plus d'ardeur que d'ordinaire, jusqu'à ce qu'au début des vacances de sa quatrième année à Poudlard, il n'apprenne que sa soeur était à l'hôpital suite à une insuffisance respiratoire. C'était de l'avoir vu branché à cette machine qui l'avait le plus brisé. Il avait donc prit les devants. Si Dieu ne l'aidait pas, il en connaissait un autre qui le ferait. Il avait eu du mal, dans ses recherches, mais il avait finalement trouvé un moyen. Si il en avait su les conséquences, malheureusement, il l'aurait quand même refait. Parce que sa soeur était tout pour lui. Ça avait été facile, même trop facile.
Quand il avait rencontré cette sorcière, qu'on disait très douée en magie noire, il s'était attendu à une femme d'une laideur accablante, mais avait oublié les préjugés devant cette femme d'une beauté irréelle. Elle manipulait aussi bien la magie noire que la magie dite blanche. Elle l'effrayait et pourtant, elle l'envoûtait. Pauvre gamin, mais Matthias avait toujours été très mûr pour son âge. Il connaissait les risques du flirt avec la magie noire, et pourtant il y plongeait.
En essayant de se souvenir de l'enchaînement des événements, il se rendit compte qu'il ne lui restait que le réveil brutal, la sensation de ne plus être seul dans ce corps qui était pourtant sien. Il avait signé. Son âme lui avait été volé et les minutes suivantes, la nouvelle se propagea; Lenka était éveillée et avait l'air de recouvrer la santé.
En rangeant ses affaires, il jeta un oeil à la photo de sa table de chevet qui représentait ses parents et sa soeur, ainsi que lui. Entouré de ces visages joyeux, il se voyait plus horrible que jamais. Attrapant le cadre, il l'observa un moment et le reflet que lui renvoya le verre du cadre l'effraya tant qu'il lâcha l'objet qui se brisa au sol. Il lui sembla entendre une voix dans son crâne « Combien d'années de malheur pour ce verre brisé? ». il secoua sa chevelure brune, le coeur fendu.
Depuis qu'il y avait cette présence constante en lui, depuis qu'il avait accepté la présence de ce lutin mauvais, il n'était plus capable d'agir sainement, de penser correctement. Il avait finit par rejeter tous ses amis, de peur qu'il ne leur arrive malheur, puisque généralement, en sa présence il finissait toujours par ce produire un drame d'une gravité plus ou moins grande. C'était terrible que d'être condamné à errer en solitaire quand on était aussi entouré des autres à Poudlard.
Il avait tenu sous le toit familial jusqu'à maintenant, mais quand sa mère était tombée dans l'escalier, quelques jours plus tôt, simplement parce qu'elle avait haussé le ton envers son fils. Il n'était pas innocent dans la chute, il le savait, il se souvenait partiellement avoir marmonné quelque chose avant la chute.
Ces derniers temps, il arrivait à avoir un minimum de conscience quand l'autre prenait sa place. Cette âme salie par des péchés terribles, condamné à vivre avec. Chaque fois qu'on devenait trop proche de lui, il arrivait malheur. Cela pouvait aller d'une banal chute dans l'herbe à souvent bien plus grave mais le pire, c'était que matthias avait fini pas se faire une raison. « il ne manquerait plus que ça, que tu me regrettes. » lâcha la voix un brin trop aigu au creux de ses tympans. L'adolescent grimaça, secoua la tête et attrapa son sac pour quitter les lieux avant que ses parents ne reviennent. Il ne savait pas encore précisément où il irait quand les vacances de l'année scolaire arriverait, mais il ne pouvait plus rester ici, par sécurité. Il ferma la porte, observa un instant la maison et attrapa un bus pour le déposer près de la gare.