20h03. Londres. Mon appartement sur Mayfair Street. Tu dis qu'être en retard de trois minutes ce n'est pas être en retard. Foutaises. Tes lèvres ont le goût de l'opium. Tu me ferais croire n'importe quoi.

« Quand on est toujours en avance, trois minutes après l'heure prévue c'est déjà être sacrément en retard Amour. »

Rictus. Tendre. Vraiment. Quand je dis que tes baisers sont narcotiques. Y a-t-il un autre piège qui sache me faire oublié l'heure et le temps à la fois? Non. Un autre stratège qui sache me décider à rester prisonnier de mes propres draps plutôt qu'à me lever? Je ne suis pas allé travailler aujourd'hui. C'est si rare que quand mon hibou est arrivé, il a trouvé le Directeur de la Gazette qui s'était déplacé en personne. Le vieux fou. Pourquoi aurais-je lâché le meilleur des instruments de manipulation?
Bref. 20h05. C'EST! un retard.

« Si je ne reviens pas tout de suite c'est que c'était bien un retard. »

Moqueur. Je sais bien que tu préfères mille fois quand nous ne recevons pas mes ex à dîner. Tu n'es déjà pas une grande fana de la vie en société. Elle te plaît cinq minutes. Pour t'amuser. Ensuite... Mais Liz est différente. Ce n'est pas une ex. C'est une amie. Tu appelles ça un jouet. Curieusement. Si tu veux. Cela ne me dérange pas dans le fond. Pour une nuit elle l'a été et j'ai été le sien. Puis après tout, nous ne sommes pas à tenir les comptes. Tu me fais confiance. Je te fais confiance. Tu m'as déjà prévenue que Bridget ne fêterait pas Noël cette année. Joue Opium dangereuse. J'aime tes vapeurs suaves et les volutes voluptueuses de ton corps.
20h10. Mon blouson. Mes clés. Sans un regard. Je ne vérifie même pas. Je l'ai toujours sur moi ma baguette. Je transplane. Un crac sonore. La rue déserte. Mayfair Street tout de même. Si même le luxe ne fait pas sortir la majorité non-pensante de la ville, c'est bien parce que dehors c'est l'enfer. L'enfer. Un air sombre passe sur mon visage. Oui c'est l'enfer dehors.
J'entends crier. Fronce les sourcils. Voilà que je me retrouve dans une de ces scènes grotesques où je deviens le héros de quelqu'un. Du côté de Hyde Park. Il y a comme un bruit sourd dans l'air. Je transplane. Encore.

Les arbres sont de grandes griffes noirs. Il fait froid. La neige. Le vent. Les traces de pas désordonnées. Je n'y lis rien. Juste qu'il y a un enfant. C'est suffisant pour me faire penser que ce sont eux. Il y a alors un raffut terrible. J'entends la voix d'une femme. Un cri. La voix de Lizbeth. Audible. Reconnaissable. Des bruits de pas à nouveau. Des bruits de ramées froissées. Dans le prolongement de ma silhouette ma baguette. Toujours cet instrument de mort. Mais je suis attentif. La tête froide. J'entends à nouveau hurler mais une minuscule ombre se jète contre moi. Je le rattrape.

« Lukkas? Où est ta maman bonhomme? Et qu'est-ce que vous êtes venus faire ici. »

Vaguement. Sa petite voix terrorisée. Visiblement ils sont tombés sur des goules. Pas de celles que l'on domestique. Plutôt celles qui ont le goût de la chair humaine. L'enfant dans les bras. Je cours. Une clairière. Deux goules effectivement. Un sortilège. Une explosion. Quelque chose de ce genre. Et voilà que de torses inhumaines s'enfuient à travers les bois. Je m'approche. Tend une main secourable.

« Quelle idée d'avoir voulu prendre par le parc Liz... »

20h30. Hyde Park. L'endroit le plus pourri ou vous n'aimeriez pas traîner votre sale gueule en ce moment. Enfin je parle pour vous. Le coup classique. Elle me raconte l'histoire du gamin qui a vu un chat etc. Vous connaissez la suite. Moi aussi. Ridiculement banal. Ca ne me serait jamais arrivé. Autant dire que je vais revoir mes projets pour Liz. Tapons dans le modeste pour une fois.
Ce genre de chose j'en entends tous les jours. Je n'ai pas fait attention. C'est arrivé comme ça. Mais c'est affreux!!! Non les gens ne se rendent pas compte. Rien n'arrive comme ça. Si le monde est affreux c'est que vous avez bien voulu qu'il le soit. Je remets en place la capuche de mon filleul.

« Au fait, tu connais une bonne agence pour trouver des nouvelles nounous …?»

20h32. Rêvé-je où ai-je bien entendu? 20h32. Hyde Park. Londres. Lizbeth Smith. Mannequin. Playwitch de l'année. Tout juste tirée de la gueule d'une ghoule cannibale. Son gamin encore sous le choc qui se cramponne à ma veste comme si sa vie en dépendait - c'est le cas d'ailleurs. Recherche Garde d'Enfant... ... ... ... ... Certes.

« C'est moi ou ton gamin vient de passer à deux doigts de finir en friskies pour cannibales ..? Soupir et sinon? Tout baigne? »

Mauvais rictus. J'ai tendance à ne pas aimé son côté... superficiel. Elle le sait. Surtout quand ça concerne Lukas. Je tire ma baguette. Mieux vaut que je ne la ramène pas à Erika ce soir. J'en connais une autre qui finirait en friskies. Un bref message. Ce qu'il ne faut pas faire.

« Bon on va faire ça chez toi finalement. »

Ce n'est même pas vraiment une proposition. En chemin je prendrais chinois puisque c'est ce que Lukas aime manger. Nous rentrons. Le gamin c'est endormi. Tant mieux. Je vais le mettre au lit. En revenant.

« Bref. A la base j'avais prévu de te parler d'un truc important ce soir. Tiens... »

Je la sers. Prends le siège d'en face. Ca ne sera pas plus mal comme ça.

« En ce moment je travaille à quelque chose d'important, pas seulement pour moi. Disons que ça touchera à plus ou moins tout le monde et j'ai besoin de m'assurer que tu me fais confiance... »

Elle était toute une girouette Lizbeth. Elle changeait d’avis, comme elle changeait de sous-vêtement. Elle changeait de sujet en quelques minutes, malgré la frousse qu’elle pouvait avoir trois secondes avant. Elle avait presque perdu son fils dans une tragédie à cause d’un chat. Il y avait des goules qui les avaient attaqués. Heureusement que Lukas avait réussi à se sauver au bon moment avant que l’une des goules lui fassent du mal. Lizbeth l’avait perdu de vue et elle avait eu peur de le perdre sur le coup. Pourtant, elle vit arriver l’homme de la situation qui la sauva elle-aussi à son tour. Yon Winchester l’homme de la situation ! Il avait le profil pour d’ailleurs. Il était disons le sauveur des jours prochains qui auraient pu être malheureux par la mort de la mère ou encore du petit garçon. Personne ne connaissait vraiment l’existence de Lukas. Yon était celui qui savait bien des choses sur Lizbeth, même l’existence de son fils qu’elle ne cessait de cacher aux journalistes. Pourtant, personne ne semblait avoir remarqué qu’avait disparu pendant quelques mois où jamais on ne l’aperçu se promener dans une rue ou sortir carrément de chez elle. Elle s’était camouflée laissant des gens dignes de confiance chercher ce qu’elle avait besoin. Lorsqu’elle devait aller voir le médecin, elle avait payé très cher pour qu’on garde le silence face aux autres. Elle avait pris plusieurs précautions pour ne jamais que personne ne s’approche de son fils. Elle espérait que personne ne s’approchera de lui avec de mauvaise intention. Elle ne savait quoi penser de cette vie, même si elle semblait ne vouloir le laisser partir, comme si elle voulait le garder pour la vie avec ses intentions de le cacher. C’était faux. Elle voulait le garder loin des gens qui pourraient faire pression par Lukas. Elle ne voulait pas qu’il soit connu, car elle état dans la merde depuis des années. Lizbeth était saine et sauve en compagnie de Lukas qui s’était accroché aux jambes de son ami, Yon. Elle le regardait avec un air si sérieux par rapport à sa nounou qui l’avait mis en colère, comme jamais. En plus, elle ne faisait comme si rien ne s’était passé. Étrange moyen de faire diversion par rapport à l’évènement qui venait de se passer. Lukas était toujours accroché à Yon. « C'est moi ou ton gamin vient de passer à deux doigts de finir en friskies pour cannibales ..? et sinon? Tout baigne? » Elle le regarda voyant bien qu’elle l’avait choqué par son comportement. Elle le savait. Elle en était même sur. « Désolée… Ouais, ça va. » Elle tenait le sac de son fils qu’elle avait finalement retrouvé non loin d’elle lorsque les goules avaient pris la fuite. « Bon on va faire ça chez toi finalement. » Elle hocha de la tête. « D’accord. » Ils s’en allèrent pour prendre quelques choses à manger avant de retourner chez Lizbeth où Lukas s’endormit très rapidement. Yon coucha Lukas dans sa chambre. Son fils avait eu trop d’émotion pour rester debout longtemps. Le pauvre… il avait fini par servir de dessert pour les goules. « Bref. A la base j'avais prévu de te parler d'un truc important ce soir. Tiens... » Elle le regardait le servir… Elle le laissa faire, même si elle était supposée de le servir, puisqu’elle était chez elle et lui, il était maintenant son invité. Yon faisait ce qu’il voulait quand il voulait. Elle ne dit rien pour ce qu’il avait commencé à parler. Elle entendait la suite. « En ce moment je travaille à quelque chose d'important, pas seulement pour moi. Disons que ça touchera à plus ou moins tout le monde et j'ai besoin de m'assurer que tu me fais confiance.. » Elle fronça les sourcils sur le coup. « Tu sais très bien que je te fais confiance… on ne serait pas ami sinon…. Tu ne serais pas le parrain de Lukas, tu sais beaucoup de choses qu’une grande partie de famille ignore. Je te fais confiance depuis très très très longtemps. Je croyais que tu le savais ! » dit-elle presque vexée sur le coup. « tu doutes de moi, yon ? » une question parmi tant d’autres. « C’est quoi ton projet sur quoi tu travailles… je t’écoute »

Elle se rattrape. A peine. C'est à moi de passer dessus. Peut-être. On verra. Je ne suis pas venu pour ça. Un regard. Je la sonde. Elle fronce les sourcils. Nous verrons bien...

« Tu sais très bien que je te fais confiance… on ne serait pas ami sinon…. Tu ne serais pas le parrain de Lukas, tu sais beaucoup de choses qu’une grande partie de famille ignore. Je te fais confiance depuis très très très longtemps. Je croyais que tu le savais ! » , Silence. Je ne suis pas venu pour rassurer. Je reste dur. Cela change. Mais j'ai été dur en d'autre occasion. « tu doutes de moi, yon ? », pas de réponse, « C’est quoi ton projet sur quoi tu travailles… je t’écoute »

Un long silence. Très long. Je l'observe. L'atmosphère est pesante.

« Ne t'es-tu jamais demandé pourquoi le monde tourner si mal... », je me poste à la fenêtre. Voilà qu'il se met à pleuvoir,« L'enfer... tout ça. Les rues ne sont pas sûres, même sans parler de tout ce qui traîne dehors à cause de M. Orlov et de ses amis. Tsss, lycans, vermines, même sans eux ce n'est pas le monde dans lequel j'ai envie d'élever ma fille, ni de voir grandir mon filleul. Mh. »

Je me retourne, la regarde dans les yeux.

« Qu'est-ce que tu en penses toi de tout ça...? »