Edinburgh et son Castel Roc, son Arthur Seat et son eau à perte de vue du haut de l'observatoire. Edinbrugh et son soleil timide, et ses couleurs lors du festival le Fringe. Edinburgh et ses beaux quartiers qui font rêver. Edinburgh et ses grands hôtels où on toujours lieu de grandes soirées mondaines, ce genre de lieu où les petits sans avenir rêvaient en regardant les adultes vêtus de leur plus somptueuses tenues s'y rendaient. Les femmes avec leur bijoux à en perdre la tête, leur robe en soie, satin et autre qui avait l'air d'une seconde peau. Et les messieurs si classes dans leur smoking aux boutons de manchettes en or ou argent. Et elle, petite fillette de sept ans, avec sa sucette volée chez l'épicier du coin, qui les regardait en rêvant. Elle aussi voulait devenir comme eux. Elle aussi voulait tourner sur elle-même en portant une belle robe en satin. « Rory !! Viens vite, ta maman te cherche !! » il n'en avait pas fallut plus pour qu'elle court de l'autre côté du pont, descende la longue rue vers le début de la balade conduisant au sommet d'Arthur Seat, où elle grimpait souvent avec ses copains d'école. Plus elle s'éloignait du centre ville d'Edinburgh, plus les lumières semblaient moins étincelantes, plus la nuit prenait le pas. Même si les maisons ne tombaient pas en ruines, on devinait que l'on était dans un autre quartier que celui plus haut. Et pourtant, la petite Rory n'en ôtait pas son sourire, continuant de rire en sautant, les bras perpendiculaire à son corps en faisant l'avion avec le petit Gowan avec qui elle passait son temps à s'inventer un arbre généalogique purement écossaise. Un arbre souvent composé des plus grands fondateurs des clans écossais, juste parce que le garçon répétait que "Rory" ça ne faisait pas très écossais. Arrivée près de sa petite maison, elle arracha sa sucette de sa bouche, l'enfourna dans celle de son copain et poussa la porte de sa maison avec le sourire aussi gros que si c'était Noël, mais comment expliquer que chez elle - dans sa tête, dans son monde - s'était toujours Noël.

« Mais on va nous gronder ... » chuchota une petite brune d'environ quinze ans - tout juste -, ce à quoi son ami aux cheveux feu répondit « mais non .. ils le sauront pas.. ». Sceptique, la gamine grimaça mais n'eut pas le temps de réagir que son ami lui attrapait la main pour la tirer avec lui. Allez savoir ce qui avait conduit Gowan à faire ça, mais elle l'avait suivit, comme toujours quand il avait une idée. Avec son regard brillant, Rory se laissa entraînait, mais son instinct la poussait à reculer. Ils avaient suivit le père du garçon, ce-dernier pensant certainement le trouver avec une maîtresse. La fille secoua la tête, bougeant ses couettes, pas très rassuré. Elle avait toujours eu peur du papa de son ami, parce que lui s'était un vrai sorcier et qu'il avait toujours un air méchant au visage. Et surtout, elle ne comprenait pas pourquoi le père de Gowan irait dans un cimetière pour rejoindre son amoureuse, ça manquait de romantisme non ? « Gowan j'ai peur .. » lâcha-t-elle brusquement, plaquant sa main libre sur sa bouche en réalisant qu'on pourrait l'entendre. Se tournant violemment vers elle, le rouquin lui posa sa veste sur les épaules en chuchotant, « Comme ça, ma veste te protégera. Tu veux que je lance un lumos ? » chose à laquelle elle répondit négativement. Elle avait beau avoir sauté de joie quand elle avait découvert qu'elle était à l'école avec Gowan, elle n'aimait pas qu'il utilise la magie aussi souvent et avec autant de facilité. S'enroulant dans la veste de son ami, elle le suivit à pas de loup, de moins en moins rassuré. Jusqu'ici, son instinct ne l'avait jamais trompé, alors pourquoi serait-ce le cas ce soir ? Elle tira sur le pull du garçon quand des voix se firent entendre. Sursautant, elle se jeta dans l'herbe en obéissant à son copain, et tous deux observèrent la scène, cachaient derrière des branches. Il lui sembla que le père de Gowan avait de trop nombreuse maîtresse, et surtout que c'était un jeu étrange auquel il s'adonnait, tous encapuchonnés. Peut être faisaient ils une partie de cache-cache, sauf qu'ils étaient pas très doués. Et puis ils laissèrent apparaître leur visage et quelque chose bloqua Rory.. Il y avait deux hommes qu'elle reconnaissait pour les avoir déjà vu chez le père de Gowan, mais les autres n'étaient pas tous des femmes.. Plus que jamais, elle enfonça ses ongles dans le bras de son camarade qui ne put retenir un « Aïe !!! » suraigu qui attira l'attention des adultes. A la vue de toutes ces baguettes pointaient sur eux, les gamins prirent la fuite, en se retournant constamment. Un jais de lumière verte frôla la jeune fille qui, épouvantait en reconnaissant de quel sort il s'agissait pour avoir écouter en classe, accéléra plus vite. « RORY NON ! » trop tard, attirait par le cri, elle se stoppa, tourna la tête à droite, rien puis à gauche et là .. La voiture lui fonça dessus sans qu'elle ait le temps de réagir.

Dix mois. Dix mois que ses parents passèrent à son chevet à attendre, à patienter, à ronchonner pour le père, à s'égosiller pour la mère. Ils avaient beau être pauvre, manquer parfois d'éducation, ils n'en restaient pas moins un couple soudé aimant leur fille plus que tout. Plus que tout, oui, surtout après avoir perdu deux enfants avant elle. Pendant ces six mois, ils avaient songé à une malédiction. N'avaient ils pas des voisins qui pratiquaient le vaudou ? Et puis un matin, on s'était affolé, on avait courut autour de son lit, on avait débranché des appareils, on avait empêché les parents de voir. Foutus médecins, avait gueulé le père. En même temps, il préférait que ce soit des docteurs "normaux" qui s'occupaient de sa fille, plutôt que des sorciers. Enfin bon, la belle au bois dormant s'était réveillée, douloureusement, avec des troubles de la mémoire. Il avait fallu lui ré-expliquer pourquoi elle était là, lui donner une explication partielle de l'accident, puisque personne n'en connaissait les réelles causes. Ses parents avaient du lui ré-expliquer l'école de magie, lui montrer ses lettres écrites à la plume avec des traces de pattes de hiboux. Et puis il avait fallu travailler sa mémoire, faire des interrogations, transformer son passé en sujet de dissertation, faire de ses souvenirs un jeu de piste. Heureusement, Rory n'avait pas oublié, elle avait juste du mal à se souvenir. Et puis les diagnostics s'étaient enchaînés. Il fallait opérer pour stopper le saignement ici, il fallait opérer pour la vue, il fallait surveiller de près ce bras, chatouiller ce pied. Le plus difficile avait sans doute été la rééducation. Pratiquement la moitié d'une année à ré-apprendre à marcher correctement, à réveiller ses membres endoloris. Autant dire que les économies des McCallister y passèrent. Ils avaient du vendre la maison, recueilli par la mère de Gowan, dont le mari avait disparu quelques temps après l'accident, prétextant qu'il voulait voir du pays. On pensait Gowan à l'école de magie.
Puis la lettre parvint, en réponse à celle de Mr McCallister. On attendait Rory avec plaisir pour débuter sa cinquième année. L'été de ses quinze ans ne devint qu'un cauchemar récurrent pendant son sommeil et il fallut de nouveau lui expliquer pourquoi, à dix-sept ans, elle allait se retrouver en cinquième année. Deux ans de perdu. Mais Rory était une battante, elle était connue pour ça dans sa rue, si bien qu'elle réussit à surmonter les épreuves et se retrouva bientôt dans le train, armée de sa béquille pour l'aider au cas où sa jambe droite ferait des siennes, des lunettes de vue en cas de fatigue des yeux. On lui avait tout bien expliqué. Son coma avait amoindrit certaine capacité, son odorat et son goût avait diminué, sa vue baissé et il fallait donc qu'elle pense à utiliser les montures en cas de vision trop floue. En revanche, pour rattraper ces sens amoindris, son ouïe s'était affiné, ce qui la désespérait plus qu'autre chose, lui donnant l'impression d'être une mauvaise imitation d'Helen Keller. Sauf qu'elle, elle avait une baguette en plus et toc !