Il y avait bien longtemps que Mélisande n'avait pas eu à voler sa nourriture. Elle avait grandi dans un Paris de fin XVIIIe, crasseux et impitoyable. Elle avait chaque jour dû espérer un quignon de pain rassi de la part de l'affreuse mégère qui faisait des petits orphelins son juteux gagne pain. Aussi elle ne s'offusquait jamais du sort qui était le sien. Elle se serrait sagement tut et elle aurait gardé les cachots qu'on lui imposait en regrettant silencieusement sa chère bibliothèque s'il ne c'était agit que d'elle. Mais bien loin de ne concerner qu'elle, les directives de Lady Grey affectait tout le monde. Chaque jour elle voyait arriver aux cachots de nouvelles bouches qu'elle n'avait pas les moyens de nourrir. De bibliothécaire, la douce Mélisande était devenue le garde-malade, l'infirmière, la cantinière, la nurse de tous les petits mal-aimés de Poudlard. Et avec cela, elle qui ne maîtrisait aucune forme de magie sinon la plus élémentaire, celle qu'il pouvait y avoir dans un sourire ou un regard, et celle que le professeur Van Hellsing lui avait donnée, se retrouvait impuissante à soutenir les maux de tous.
Elle avait pu récupérer deux matelas, un peu meilleur que ce que la directrice leur avait laissé et dont les ressorts labourait les côtes des gamins la nuit. Elle avait fait des pieds et des mains pour trouver de bonnes couvertures pour tout le monde. Elle avait usé ses yeux à tricoter des laines douces pour que personne n'ait à souffrir du froid et de l'humidité des cachots. Mais il y avait deux points sur lesquels elle arrivait à bout de ressource: la nourriture, et les médecines. Alors ce soir, parce qu'il y avait eu un bras cassé, et encore un peu moins de nourriture qu'à l'ordinaire, la directrice ne leur cédant que les restes des restes du dîner du soir, Mélisande s'était glissée hors du grand cachot où un dortoir avait été improvisé pour les nés moldus et les élèves dissidents. Et, sans rien dire à personne, elle s'était glissée jusqu'à l'infirmerie, craignant chaque seconde que les gorilles de la directrice ne lui tombent dessus.
A présent que tout le monde savait qu'elle n'était pas sorcière, mais plutôt le produit d'une expérience en alchimie - un homonculus - il était de notoriété publique que la douce bibliothécaire avait le don de l'empathie. C'était d'ailleurs le seul qu'elle avait. Mais on ignorait encore, et il fallait que ça reste tut, qu'elle avait également le don d'influencer les émotions des autres. Elle ne s'en servait pas, ainsi que lui avait demandé Abaddon. C'était plus prudent.
Malgré tout, bon an mal an, elle avait pu ramener quatre fioles de dictame, et voilà qu'elle se faufilait dans les cuisines. Les elfes se rassemblèrent autour d'elle, plus parce qu'ils trouvèrent qu'elle était une bien jolie chose que parce qu'ils avaient envie de l'aider. A la vérité, tout ce qu'ils acceptèrent de faire fut de fermer les yeux pendant qu'elle prenait des petits pains au lait autant qu'elle pouvait. Ils ne voulaient surtout pas être mêlés à ça, et s'attirer les foudres de la directrice. Elle n'était pas bien loin du cachot. Il suffirait qu'elle...
Elle se figea sur place. Face à elle la longue silhouette d'un jeune homme. Elle frissonna, terrifiée à l'idée de ce qui allait bien pouvoir se passer ensuite...