Faire semblant pendant la moitié de l'année scolaire ça avait quand même été rude pour elle. Ca avait été sa plus longue mission. Celle qui la faisait enfin sortir du rang de "bleue" et qui faisait d'elle un vrai agent. Parce que non seulement elle s'en était tiré, mais de façon exemplaire. Il y avait juste eu Sawyer. Mais c'était du passé. Ca n'avait été qu'un baiser elle ne s'était pas attaché donc R.A.S. Pour preuve elle l'avait même signalé dans son rapport ce qui prouvait bien qu'elle n'en avait rien à foutre. Un mot de Wagner et elle s'était éclipsé. Sans rien dire ou presque. Juste "je pars".
Elle ne verrait plus Sawyer de toute manière et dans deux semaines elle partait sur une mission.
Fox se dirigeait vers la Galerie (celle de façade). Une main se posa sur son épaule. Un truc à ne pas faire, sa main attrapa directement le col de l'importun mais elle relâcha immédiatement. C'était Sawyer.

« Salut. »
« Salut. »

Dans le fond elle restait toujours cette sale petite gosse des rues. Plantée devant Sawyer et son air impassible, elle campait sur ses positions. Non elle n'avait rien à se reprocher. Et si il avait du mal à gérer le changement ou elle ne savait quoi ben... ben! Oui parce que ne nous leurrons pas. Elle savait très bien qu'il n'avait pas apprécié le coup du post-it. Mais ce n'était pas fait pour être apprécié, juste pour... être efficace et ne laisser aucune place à la discussion. Elle était agent. Il n'y avait pas de place pour lui dans sa vie parce qu'elle ne se voyait pas faire comme Ariane et tant d'autres à la galerie, et mener une double vie. Puis de toute façon elle n'était pas romantique, et ça ne l'intéressait pas et elle n'avait à se justifier merde!

« Qu'est-ce tu fais là? »

« Ça te dérange que j’y soit ? »
« Humpf... non j'men fous, fin... tu fais c'que tu veux. »

Et elle ne bronchait pas. C'était plus fort qu'elle. Il la prenait froidement, elle le prenait froidement aussi. Le pire c'était qu'elle était contente de le voir. Mais c'est pas en la prenant comme ça qu'elle allait le lui dire. De toute façon ...

« Tu n’a pas fini ton année. »
« Ouais fin c'est pas un drame non plus. Bon, écoutes, j'ai pas trop le temps là. C'qu'on fait... », elle fouilla dans la poche arrière de son jean et en sortit une vieille note de courses à moitié effacée. Elle griffonna un truc dessus en deux deux et la lui tendit,« ...c'est que je te laisse mon numéro, t'auras qu'à m'appeler on se prend un café un de ses quatre. Voilà. Désolée. Vraiment désolée Saw... »

Elle lui mit le papier dans la main. Le contact réveillant de vieux souvenirs. Il ne valait vraiment mieux pas. Ce numéro c'était un faux. Elle ne prendrait pas de café avec lui, même si elle en crevait d'envie. Même si quand il parlait et surtout quand il faisait la gueule comme ça, c'était sa bouche qu'elle regardait une fois sur deux. Justement pour toutes ces raisons, elle ne pouvait vraiment pas. Peut-être même que finalement, elle allait les prendre ces séances chez le psy que Wagner avait eu la connerie de lui programmer sans lui demander son avis.
Elle se retourna sans attendre pour pousser la porte de la boutique qui se trouvait en face de la galerie et une fois hors de vue, elle se mit à courir vers une issue de secours ou quelque chose. Finalement ce fut le conduit d'aération. Tous les chemins mènent à Rome il parait...

« Alors? »
« Ouais il fouine. Il a gober le truc du faux numéro mais n'empêche. »
« Okay Chuck. J'te recontacte pas. »
« Vaut mieux pas pour toi Alex sinon j'appelle la police. »
« Ouais c'est ça Chuck, appelle la police. »

La voix au bout du fil eut un petit rire. Alex Wagner raccrocha, un petit rictus sur les lèvres. Il l'avait bien dit à Linius que ça se passerait comme ça. Mais après tout ça avait été son idée à lui d'envoyer Fox à l'école, parce que c'était bon pour elle plus qu'autre chose. Il n'avait pas prévu qu'elle tape dans l'oeil de Slayers Junior. Ils n'en avaient pas parlé à Ariane mais mieux valait la mettre devant le fait accompli (selon Change'). Mais il ne fallait pas se leurrer, celui là il tenait de sa mère, il finirait bien par trouver anguille sous roche. Wagner ouvrait donc l'oeil.

« Je serais toi je n'ouvrirai pas cette porte gamin. »

Le clic du cran de sûreté se fit entendre dans le noir. C'était quelques jours après que Sawyer soit tombé sur Fox, et voilà qu'il s'introduisait en pleine nuit et commençait à fouiner comme l'avait dit Chuck, le préposait à la désorientation. Alex Wagner, suivant les ordres, l'avait laissé entrer par effraction. Il n'avait même pas arrêté l'alarme silencieuse. Autant tester le gosse en condition réelle. Ensuite il l'avait laissé trouver l'arrière boutique, l'ascenseur qui menait aux étages supérieurs et inférieurs. En bon petit fureteur, il avait fait ce que tout espion né aurait fait, il était descendu, droit dans le piège de Wagner. Le flingue sur sa tempe, histoire de lui foutre la frousse. Il lui donna quelques raisons de flipper pour son matricule avant de le raccompagner dans la galerie, en lui disant qu'il avait juste cinq minutes et quarante-deux secondes avant que les flics débarquent.

Après quoi, et comme il ne s'en tirait pas trop mal, il lui demanda ce qu'il comptait faire. S'il voulait en être et lui donna une adresse - celle d'un instructeur - pour le cas où il prendrait la bonne décision. Seulement quand Sawyer alla frapper à cette adresse:

« Sérieux-là? Non écoute Sawyer, là j'ai vraiment autre chose à faire, faut que tu me lâches. Et j'attends quelqu'un en plus. »

Vexée Fox? Non pas vexée, mais furieuse de devoir encore et encore se retrouver devant lui.

Il n'y avait rien qui énervait plus Fox que quelqu'un qui lui mettait des bâtons dans les roues. C'était en grande partie ce qui faisait que ça ne fonctionnait pas avec Wagner depuis le début et si ça continuait ça ne fonctionnerait pas non plus avec Sawyer, d'ailleurs il n'était même pas question d'essayer de faire fonctionner quoique ce soit avec Sawyer. Elle leva les yeux au ciel comme il l'empêchait de fermer la porte. Comme si le coup du faux numéro c'était pas assez clair.

« Je sais pour la galerie d’Art. J’veux en être. »
« Quoi tu t'es découvert une passion pour l'art moderne? Bravo qu'est-ce que tu veux que j'te dise... »

Elle avait compris de quoi il parlait mais c'était son rôle à elle de ne jamais croire sur parole. Il fallait qu'elle le teste. Il aurait très bien pu ne pas vraiment être au courant et s'être contenter de l'espionner. C'aurait été la meilleure mais comme le disait Change', on n'est jamais à l'abri de rien alors pourquoi pas. Sans en avoir l'air, elle scrutait le visage de Sawyer. Elle aurait voulu être capable de faire le petit tour de passe-passe de Wagner et décrypter ce qu'il pensait rien à regarder la gueule qu'il tirait. Mais bon elle n'était pas Wagner. Tant mieux d'ailleurs.

« On m’a donné ton adresse là-bas. »
« Qui? »

Elle n'y allait pas par quatre chemins. Le moins elle en disait le mieux c'était. Pour le moment elle n'avait pas prévu de le laisser entrer. Si vraiment c'était la galerie qui l'envoyait, et si vraiment c'était lui sa recru, alors elle reconsidérerait l'idée de le laisser entrer. Mais pour le moment elle était loin d'être convaincue. Ca aurait été trop facile.

« Je ne parle pas de ça. Et tu le sais. »

Echange de regards meurtriers. Evidemment qu'elle savait mais... elle enrageait intérieurement que Wagner lui ait fait ce coup là. Que Sawyer lui tienne tête. Et qu'elle n'arrive pas à gommer le souvenir de cette sensation sur sa bouche, fantôme d'un baiser qu'elle aurait bien réitéré. Si l'on posait le pour et le contre, elle était plutôt contente de voir que Sawyer n'allait pas être rayé de son planning quotidien. D'un autre côté, maintenant qu'il allait être son "bleu", ce n'était même plus la peine de penser à ce baiser... en somme c'était juste assez bien pour qu'elle soit dégoûtée.

« Un homme Quarantaine. L’air sérieux. Brun. Cheveux long. Je ferais partit des vôtres. Avec ou sans ton aide. »

Fox tiqua.

« Sans mon aide j'en doute fort. C'est moi qui vais t'instruire le bleu et j'aime autant te dire que si tu veux être prêt tu as intérêt à faire mieux que "Un homme Quarantaine. L’air sérieux. Brun. Cheveux long". Ca pourrait être n'importe quel pecno ça. Allez entre. »

Elle s'écarta pour le laisser entrer dans le grand loft que Foxner lui avait légué. D'immenses baies laissaient entrer la lumière, d'autant mieux réfléchie par les murs blancs et le mobilier sobre. Une gamine de son âge n'aurait pas pu se le permettre en plein coeur de Londres. Mais la Galerie avait à coeur de pourvoir à leurs besoins minimums.
Sur la table basse devant le sofa, l'arme de Fox qui servait de presse-papier à quelques dossiers. Elle en prit qu'elle ne tarda pas à mettre dans les mains de Sawyer.

« Bon je voudrais que tu m'aies retenu tout ce qu'il y a là dedans pour ce soir. »

A l'intérieur une quinzaine de photo d'hommes et de femmes, avec un post-it sur chacune, récapitulant le nécessaire d'informations. Nom, âge, occupations, allergies etc. Cela faisait quand même beaucoup d'autant qu'elle ne comptait pas le lâcher tout de suite.

« Ensuite je vais avoir besoin de savoir où tu vis, avec qui, dans quel milieu. Alors tu t'assieds là et tu as intérêt à avoir la langue bien pendue pour une fois. », ordonna-t-elle sans lui dire qu'elle savait déjà tout ça, « Tu veux boire quelque chose? », demanda-t-elle redevenant la Fox amicale avec laquelle il avait poussé sa chance jusque dans la forêt interdite.

Elle le laissa entré. Il n’était jamais venu. N’avait aucune idée d’où elle vivait. Jusqu’à maintenant. S’il y avait songé ce n’était pas ce qu’il aurait imaginé. Un petit appartement miteux remplit de désordre. Certainement pas quelque chose d’aussi lumineux. Il voyait Fox comme casanière. Pas le genre de fille attaché à une belle vu. Peut-être se trompait-il. Il n’aurait pas pensé qu’elle puisse être du genre à partir sans dire aurevoir. Et pourtant. Ceci prouvé qu’il ne la connaissait peut-être pas. Pas autant qu’il l’avait pensé. C’était passionnant. Intéressant. Décevant aussi. Mais susciter son intérêt. Elle lui donna des dossiers. Ne fût pas plus terrorisé que d’autre de son âge aurait pût l’être au vu de l’arme sur la table.

« « Bon je voudrais que tu m'aies retenu tout ce qu'il y a là dedans pour ce soir. »

Ce n’était certainement pas de la paperasse qui allait le décourager. Il était plus patient que son frère. Savait être assidue. Si c’était important il le ferait. Il le ferait même si ce n’était peut-être qu’un test pour tester sa motivation. Il voulait lui montré qu’il avait exécuté des ordres. Aurait préféré que ce soit quelqu’un d’autre qu’elle qui lui donne.

« Ensuite je vais avoir besoin de savoir où tu vis, avec qui, dans quel milieu. Alors tu t'assieds là et tu as intérêt à avoir la langue bien pendue pour une fois. »

Il était méfiant. Il s’attendait à passer des test secrets pour savoir s’il était à même de garder un secret. Il avait conscience d’être sur le point de découvrir un réseau d’espionnage ou quelque chose s’y rapprochant. S’il était capturé par l’ennemi et interroger il devrait alors rester muet en toute circonstance. Si on lui demander son nom il ne devrait pas se contenter de répondre Sawyer. Il devrait résister. Donner à Fox des informations sur lui aussi simplement était pour lui une façon de lui prouver qu’il était un livre ouvert et incapable de garder de gros secret qui une fois révéler mettrait plein de gens en danger. Ainsi il n’intégrait pas la société secrète. Il échouait le test. Mais peut-être était-il un peu parano… Il s’assit néanmoins.

« Tu veux boire quelque chose? » Elle redevenait celle qu’il connaissait. N’en était pas plus rassuré pour autant. « Rien ça ira. Qu’est-ce qui me prouve que j’peut te faire confiance ? Que c’est pas un test ? »

« Rien ça ira. Qu’est-ce qui me prouve que j’peut te faire confiance ? Que c’est pas un test ? »

Certes. Encore un tordu pensa-t-elle, mais c'était juste parce qu'elle était toujours fâchée. En temps normal elle aurait dit quelque chose du genre bien le bleu, on a un peu de jugeote finalement. Mais elle ne pouvait définitivement pas dire ça à Sawyer. D'une parce qu'elle le connaissait trop bien pour savoir que de la jugeote il en avait plus que la moyenne. De deux parce que ne nous leurrons pas, elle l'aimait un peut trop bien pour ça. C'était son ami en somme. Elle eut un petit rire posant malgré tout un verre de scotch dans lequel elle avait mis deux glaçons. L'habitude. Attention n'allait pas croire qu'elle s'enfilait des scotchs à longueur de temps quand elle était chez elle. Ni d'ailleurs qu'elle ait pu soupçonner que c'était ce que Sawyer aurait pris. Mais c'était ce que Foxner aurait pris lui. Et depuis qu'il était mort, personne n'avait plus touché à son scotch. C'était l'occasion ou jamais de le ressortir.

« Rien en fait. Et si c'était pas toi j'te dirais tout simplement de faire confiance à personne. Mais... », une fraction de seconde ses yeux noir charbon glissèrent sur les lèvres de Sawyer, elle s'éclaircit la voix et repris, « Je serais toi j'me ferais confiance. Ne serait-ce que parce que je vais être ton instructeur et aussi... », léger embarras devant l'argument à venir, « Parce que tu m'as embrassé et que je crois pas que tu sois le genre de mec à embrasser n'importe quelle fille. Bref. »

Sans transition n'est-ce pas?

« Tu veux en parler ? ...Du baiser. »
« Non. Je pense qu'il vaut mieux oublier Sawyer. », répondit-elle plus franchement sérieuse.

Il valait mieux oublier parce que question de boulot. Il ne pourrait pas rester concentré et elle non plus. C'est comme si... Ariane avait bossé avec son mari, ou Change' avec Nausicaa, ou Wagner... tiens d'ailleurs Wagner n'avait personne dans sa vie, du moins officiellement. Fox s'éclaircit la voix avant de reprendre.

« Bon ce soir je t'emmène en mission test. Je serais toi je me reposerai cet aprem sinon tu tiendras jamais le coup. »

Elle se releva, les mains dans les poches arrières de son jean comme souvent, avant de ramasser son arme. Un coup d'oeil à Sawyer l'air de lui dire "tu peux rester là si tu veux" puis elle leva le camp et on ne la revit plus jusqu'au soir, enfin... Sawyer n'eut droit qu'à un petit mot laissé sur la table. Un post-it comme elle lui en avait laissé un en partant. On reconnaissait facilement son écriture.

Retrouve moi au Lockness Café

Pas d'heure. Pas d'autres précisions. On ne l'avait même pas vu passer pour déposer ce message. Mais quoiqu'il en soit, ce soir au Lockness Café, il y avait une nouvelle serveuse, blonde, latino ou quelque chose du genre. En tout cas drôlement sexy. Mais ce n'était pas forcément elle qu'on remarquait en premier en rentrant.

La serveuse avisant un jeune homme qui désirait quelque chose roula des hanches jusqu'à l'autre bout du comptoir, non sans soulever au passage quelques sifflets et autres compliments bien gras. Le genre qu'on entend typiquement dans les bars où les serveuses portent des cuissardes de cowboys et des hauts qui tenaient plus du soutifs en cuir clouté que du vêtement. Et dire que cette tenue allait bien à la blonde ç'aurait été un euphémisme.

- J'te sers quelque chose beau brun?, proposa-t-elle ruminant ostensiblement un chewinggum fraise-mandragore.

Elle s'appuya coudes sur le comptoir, poitrine généreusement offerte à la vue pour inciter le client à consommer et le miroir long derrière elle donnait une vue imprenable et particulièrement succulente sur ses fesses. Évidemment dans de telles conditions tout le monde voulait reprendre quelque chose.

- On se calme Fonzy, y en aura pour tout le monde.

Tonnerre de hurrah pour la belle blonde. Il n'y avait rien à dire, elle avait son métier dans la peau, ça se sentait. Les poings se mirent à cogner sur le comptoir, comme pour l'encourager à y monter mais d'un petit regard mi malicieux mi aguicheur, elle leur fit comprendre que ce n'était pas pour tout de suite...