Dans la chambre 396 au service des enchantements et pathologies magiques, dans l'aile des personnes incurables ou légumes, à l'hôpital Ste. Mangouste, on entendit plusieurs hurlements de douleur. Rapidement, les guérisseurs en service se ruèrent vers cette dernière avec tout un attirail de potions, de pommades et baguettes magiques au cas où il faille intervenir. A leur plus grande surprise, le patient Sean Savage, plongé dans un coma depuis près de six ans, semblait de retour dans le monde des vivants, hurlant d'une douleur toute particulière.

Le choc passé, une à deux secondes de passé, les guérisseurs se mirent à faire tout ce qui étaient en leur pouvoir pour calmer la douleur mais sans succès visible. Les mains de Sean s'agrippaient férocement au rebord du lit, tandis qu'il bougeait sa tête dans tous les sens, la sueur coulant le long de son visage. Voyant qu'aucun sortilège ne faisait effet, l'un des guérisseurs se hâta de poser sa baguette sur le front de l'ancien prêtre, visant à lui faire descendre la température corporelle.

Quelques minutes plus tard, Sean sembla se calmer. Ses doigts se décrispèrent, sa mâchoire se détendit, et son visage arborait une sensation de calme qu'ont les morts lorsque la faucheuse tombe lors d'un sommeil sans rêve, où la douleur n'est pas au rendez-vous.

D'un coup, alors que l'un des guérisseurs s'en allait, et que deux autres continuaient à noter et à exercer toute une batterie de test, Sean ouvrit les yeux, avant de se redresser comme par enchantement. Aussitôt, les mains des guérisseurs se posèrent sur les épaules du patient pour tenter de le rallonger dans son lit.



Sean venait de parler. Les deux guérisseurs se regardèrent un bref instant, l'un des deux haussa les épaules, d'un air de dire : Avec tous les fracassés du cerveau qu'on se tape dans ce service... Tandis que le deuxième ne put s'empêcher de regarder Sean d'une expression toute particulière. Ce dernier s'était un peu plus penché sur le cas de Mr. Savage que les autres. Peut-être parce qu'il lui était attribué... Ou peut-être parce que lui aussi croyait aux Anges, et à Dieu ? Il ne savait pas pourquoi, mais ce que Sean venait de dire, le guérisseur était persuadé que cela avait un lien. Après tout, avec tout ce qui se tramait au dehors, et le fait que ce dernier soit un exorciste...

Il devait être une heure assez tardive lorsqu'il finit par contacter le père du garçon qui se trouvait deux étages plus bas. Théodore monta aussi vite qu'il le put, mais Sean dormait à poing fermé. Des larmes coulant le long de ses joues, il savait qu'enfin, les prières faites à Dieu n'avaient pas été vaines. Ted leva le regard vers le réveil : Minuit passé. Il comptait y passer la nuit, et il préviendrait Elyzabeth et Clyde demain, à la première heure.

Posant sa tête sur le lit, tenant la main de son fils, il finit par s'endormir, remerciant les anges, et Dieu de leur avoir rendu leur fils.

Deux bruits se font clairement entendre dans le service des urgences de l'Hôpital Ste. Mangouste, où quelques personnes sont encore là, attendant leur tour. Mais eux, ils n'ont pas besoin de s'arrêter. Ils savent où ils doivent aller. Six ans qu'ils en connaissaient le chemin, à force, c'en était devenu un mécanisme. Leur regard était larmoyant, mais une certaine joie semblait s'emparer de chacun des traits de leur visage. Clyde était devant, il courrait presque dans les escaliers. Le calvaire que la famille rencontrait actuellement semblait terminé. Le poids accumulé sur les cœurs semblait disparaître au fur et à mesure qu'il avançait.

Il poussait les portes, avec un certain enthousiasme, avant de rigoler, laissant sa joie s'exprimer, tandis qu'il se mettait à courir à travers les escaliers, suivi par son père qui partageait le même ressentit. Néanmoins, ils finirent par se calmer en arrivant au troisième étage, où Clyde entra, le souffle court, un sourire sur ses lèvres. Quelques guérisseurs qui les reconnurent leur adressèrent un sourire, puis un geste de la main. Répondant à leur salutation, il poussa la porte de la chambre de son frère sans se soucier si ce dernier dormait ou pas.

A l'intérieur de la chambre 396, il y avait sa mère qui était au pieds du lit, les joues ternis par quelques larmes coulées il y a peu. Elle tourna la tête vers Clyde qui lui embrassa la joue avant que ce dernier ne se tourne vers son frère qui était adossé au dossier du lit, le regardant avec un sourire grand comme ça.

« Hi, Clyde ! »

Ils s'échangèrent un regard, puis un sourire, et enfin, Clyde se jeta sur son frère, le serrant dans ses bras. Les deux frères se mirent à éclater de rire, riant pendant bien quelques longues minutes, avant que Clyde ne se mette, finalement, à pleurer, laissant ses nerfs craquaient après autant d'années à attendre son frère. Sean eut un léger sourire, sentant une larme coulait à son tour sur l'une de ses joues. Ils se serrèrent quelques instants ainsi, sans qu'aucun mot si ce n'est quelques reniflements ne se fassent entendre.

Devant le lit, Elyzabeth était rejointe par Théodore qui vint la prendre dans ses bras.

Après le malheur, il y a toujours du bonheur. Car Dieu est bon, car il faut y croire. L'espoir est la seule chose qu'il vaille vraiment la peine d'être vécut... Car à la fin, lorsque cela finit par se réaliser, cette sensation de joie que l'on ressent est juste puissante... Awesome comme dirait nos amis anglophones. De l'euphorie à l'état pur.

La journée s'était passée sans encombre. Vraiment. Ce fut l'un de plus beaux jours de leur vie, et ils passèrent le plus clair de leur temps à faire les cons. Chose qui n'était pas arrivé depuis tellement longtemps... Et bien avant son coma, d'ailleurs. Sean avait toujours été tellement sérieux, et en grandissant, les deux frères n'avaient plus eut cette relation d'intense complicité même si les deux se connaissaient comme deux gouttes d'eau. Leurs parents étaient là aussi. Du rire, des tons qui se lèvent sous l'euphorie, des souvenirs qui reviennent, qui sont partagés, des sourires, des caresses... Sean ne pouvait s'empêcher de sourire, de taquiner son jeune frère, lui faisant quelques remarques que personne dans la pièce n'aurait jamais pensé qu'il sortirait un jour. Surprise, sourire, puis, Clyde qui lui renvoie la balle... Le temps semblait se rattraper avec une rapidité quelque peu surprenante. Mais ni l'un, ni l'autre, ni eux, n'allaient s'en plaindre.

Ils devaient être plus minuit lorsqu'une intense lumière les sortit du sommeil. Clyde s'était endormi, la tête posée sur le rebord du lit en tenant la main de son frère qui s'était assoupi. Les deux hommes tournèrent leur tête vers la source de lumière, avant de se frotter les yeux lorsque cette dernière disparut.

A la place, il y avait un homme qui leur ressemblait énormément. Un mélange entre Clyde et Sean qui les surprirent, sans pour autant les effrayer. Derrière lui, sur le mur, il y avait des ailes d'anges de dessinés. Sean porta directement sur son cœur, tandis que Clyde se levait rapidement. L'homme eut un léger sourire avant de leur chasser le tourment et l'inquiétude de leur cœur. Il avait quelque chose de sécurisant, et de protecteur, comme si aucun mal ne pourrait entrer dans la pièce.

« Content de vous voir enfin. »
« Qui êtes vous ? » Murmura Sean, le regard curieux.
« Je suis l'ange Manakel. On m'a demandé de venir vous dire deux, trois choses... »

Clyde retomba sur sa chaise instantanément, se mettant le visage dans les mains.

« Putain de merde... »
« Jure pas, Clyde. »
« Laisse ton frère, Sean. Il a besoin de s'en remettre. »

Manakel eut un petit sourire vers Clyde. Mais ce dernier ne le vit pas. Le cadet se sentait con, cette impression de... Il ne savait même pas s'expliquer ce qu'il ressentait à l'heure actuel. Pourtant, inconsciemment, il avait toujours été un grand croyant. Surtout durant la période du coma de son frère où il n'avait cessé de prier le réveil de ce dernier. Lorsqu'il releva la tête, il semblait avoir été assomé. Sean, quant à lui, sentait l'accomplissement de sa destinée. Il ne disait rien, mais il se sentait euphorique. Il ne comprenait pas tout ce qui se passait, mais il ne pouvait s'en empêcher.

« Pourquoi être venu nous voir, Manakel ? »

L'ange conservait son petit sourire lorsqu'il posa son regard sur Sean.

« Disons nous avons besoin de champions sur terre, car nous ne pouvons tout gérer... Entre ce qui se passe en haut, et ce qui se passe sur terre, nous sommes beaucoup trop occupé, et trop divisé pour parvenir à réaliser ce que nous étions censé faire. »
« Nous protéger des démons ? »
« En effet. Mais nous savons aussi que beaucoup parmi vous ont suivi l'exemple des Seraphyms, en s'adonnant à l'Exorcisme. Et nous vous en remercions plus que vous ne saurez l'imaginer. Car même si vous n'êtes guère nombreux, c'est toujours ça de fait. »

Manakel avait toujours son petit sourire apaisant. Et même lorsqu'il s'approcha de Clyde, Manakel lui posa la main sur l'épaule. Ce dernier ressentit une intense sensation de chaleur se répandre dans son corps, comme si il venait de manger du chocolat après une attaque de détraqueurs.

« Tu n'as pas à t'en faire. Notre père n'en veut pas aux gens qui ne croient pas en lui. L'essentielle, c'est que maintenant, tu y crois. »

Clyde leva le visage vers Manakel, comme apaisé. Néanmoins, il ne pouvait s'empêcher de trouver cela trop facile, trop... Clyde avait toujours été extrêmement méfiant envers la/les religion/s.

« Pourquoi ne fait-il rien, alors ? Je veux dire... Pour tout ça ? »

Manakel cessa de sourire, l'inquiétude apparaissant sur son visage. Il eut un léger soupire, avant de rompre le silence qu'il avait laissé installer.

« Parce que nous ne savons pas où il est actuellement. »

Sean se lova dans ses coussins, tandis que Clyde ne pouvait s'empêcher de se poser tout un tas de questions que Manakel pouvait entendre, bien qu'elles ne soient pas formuler oralement.

« Disons qu'en ce moment, et ce, depuis presque trois millénaires, les Hommes et les Anges n'ont cessés de se battre entre eux pour savoir de quel était la meilleure façon pour croire en Dieu. De ce fait, pour les plus pragmatiques et les plus réfléchis d'entre nous, nous ne savons comment régler ce problème. C'est pour cela que la croyance en générale recule dans le cœur des hommes. Peut-être que notre père est tout simplement las de voir ses enfants se déchiraient... »
« Donc... Les religions, c'est de la connerie. En faites, il n'y a pas de meilleurs méthodes de prier Dieu et... Mais pourquoi ne ramène-t-il pas son cul sur Terre ? Qu'il claque des doigts et que tout ne se termine en deux en trois mouvements pour qu'on puisse enfin vivre en paix ! »
« C'est bien vous, ça... Les Humains. » Manakel eut un sourire amusé malgré l'inquiétude visible sur son visage. Sean s'exprima :
« Pourquoi crois-tu donc qu'on tente d'enseigner au notre la patience, Clyde ? Pourquoi crois-tu que j'ai toujours été sur ton dos lorsque tu faisais tes caprices, et tes conneries sous prétexte que ça n'allait jamais suffisamment vite pour toi ? »

Clyde baissa le regard devant son frère. Manakel se recula, observant le mur où ses ailes étaient reflétés.

« Quoiqu'il en soit, l'heure n'est pas à régler nos problèmes du Paradis. Et même si nous devons vous aider, nous ne pouvons y parvenir sans votre aide. Ne croyez pas être les seuls que l'on vient voir. Il y a beaucoup d'exorcistes, de futurs champions que nous n'allons pas directement voir. Chaque ange a des humains à sa charge. Moi, je serais le votre. Comme Al Makr l'est pour Malik. »

Clyde ne savait pas qui était Al Makr, ni Malik. Néanmoins Sean semblait les connaître.

« Pas maintenant, Clyde. »
« Enfin. Vous faites partit de nos champions. Et pour cela, je me tiens à votre disposition lorsque vous serez dans le besoin. »

Manakel saisit la main de Sean, puis la main de Clyde, et il reprit :

« Je reviendrais. »

Une intense lumière les força à se couvrir les yeux, puis, lorsqu'elle disparut, Manakel n'était plus là.