Cours de botanique, hein. Encore pire que tout sur l’échelle de l’ennui. Maëlan posa son coude sur la table, sa main retenant son front pour ne pas qu’il s’écrase violemment sur la table. Pour voisin, ou plutôt voisine, il avait sa chère Indiana. Pour une fois qu’elle n’était pas fourrée avec ce frenchies, le Vert et Argent était plutôt content. Il voyait comment sa sœur travaillait dur et ça le fit sourire… Dans sa tête il y avait sûrement un monde magique qui se déroulait, puisqu’elle était comme ça la seule fille des Dashwood : magique. Le brun eu envie de la serrer dans ses bras, doucement, comme une poupée de porcelaine, de peur de la voir se briser. Leur petite maman. Mais en ce moment le quatuor était déchiré, et au fond des yeux de la belle, il manquait une petite lueur… C’était trop pour Maël qui détourna les yeux de sa sœur, alors que sa main droite glissait sur le bois de la table pour trouver le contact avec la peau d’Indie. Il serra ensuite sa main doucement avant de la relâcher.
Le Serpent prit sa plume qu’il trempa dans l’encre noir, attrapa un bout de parchemin et griffonna quelques mots dessus. Un simple ‘’Rejoins-moi dans les Cuisines après le cours.’’ qu’il envoya sous la forme d’un cygne enchanté à Jude qui était assis quelques rangées plus loin. Il devait prendre son rôle de grand frère au sérieux, et ne pas abandonner le petit frère… qu’il n’avait, d’ailleurs, jamais abandonné. Il déplacerait des montagnes pour lui, il lui offrirait des poneys roses et tout ce qu’il désirait. Il n’attendait pas de réponse du petit frère, non. Il ne le regardait même plus. Il savait que même s’il n’avait pas signé, Jude reconnaîtrait son écriture.
Maëlan détourna un peu la tête et observa la silhouette de Tanys devant lui. Il pencha sa tête sur le côté et fronça un peu ses sourcils… Il avait envie de l’embêter aussi, de jouer au grand frère tyrannique. Mais de loin c’était un peu dur. Il se contenta de lui envoyer un parchemin froissé en boule sur l’arrière du crâne. Ses yeux noisette scrutait le jeune Serpentard qui ne se retournait pas… Il avait un problème ou bien ? Et Maël comprit alors lorsqu’il vit le professeur entrain de parler. Il ricana légèrement, et lorsque le professeur se tu, Tanys se retourna lentement. C’est le moment que choisit le jeune Dashwood pour prendre un air innocent, limite avec une auréole au-dessus de la tête, les yeux rivés vers le plafond. Mais le manège ne put allez plus loin car la sonnerie retentit. En deux secondes, Maëlan avait rangé toute ses affaires et passait à la hauteur de la table de Tanys, il lui ébouriffa les cheveux.

Maëlan – « Fais attention… Il pleut des parchemins, p’tite tête. »

Quelques minutes plus tard, le Vert et Argent se retrouvait déjà dans les Cuisines de Poudlard à attendre son frère. Dans la poche de son pantalon se tenait tranquillement un petit sachet transparent contenant une poudre fine et blanche. Un sourire de requin dessina les lèvres de Maëlan qui ordonna aux elfes de maison de lui apporter de la farine, des œufs, du beurre et du sucre. Il retira un peu de farine du bol d’un coup de baguette magique, puis versa le contenu de son petit sachet. Il le jeta ensuite dans la poubelle et attendit l’arrivé de Jude, assis sur une chaise.
Il se balança légèrement, sa tête en arrière à observer le plafond. Au début il cru que son frère lui avait fait faux-bond, et un sentiment de frustration passa dans son cœur. On ne lui refusait rien, surtout pas à lui, les deux jeunes connaissaient son courroux… Mais il se faisait un sang d’encre pour rien puisque, deux seconde plus tard, le tableau s’ouvrit et Maël reconnu son frère qui entrait dans la cuisine. Un sourire dessina les lèvres du jeune Serpentard qui se leva aussitôt.

Maëlan – « Tu m’as fais attendre… »

Ne penser à rien surtout. Et surtout pas à ce qui s’est passé au bal, et dans le quatre-quarts. Et merde, raté. Il y a pensé le Jude. Ca vaut bien de se frapper la tête contre son pot de mandragore. Mince, ça lui fait mal à sa petite tête quand même. C’est vrai qu’on se tape pas la tête contre des pots de mandragore tous les jours, sauf quand on s’appelle Jude Idaho Dashwood il faut croire.
La méthode à adopter pour ne plus y penser est peut-être de s’intéresser au cours, non ? Mais c’est tellement… soporifique. Les paupières de Jude sont lourdes, très lourdes, il n’entend plus que le son de la voie du professeur… et plouf, dans les bras de Morphée. C’est pas très sérieux tout ça. Mais on s’en fout, comme ça il ne pense à rien. Il va bientôt rêver même. Et baver si ça continue.
Mais un cygne enchanté l’arrête à temps. Jude reprend doucement ses esprits et lit le message qu’on lui transmet. ‘’Rejoins-moi dans les Cuisines après le cours.’’ La tête encore dans les vapes, Jude papillonne des yeux et met du temps à comprendre ce que veut dire cette histoire. Il prend le cygne enchanté entre ses mains et compte s’endormir dessus jusqu’à ce qu’il ne s’évanouisse dans l’air et le face se cogner lourdement contre la table. Il jette un coup d’œil à Avril à côté de lui, que ça doit bien faire rire.
Pourtant il n’y a pas de quoi rire en ce moment. Oh et puis pourquoi on s’arrêterait de rire ? Après tout, ce n’est pas l’apocalypse, ce n’est pas la fin du monde. Enfin si, c’est un peu la fin du monde quand même. Le quatre-quarts, les quadruplés qu’on a tous cuits ensemble est en train de se disloquer, tranché par d’affreux couteaux. Mais même si c’est la fin du monde, Jude peut toujours trouver matière à rire. De lui déjà quand il se rend compte qu’il s’est endormi la tête en arrière sur sa chaise et qu’il a du émettre un très agréable ronflement. Le prof lui lance les gros yeux, mais il ne peut que pouffer de rire.
Elles sont loin, alors, les histoires d’Avril, de Maël, D’adonis et même de fin du monde. On s’en fout un peu. On y croit, au monde qu’on a voulu. On y croit au quatre-quarts, toujours, qu’il se reformera. Parce qu’ils ont été moulés ensemble. Autant commencer tout de suite.
Toujours à la ramasse, Jude sort le dernier de la salle de classe et se dit qu’un passage par la salle de bain ne serait pas de mal pour vérifier s’il n’a pas bavé. Oh il en aurait presque oublié le rendez-vous de Maël ! C’est qu’il est tête en l’air le pauvre, toujours. C’est bien pour ça que le grand frère doit prendre soin du petit.
Jude entre enfin dans les cuisines et ses narines sont assaillies d’une douce odeur de beurre, de farine, de sucre et d’œuf, et cela le met en joie car ce sont les ingrédients du quatre-quarts. Oh oui reformons le quatre-quarts.
« Tu m’as fais attendre… » Il n’y a pas de sincère irritation dans sa voix, Jude connait trop bien Maëlan pour savoir quand il est vraiment énervé, et généralement ça finit avec le visage tout cabossé. Il rougit, quand même, un peu honteux. « Désolé… »
Mais sans plus attendre, passons aux choses sérieuses ! Jude se jette sur le bol dans lequel Maël a déjà mis de la farine. Sans même demander l’autorisation il trempe son doit dedans et goute. Oui bon Jude c’est quand même de la farine, ça n’a pas de gout. « Ca ne manque pas un peu d’œuf et de beurre et de sucre tu crois ? »
Et non, il ne sait pas ce qu’il vient d’avaler avec la farine. Et puis même s’il savait, ça ne le dérangerait pas.

Jude – « Désolé… »

Maëlan vit le petit frère rougir et le ton honteux qu’il avait prit le laissa perplexe. Ah bon ? Il était comme ça ? Ca voulait dire qu’il avait oublié leur rendez-vous hein ? Le Vert et Argent ferma les yeux légèrement avant de les rouvrir et de froncer les sourcils, l’air un peu méchant… Non, c’était impossible, on ne pouvait pas oublier un rendez-vous avec lui…

Maëlan – « Tu as oublié hein ? »

Son ton était plein de reproches mais pas pour très longtemps, puisque que quelques secondes après un sourire apparut sur ses lèvres, un peu étrange, qui ressemblait presque à un avertissement. Une fois, pas deux. Mais l’instant d’après sa main se retrouvais déjà dans les cheveux de son frère, à les ébouriffer. Il lui déposa un baiser sur le front et le lâcha pour se rapprocher de la table. Mais aussitôt, Jude s’élance, trempe son doigt dans la farine et le met en bouche. Maëlan ne put s’empêcher de rire en le voyant faire, surpris par sa naïveté.

Maëlan – « Tu sais, c’est de la farine… C’est pas super bon. » Mais lui il savait que la sienne l’était, et il avait envie d’être au même niveau que son frère. « Mais t’as l’air d’aimer ça… »

Alors il l’imita, trempa son doigt dans la farine et le porta à ses lèvres. Un frisson de dégoût passa le long de son dos, mais il fit un effort monstre pour que rien ne se voit sur son visage. Qu’est ce qu’on ferait pas pour son petit frère, franchement ? Et pour la poudre magique, oui oui. Enfin bref. La remarque de Jude au sujet de la farine lui arracha un sourire. Comme ça il manquait des œufs, du sucre et du beurre hein ? Il était trop fort ce petit. En plus il avait reconnu la recette du quatre-quart…
Dans un saladier propre, il versa la farine magique, cassa ensuite les œufs, et commença à tourner. Dans la composition du quatre-quart il y a des petits ingrédients qui se rajoutent, comme du sucre vanillé ou du cacao… Mais Maëlan avait décidé de ne rien rajouter. Non. Pour eux il y avait toujours eu du sucre, des œufs, du beurre et de la farine. C’était eux : Adonis, Indie, Jude et lui-même. Personne d’autres. Il laissa à son frère le soin de rajouter les autres ingrédients et se remit à mélanger leur petite mixture. Lorsque la pate liquide eu une belle couleur, sans aucun grumeaux, il trempa son doigt dans la pâte et le mit dans sa bouche. C’était meilleur là, mh.

Maëlan – « Tiens, goûte là. »

Il trempa son doigt dans la mixture et le tendit au petit frère, un léger sourire en coin. Puis il versa le tout dans un moule qu’il donna à un elfe de maison pour qu’il le mette au four. Heureusement que c’était des fours magiques, la cuisson ne devait durer que quelques minutes, et ils pourraient déguster la poudre magique alors… Un léger sourire apparut sur les lèvres de Maëlan qui prit la cuillère avec laquelle il avait tourné les différents ingrédients. Il l’observa longuement avant de sourire ; une idée un peu folle lui passait. Et s’il s’amusait… ?
Maël se tourna vers Jude, lui offrit un sourire, et… lui lança la pate à la figure. Ouiii, bataille de pate ! Ou plutôt de tout ce qu’il pouvait avoir à porté de main… Puisque le serpent posait déjà sa main sur un bol de farine et commençait à s’éloigner lentement.

« Tu as oublié hein ? » Petit sourire d’excuse. Petit sourire adorable à qui on ne peut rien refuser. Et hop ébouriffage du crâne. Excuse acceptée. Que c’est beau l’amour fraternel, pense Jude. C’est si simple. Faire une bêtise, un petit sourire et être excusé. Que rien ne puisse venir jamais venir entre eux, les séparer les déranger ou quoi que ce soit. Ça pourrait être si beau. Si on y croit. Mais la réalité ce n’est pas ça, même le gâteau le plus soudé s’est détaché, des tensions se sont insinués entre la farine et le sucre délitant le gâteau tout entier. Mais Jude y croit. Jude croit au quatre-quarts. Oui c’est sa religion !
A peine un instant de réflexion, un instant où il savourait l’amour fraternel, que Jude le poney fou s’est jeté sur la farine, sans vraiment porter attention à la nature exacte de cette farine. Non ce n’est pas une farine comme les autres. Il sentira bientôt ses sens un peu vaciller et son esprit vagabonder dans le pays des poneys roses. « Tu sais, c’est de la farine… C’est pas super bon. » Tant pis. Jude hausse les épaules. Il aime la farine lui. Celle de son frère surtout. « Mais t’as l’air d’aimer ça… » Alors Maël fait de même à sa suite. Bon et bien, si tout le monde prend de la farine, dans deux minutes ça va être du joli !
Mais pour l’instant Jude retourne dans sa plus tendre enfance et perd l’usage de la parole et de toute action, en regardant, émerveillé, son frère se saisir d’un saladier et le remplir des ingrédients magiques. Les ingrédients du quatre-quarts. La farine, le sucre, les œufs, le beurre. Quatre parties égales pour former un tout. Pour former le gâteau. Pour former la famille. Car la famille Dashwood c’est une pâtisserie, ou un quatre-quarts de supermarché, au moins. Non c’est le meilleur quatre-quarts au monde que celui qu’ils savent préparer et que Maël prépare sous les yeux admiratifs de Jude. C’est le meilleur parce qu’il y a un ingrédient magique. Une petite poudre magique qui fait tenir tout les ingrédients ensemble. Un peu de magie qui fait tenir tout le monde ensemble. Un peu de magie perdue ces jours-ci. Un peu de magie que Jude recherche aujourd’hui. Peut-être est-elle dans cette petite poudre magique ?
« Tiens, goûte là. » Jude avale le peu de pâte que Maël lui tend au bout du doigt, et répond d’un grand sourire. Pas besoin de mot pour comprendre qu’il est ravi. Maël alors envoie le gâteau à cuire. Oh non il va falloir attendre une éternité avant de pouvoir le déguster. C’est si triste. Jude voudrait pleurer. Pourquoi n’est-ce pas tout de suite ?
Pendant qu’il se sent déprimer il ne voit pas venir la pâte en plein dans sa face. Et SHPIFF, en plein dans le nez. Ca colle eeeeuuh. Et ça lui fait retrouver l’usage de la parole. « Maeeeeeeeel ! » Bon ok on fait mieux comme phrase.
Le temps que Jude ait enlevé le plus gros de la pâte de son visage, Maël est déjà parti plus loin dans les cuisines, farine en main. Les elfes déjà débarrassent le plancher, flairant la bataille. Il veut la jouer comme ça ? D’accord ! « Tu veux la guerre, tu auras la guerre ! » Jude guerrier, on aura tout vu. Jude qui fait la guerre à son frère aussi. Mais ce n’est qu’un jeu. Histoire de se convaincre que toutes les autres guerres ne sont que des jeux.
Jude attrape des œufs restés sur le plan de travail, et cherche Maël du regard. Il a dû se planquer quelque part. Tant pis il le trouvera. Oh un cheveu ! Jude lance un des œufs, et manque la cible de peu. Un deuxième essai et en plein dans le mille. « Je t’ai euuuuuuu ! » Mais c’est quand même pas sympa de l’attaquer avec des œufs-Indie. Non il doit trouver du beurre. C’est lui le petit beurre. Mais faire la guerre avec du beurre c’est pas très pratique.
Jude prend du beurre dans le frigo, et soudain son esprit embrumé se prend d’une idée. Il se met à enduire le sol de beurre, parce qu’un sol glissant c’est plus rigolo. Mais à peine se lève t’il que victime de sa propre farce il retombe par terre. Tant pis, ça le fait rire, lui.

« Maeeeeeeeel ! » Un ricanement s’échappe des lèvres de Maëlan, et un/zéro pour le Serpentard. En plus c’est presque l’un des seuls mots qu’il a dit depuis qu’il est arrivé… Mais ça ne lui déplait pas, du moment que c’est son prénom, et pas celui d’un autre. Oh non, il ne faut pas croire que Maël est fou, il est juste très affectif, très émotif, très amoureux. Parce que ça oui, il l’aime son quatre-quart, un peu différemment, un peu bizarrement. Mais c’est de l’amour fraternel, bien sûr. Quand ils étaient petits, c’était ça. Fais un bisou à Maël. C’était comme un baiser voler, du coin des lèvres, doux comme un nuage. Des jeux d’enfants.
Caché derrière un comptoir, il attend, patiemment, un sourire aux lèvres. Il a l’impression d’avoir quatre ans, qu’ils sont à nouveau dans la maison et que le père est partit –boire, sûrement. En plus, le départ des elfes renforce cette idée. Ils sont retournés à la maison, mais si, vous ne reconnaissez pas les murs de la cuisine ? Moi, oui. Et un œuf claque, juste au-dessus de la tête. Il rit. Puis un second œuf, et cette fois dans ses cheveux bruns. Alors il se redresse, et il ne rit plus. Mince quoi, il s’est fait avoir par le P’tit Frère ! « Je t’ai euuuuuuu ! »Il se retient tout juste de lâcher un juron, parce qu’en présence de Jude, ça n’est pas polie, et le regarde s’éloigner avant de lancer. « T’ose faire ça à la jolie Indiana ? » Un nouveau ricanement et cette fois il attrape une bonne poignée de farine qu’il lance dans le dos du Gryffondor.
Il entend les elfes l’appeler, lui signale que son gâteau est déjà prêt, et Maël hausse les épaules en éclatant de rire. Génial, et alors ? Et il comprend qu’il peut allez le prendre. Alors il va le prendre et ne remercie même pas l’elfe courageux qui lui a tendu le gâteau et tiens, il l’a déjà coupé même. Ils sont magiques ! Et pendant ce petit temps, Jude a eu le temps de beurrer tout le sol, alors quand Maëlan se tourne pour appeler son frère, il le voit tomber. Et il rit, avec lui. Au même moment, il avance d’un pas, et glisse de tout son long. Bon, apparemment la farine n’est pas aussi douée que le beurre. Tant pis. Encore un peu et il s’étalait de tout son long sur le pauvre P’tit Frère. Il se redresse légèrement, content de voir que ni le quatre-quart ni la farine n’est tombé, et lui met un bout en bouche, et tant pis s’il s’étouffe : Maël lui fera du bouche à bouche. Puis il prend une part et commence à la manger. Bientôt ils seront loin, dans le Nerverland, quelque part par là-bas. Alors le Serpent laisse s’échapper un rire, qui sonne comme un écho dans sa tête et tourne sa tête vers Jude en finissant sa part. « Tu es un bonhomme de neige. » Oui, c’est sa perception du moment. Jude tu ressemble à ça. « Mais tu fonds… » Un air triste se peint sur son visage, un air qu’on ne voit que lorsqu’il joue, et il attrape son bol de farine qu’il renverse complètement sur la tête de Jude. Comme ça, il neige, et comme ça, il ne fond pas, et comme ça c’est le plus beau des bonshommes de neige ! « Il te faut des yeux » Alors de son pouce il retire la farine en trop pour pouvoir voir les beaux yeux de son petit frère. « Et un nez. » Il souffle sur la poudre blanche, pour laissez apparaître son nez. « Et une bouche, sinon tu ne peux plus manger. » Alors il enlève la farine, du bout des doigts, comme si d’un moment à l’autre le bonhomme allait s’effondrer. Oh non, Jude, ne t’effondres pas, pitié.
Maëlan mord dans une autre tranche de quatre-quart, observe longuement son frère pour savoir quoi lui faire encore… La poudre magique qui s’est glissé dans le gâteau commence à faire de plus en plus d’effet, et rapidement il trouve. Un sourire un peu étrange, comme s’il était ailleurs, se dessine sur ses lèvres. « Tu te transformes en Princesse si on t’embrasse ? » Il rit en détournant le regard. S’il a toujours tout fait avec sa famille, c’était le dernier truc à faire avec Jude. On ne touche jamais, ô grand jamais, à Jude. Le P’tit Frère. Oh et puis au diable tes airs de Sainte Nitouche, Maëlan, au diable ce que tu as pu sentir lorsque vous n’étiez que des gosses, envoie tout au diable. On engendre du mortel dans cette famille Dashwood, depuis toujours. Depuis qu’ils ont tués leur mère, alors on continuera d’engendrer du mortel parce que c’est dans le sang. Il attire le bonhomme de neige à lui, doucement, et son esprit s’envole loin, très loin. « Transforme-toi ! » Un baiser.

Un instant à peine après que Jude se soit effondré sur le sol rendu glissant par ses soins, Maëlan tombe dans le même piège. Ahah, on a eu beau se moquer du petit frère, il sait se venger sur ses ainés ! Se venger ? Mais non ce n’est pas un mot à mettre dans la bouche de Jude. Mieux vaut lui mettre du quatre-quarts, ce que Maël ne se prive pas de faire immédiatement. Se venger ? Non mais comment cette idée aurait-elle pu lui passer par la terre ? Jude on peut lui faire tout le mal du monde, il ne fera que sourire encore et toujours. Alors c’est surement pour ça que personne n’a encore voulu le tuer. La gentillesse finalement, il n’y a que ça de vrai. Se laisser faire entièrement. N’être qu’un gros jouet. Lui l’intégrité, la dignité, il ne connait pas.
On peut bien le transformer en ce qu’on veut alors. Même en bonhomme de neige. Maël s’assoit devant lui et sans raison apparemment, lui lance : « Tu es un bonhomme de neige. » Mais Jude lui il comprend. Il sait le monde dans lequel est Maël, d’ailleurs il est dans le même, celui farineux où les lustres ont de grands cheveux dorés qui descendent jusqu’à chatouiller son nez. « Mais tu fonds… » Un bonhomme de neige qui fond, c’est triste. Jude va fondre en larmes si ça continue, et il ne sera plus qu’une soupe de neige fondue. La solution vient d’un peu de farine, encore, car la farine résout tout ! Jude pourrait étouffer sous la farine avec laquelle son frère vient de le recouvrir, mais cela ne lui vient pas à l’esprit. Le danger ? Mais moi je me ris du danger ! Ha Ha Ha !
Maël éclate d’un rire qui ne peut s’empêcher de résonner dans la tête de Jude puis dans sa bouche même et enfin dans toutes les cuisines. Les elfes ont dû sentir le truc pas net et déguerpir rapidos. Peut-être vont-ils faire rappliquer le concierge ? Oh allez, ils aiment bien Jude. Qui ne l’aime pas ?
Mais revenons-en au bonhomme de neige qui ne fond plus, mais rit d’un rire à faire rire même les plus coincées des rats de bibliothèque. Mais quand même Maël trouve qu’il n’est pas bien dans son état actuel. « Il te faut des yeux » Du bout des doigts ainsi, il fait une place aux yeux du petit Jude, qui redécouvre le monde et le visage de son frère, ondulant un peu, changeant un peu de couleur. Mais on ne va pas s’arrêter à ça et abandonner le jeu ! « Et un nez. » Il lui souffle dessus comme on soufflerait sur des bougies. « Et une bouche, sinon tu ne peux plus manger. » Comme un sculpteur il fabrique son Jude, il le façonne, et Jude n’a rien contre. Il veut bien être le Jude de Maël, peu importe ce que c’est. Chez les Dashwood, on s’aime ou on ne s’aime pas, c’est tout. Et quand on s’aime, on est prêts à tout.
« Je suis un beau bonhomme de neige maintenant ? » Sa voix se perd un peu dans des ondulations imprévues. Mais peu importe. on ne prévoit rien ici. « Tu te transformes en Princesse si on t’embrasse ? » Oh on peut peut-être prévoir ça. Jude le crapaud c’est en fait peut-être une princesse qui se cache ! Il veut savoir Jude, il aimerait bien être une princesse. Cela même s’il faut s’embrasser. Ca ne le fait pas sauter au plafond lui, d’évoquer un inceste fraternel, tant que c’est consentant. Et puis il l’a déjà fait avec sa sœur, même si les autres ne le savent pas. « Oh oui, une princesse ! Embrasse-moi ! » Il ne sait pas combien cela a démangé Maël toute son enfance. Il s’en est peut-être un peu douté. Mais cela ne l’a pas rebuté. C’est Maël qui ne l’a pas accepté. Qu’il le fasse maintenant, Jude le veut bien.
Et doucement le tyran se laisse charmer par la princesse déguisée en grenouille et l’attire doucement à lui. « Transforme-toi ! » Et il touche ses lèvres. Jude lui rend son baiser, mais il sent quelque chose s’agiter en lui, comme un tourbillon de vents très rapides. Il quitte doucement les lèvres de son frère et sent son corps se secouer toute entier. Pris d’un tremblement irrésistible, il s’ébroue tel un chien mouillé, et jette toute la farine aux alentours, et sur Maëlan par conséquent. Il retrouve son calme, mais ses cheveux sont tout ébouriffés, et ses sens dans tous les sens. Il a les yeux qui pétillent. « Alors je suis une belle princesse ? »
Et puis sans plus penser, il se jette sur les lèvres de son frère et le pousse par terre. Il attrape un morceau de quatre-quarts, le fourre dans sa bouche et le partage ainsi avec son frère. Oh c’est une mignonne princesse si bien élevée. La bouche pleine il essaie d'ajouter : « Et il font quoi après, le prince et la princesse, ils se mangent tout cru ? »