Gavril avait bien entendu discuté, réfléchi, etc. Toutes les personnes qui lui étaient proches y étaient passés, et bien entendu, ils en étaient tous venu à la même conclusion : Retourne la voir. Cela faisait à peu près deux semaines maintenant qu'il l'avait rencontré au Pré-au-Lard. Mais c'était peut-être la première fois qu'il ressentait ce qu'il était entrain de ressentir, et il se demandait jusqu'où il irait par rapport à ce sentiment. Jouer avec le feu, c'était quelque chose de régulier chez Gavril, pourtant, cette fois, il savait qu'il serait brutale, voir insensé de jouer avec celui là de feu. Les flammes semblaient bien plus purs, bien plus... Différentes qu'habituellement. Gavril n'avait cessé de penser à la jolie russe, passant de longues heures précédant le sommeil, à contempler le souvenir qu'il avait d'elle, assis en face de lui, au Trois-balais.

Avalon ne pouvait l'oublier non plus, car machinalement, à chaque fois que Gavril se remémorait ce souvenir, cette dernière, dans son sommeil, ne cessait de le voir apparaître, avant de disparaître aussi vite. Comme si l'obsession de Gavril s'installait doucement chez Avalon. Il n'y a nul doute qu'Agaliarept agissait ainsi sans même s'en rendre compte. La raison étant que c'était probablement la première fois qu'il ressentait une émotion aussi pure.

Il devait être tard. Peut-être un peut plus de trois heures du matin lorsqu'il quitta le Knock, Knock. Un vent glacé (pour le mois de Mai) l'avait convaincu de prendre un épais manteau au col en fourrure noir. Son regard était sombre, son visage semblait souffrant. Il ferma la porte derrière lui après avoir croisé le regard de Narek. Un regard qui semblait long de sous-entendu, mais ils ne se dirent rien, tout en sachant très bien ce que cela signifiait. Et pour la première fois, peut-être, Narek semblait comprendre. Il semblait tout autant souffrir que son fils. Quelque chose les avait changé ici, il le savait, et lorsque ce dernier croisa son reflet dans le miroir de l'entrée, il l'explosa en milles morceau, tout en hurlant : « C'est de votre faute, putain de merde ! »

Gavril ferma doucement les yeux, entendant ces paroles, raisonnant avec violence dans sa tête. Maintenant que le mal était fait, autant le vivre jusqu'au bout. Il transplana dans un nuage de fumé noir.

Lorsqu'il réapparut dans un panache de fumé noir, Gavril était devant le lit d'Avalon. Il la contempla, la laissant quelques instants encore dans les bras de morphé, l'observant avec une attention toute particulière. Finalement, il vint s'asseoir près d'elle, avant de lui dire :

« Excuse-moi, Avalon... J'ai besoin de te parler. »

Il leva délicatement sa main pour la poser avec douceur sur l'épaule de cette dernière. Une boule de stress lui dévorait l'estomac, tandis que son sang battait à ses oreilles avec force.

Xzander... un mystère sur lequel elle s'était penchée durant des heures sans trouver de réponse qui aurait pu la satisfaire. Il avait littéralement fuit sans quelle puisse comprendre quoique ce soit. Et cela ne s'était pas arrangé au fil des jours et des heures. N'ayant personne à qui se confier, elle s'était retrouvée seule avec ses interrogations qui tournaient dans son esprit telle une spirale qui allait finir par la rendre folle. Heureusement pour elle, son stage finit par commencer et elle eut l'occasion de se vider l'esprit durant quelques heures des journées. Pourtant, tout revenait avec beaucoup plus de force quand elle se retrouvait seule chez elle.

Avalon n'osait même pas songer aux nuits qu'elle passait. Généralement, elle ne rêvait pas. Ayant dépourvue de la vue, elle n'avait aucune raison, aucune chose l'aidant à rêver. Pourtant, dès qu'elle fermait les yeux, elle "revoyait" Xzander, sentait son odeur, sa présence et sa chaleur. A tel point qu'elle dut finir par être réaliste avec elle-même: cela tournait à l'obsession. Elle passa des heures à lutter contre l'envie de le chercher. En revanche, elle ne parvint pas à résister à l'envie de lui envoyer une sucette à la menthe, comme pour se rappeler à lui. Sa réponse l'avait un peu plus plongé dans un abîme de questions sans fin.

Ce jour-là, elle s'était enfin décidée à se coucher tôt en espérant obtenir quelques heures de sommeil sans rêver de lui. Avalon était glacée entre ses draps malgré le feu qui brûlait dans la cheminée. Tremblante, elle se blottit dans le sommeil, le visage serein mais le poing crispé sur son oreiller. Quelques heures plus tard, elle ne perçu pas la présence d'un étranger dans son environnement proche. Ce fut pour cela que quand on posa une main sur son épaule, elle tira le bras vers elle pour faire tomber l'intrus sur son lit. Souple, elle se hissa à la califourchon sur sa cible et ses doigts serrèrent le cou mais pas suffisamment pour interrompre la respiration.

« Qu'est ce que vous voulez? »

« Qu'est ce que vous voulez ? »

Ni une, ni deux, il se retrouvait sous elle. Cette dernière le chevauchant tout en lui maintenant ses mains douces et délicates contre sa gorge. Elle pouvait sentir son pouls qui semblait étrangement bas, des pulsations vraiment espacés. Il donnait cette impression d'être relativement calme, mais c'était bien tout le contraire. Un travail monstrueux était donc fait pour éviter d'endommager son hôte, son réceptacle pour qui il avait noué un lien particulièrement étrange. Il la regarde, laisse un ange passait, tandis qu'il levait doucement ses mains à la hauteur des poignets de la jolie russe. Il lui fit lâcher prise avec douceur, la poussant légèrement pour qu'il puisse, au moins, se mettre sur les coudes. Son regard hésite entre un rouge vermeil et un marron noisette porté à incandescence.

« L'eau a coulé sous les ponts... J'ai réfléchi à certaines choses. Et cela va peut-être te paraître abrupte, mais j'ai ressenti des émotions on ne peut plus forte à ton encontre. Je te désire Avalon. Mais je ne peux pas. »

Son corps est chaud, il conserve toujours son sourire. Machinalement, il se met en appui sur un seul coude, pour lever délicatement sa main à la hauteur de la joue de la fille de l'est. Gavril lui caressa la joue avec une certaine douceur. Une de ces douceurs enivrantes. Il figea son geste, tout en gardant ses doigts sur la pommette d'Avalon.

« Cependant, je pense que tu te dois de savoir certaines choses. Et j'ai également besoin de savoir ce que tu ressens. » Il eut un léger sourire, avant de reprendre, d'un air amusé, mais totalement sincère. « Par contre, c'est la première fois que je dis ce genre de chose. Généralement, je ne parle pas vraiment. »

Ce qui voulait tout dire. Un mec comme lui, il n'avait qu'à claquer des doigts, même si c'était loin d'être fort louable. Mais pas tout le monde possède, ou se fait posséder, par un démon digne des plus grands incubes. Une beauté démoniaque... Ça plaît toujours aux filles. Même aux plus frigides.

L'odeur et la chaleur de l'intrus l'atteignirent avec quelques secondes de retard, largement suffisante pour qu'elle soit en train de serrer ses doigts autour du cou. Elle le reconnu immédiatement, la prise de sa main fut moins ferme, devint presque caresse alors qu'elle sentait encore le pouls battre au bout de ses phalanges. A croire qu'il était loin d'avoir peur d'elle, qu'il savait exactement ce qu'il faisait. Et le frisson qui hérissa sa peau quand il attrapa ses poignets fut parfaitement perceptible pour lui. Sous la surprise, elle ne réalisa pas qu'elle était encore assise à califourchon sur ses hanches. Loin d'elle était l'idée de l'indecence de sa position et de sa tenue.

Avalon ne lutta pas quand il lui fit lâcher prise et se laissa totalement faire, les mains posées sur le torse de l'homme qui se redressa. Elle n'eut même pas la présence d'esprit de se décaler ou de faire un mouvement visant à éviter la prolongation de cet instant qui aurait pu être gênant. Quand il commença à lui parler, elle ferma à demi les paupières, un sourire naquit sur son visage et elle murmura le prénom de son "invité". Pourtant, le retour à la réalité fut rude quand il lui annonça qu'il la désirait. Elle rouvrit les yeux et à la manière dont elle le regarda, il pu deviner qu'elle ne comptait pas le laisser partir sans qu'il s'explique.

Oh, il pouvait avoir le corps chaud, sa main posée sur sa joue avec une douceur qui la touchait, elle voulait entendre ce qu'il avait à lui dire. Instinctivement, elle inclina la tête pour accentuer la pression des doigts de Xzander sur sa joue et un sourire rêveur naquit. Et à nouveau, la voix vibrante s'éleva, provoquant un sourire moqueur de la part de la jeune femme quand il mentionna le fait qu'il ne parlait pas vraiment... généralement. Elle rit doucement et se redressa pour pouvoir se lever. Quelques instants plus tard, elle ranimait le feu d'un claquement de doigt, couvrait ses épaules nues d'un châle... Non pas pour la décence mais surtout parce que quitter la proximité de Xzander lui avait fait prendre conscience de la température de la pièce.

Elle fit apparaître des boissons chaudes avant de revenir s'asseoir contre lui en frisonnant. Elle lui tendit une tasse et enfin, lui accorda ce qu'il semblait attendre.

« Comment vais-je pouvoir rivaliser avec toutes les filles que tu attrapes sans parler, Xzander? »

Avalon ne lui reprochait rien, elle le taquinait gentillement. Elle dodelina de la tête et reprit plus sérieusement.

« Tu as donc besoin de savoir ce que je ressens... Tu me fascines et m'attires à tel point que cela tourne à l'obsession la plus complète. »

Elle était sincère et en parlant, elle avait attrapé ses doigts pour les nouer aux siens. Elle n'en était pas encore à un stade plus... "métaphysique" pouvait-on dire. Elle ne s'était réellement liée qu'une seule fois et se souvenait encore à la perfection ce que cela pouvait faire. Elle porta les doigts de Xzander à ses lèvres et y déposa un court baiser avant de terminer.

« Je n'ai pas l'habitude de parler de ce que je peux bien ressentir. Généralement c'est: je te veux, je te prends. Mais là... J'ai beau te désirer mais... Tu ne peux pas, n'est ce pas? »

Avalon lui sourit puis porta sa tasse à ses lèvres en se demandant si elle n'aurait pas mieux fait de plus s'expliquer ou pas, si ce qu'elle venait de lui dire n'allait pas changer le cours des heures. Elle resserra sa prise sur la main de l'homme comme pour lui dire: tu n'as pas intérêt à vouloir t'enfuir... encore.

Il avait un petit sourire tranquille, l'air serein, apaisé, bien. Gavril l'observait avec toute la douceur dont il était capable, avant de baisser son regard vers le reste du corps de la jolie russe. Il eut un léger soupir, avant de redresser le regard, se laissant tomber sur le lit. Cette dernière lui avait répondu avec cette douceur qu'il trouvait étrange, mais plaisante. Délicate, mais attirante. Il finit par se mordre doucement la lèvre lorsque cette dernière se leva, rajustant un châle après avoir claqué des doigts pour redémarrer le feu dans l'antre de la cheminée. Gavril ne disait rien, l'observant se déplacer avec cette aisance particulièrement intrigante étant donné sa non-voyance.

« Comment vais-je pouvoir rivaliser avec toutes les filles que tu attrapes sans parler, Xzander? »

Elle le taquinait, et il ne put réprimer une furieuse envie de sourire. Lui dire qu'elle n'avait pas à s'inquiéter, c'était trop nul, et tout simplement has been pour un mec comme lui. D'autant plus que cela ne lui vint même pas en tête. Il était trop au dessus de ce genre d'acte à la pseudo romantique pour se laisser aller comme ça. Il était certes attiré par Avalon d'une façon toute particulière, au point d'en fantasmer, mais il n'en était pas à ça. Gavril restait tout de même un homme, sa paire de couilles toujours bien à leur place.

« Tu as donc besoin de savoir ce que je ressens... Tu me fascines et m'attires à tel point que cela tourne à l'obsession la plus complète. »

Cela lui fit plaisir, et il eut du mal à ne pas le montrer. Surtout lorsque le contact physique vint se faire à nouveau lorsqu'elle lui saisit les doigts. Des doigts couverts d'anneaux d'argents et de fers. Un léger sourire vint planer sur le visage du jeune homme avant de l'entendre de nouveau parler.

« Je n'ai pas l'habitude de parler de ce que je peux bien ressentir. Généralement c'est: je te veux, je te prends. Mais là... J'ai beau te désirer mais... Tu ne peux pas, n'est ce pas? »

De sa main valide, il portait la tasse de boisson chaude qu'elle l'avait fait apparaître, donnant ainsi à la discussion quelque chose de tout à fait normal. L'approchant de ses lèvres, il en but une longue rasade, avant de briser le silence, le temps qu'un ange ou deux passe.

« Disons que je peux. Que je peux même le faire maintenant... » Son sourire fut tellement séducteur, que la demoiselle, malgré qu'elle fut aveugle, pouvait presque le voir à travers l'obscurité dans lequel elle semblait être. « Mais... Ce n'est pas comme ça que je veux faire avec toi. Je crois que de toutes les hum-... Femmes, tu dois être la première à m'ébranler les intérieurs. »

Il se redressa sur le lit, posant sa tasse sur la table de chevet. Gavril l'observait avec une expression particulièrement sérieuse, mais il y avait quelque chose de très doux, de très protecteur. Il reprit doucement.

« Pour tout te dire, je n'ai d'humain que l'enveloppe corporelle. »

Pour confirmer ce qu'il disait, pour la convaincre de ce qu'il lui racontait, Gavril s'approcha de cette dernière, lui déposant un léger baiser sur les lèvres.

D'un coup, un flash, une vision. Elle pouvait voir ce qu'il était réellement. Un démon. Devant elle, il y avait l'un des suppots de Satan, sous les ordres d'un des plus puissants démons majeurs du nom d'Adramelech. Agaliarept le voyant, Agaliarept le conseiller d'Adramelech. Autours de lui, il y avait l'enfer, un lieu aux atouts richissimes, mais avec ce petit quelque chose de malsain que l'on pouvait retrouver dans n'importe quel maison close, ou encore, film à fantasy-théologie qui passait de temps à autre sur la boîte à images – télévision – des moldus. Elle pouvait le voir comme il était physiquement, ses yeux particulièrement rouges, aucune ombre au sol, et ce petit quelque chose de volontairement séduisant. Il lui avait envoyé ses images directement au cerveau, lui permettant ainsi d'avoir une certaine vision des choses.

Gavril retira ses lèvres, avec douceur, restant à quelques centimètres d'elle, son souffle caressant la peau d'Avalon.

« Tu en penses quoi... ? »

Son avis semblait lui être important. Il avait besoin que cette dernière lui montre qu'elle s'en fichait, ou qu'elle comptait tout simplement se jeter sur le premier exorciste de bas-étage pour le renvoyer dans l'enfer, le plus rapidement possible. Cette attente lui également comprendre à quel point, il était dangereux d'accepter les émotions qu'il ressentait. Son hôte n'y était pour rien. C'était à peine si il était intéressé par Avalon. Pour tout vous dire, Gavril – celui qui n'est pas démon – s'en fichait éperdument, cherchant toujours un moyen de reprendre le contrôle sur son corps, malgré ce que Gavril lui avait promit.

Avalon se sentait observée dans le moindre de ses gestes. Elle ne pouvait pas voir le regard qu'il posait sur elle mais quelque chose en elle le sentait. A croire qu'elle avait un sonnar spécial Xzander qui lui indiquait précisément là où étaient posées ses prunelles dont la couleur lui était encore inconnue. Mais cela ne l'empêcha pas de faire en sorte qu'ils soient bien même si cela sous entendait qu'elle s'éloigne de lui... pour pouvoir mieux revenir et lui fournir les réponses qu'il attendait. En le taquinant, elle ne voulait pas qu'il la rassure. Les mots vides de sens n'avaient plus court pour elle depuis des années. Elle lui en fut reconnaissante de ne rien dire.

En lui attrapant les doigts, elle prit conscience de combien il avait attendu sa réponse. Nullement affligée par le fait qu'elle l'avait fait patienter, elle continua sur sa lancée avant d'être étonnée de n'avoir qu'un silence presque ravi après que le son de sa voix se fut évanoui dans la pièce.

« Disons que je peux. Que je peux même le faire maintenant... »

Elle haussa un sourcil. Oh, elle le pensait parfaitement capable de le faire dans la seconde. Et le sourire séducteur qu'il lui adressa et qu'elle perçu étrangement bien, n'était pas pour lui infirmer ce type de pensées. En revanche, il l'étonna en lui disant qu'il ne voulait pas faire ainsi avec elle et qu'elle était la première à l'ébranler ainsi. Pourtant, elle n'avait rien fait, se contentant de suivre les fils de l'attirance et de sa chaleur. Elle sourit avec douceur puis se tendit quand elle le sentit se redresser. Par réflexe, elle serra encore sa main, ne souhaitant pas qu'il parte déjà. Les deux semaines avaient été terriblement longues à rêver de lui sans se résoudre à le rejoindre. Maintenant qu'il était là, elle n'avait pas envie de le laisser s'enfuir comme la dernière fois.

« Pour tout te dire, je n'ai d'humain que l'enveloppe corporelle. »

Pardon? Le souffle d'Avalon se bloqua dans sa gorge. Elle hésitait vraiment entre le croire et lui demander s'il ne se moquait pas d'elle. Depuis sa mésaventure au Chaudron Baveur, elle savait qu'il n'y avait qu'un type de personnes pouvant n'avoir d'humain qu'une enveloppe corporelle. Elle se crispa et ce fut pour cela qu'il l'a surprit autant en déposant légèrement ses lèvres sur les siennes. En d'autres temps, la jeune femme en aurait profité pleinement et se serait même débrouillée pour que cela s'éternise. Mais ce n'était pas un temps normal... D'autant plus qu'elle fut clouée sur place par ce qui s'imposait à son esprit.

La vision se grava dans ses souvenirs. Et en réalisant ce qu'il lui montrait, un long frisson remonta le long de son échine. Sous le choc, elle ne respirait plus, son coeur battait follement et ses paupières se fermèrent. Le frisson devient tremblement et elle était à deux doigts de paniquer littéralement quand il se recula.

« Tu en penses quoi... ? »

Que devait-elle en penser? Tremblante, elle porta sa tasse à ses lèvres et murmura.

« Je devrais appeler un exorciste... »

En disant cela, elle n'avait pas lâché ses doigts. Elle ne comptait pas le faire. Suivant le souffle qui caressait toujours sa peau, elle se pencha vers lui pour pouvoir déposer ses lèvres à la comissures des siennes avant de reprendre sa place, le visage baissé.

« Il y a deux semaines, je t'aurais dit que je m'en moquais, sans hésiter... Mais maintenant... L'un de tes semblables m'a possédé il y a quelques jours, Xzander. Avant que je puisse t'affirmer que je m'en moque complètement que tu sois... ce que tu es, réponds à cette question: est-ce que ton hôte souffre comme moi j'ai souffert? »

Sa voix était toujours aussi douce, elle n'avait pas lâché sa main mais ses tremblements n'avaient pas cessé. Il ne lui faisait pas peur et pouvait aisément le comprendre à la manière dont il lui parlait. Non, c'était le souvenir de ce qui s'était passé qui la hantait encore quand elle en parlait. Au fond d'elle-même, elle s'en moquait de la souffrance de l'hôte. Elle voulait simplement comprendre pourquoi tout s'était passé aussi douloureusement pour elle, si elle avait quelque chose de particulier qui attirait les suppôts de Satan... Quoique pour Xzander, elle ne parvenait pas à le considérer comme un parangon du Mal.

LOVE THE WAY YOU LIE - eminem.

Il sentit cette dernière se crispait lorsqu'il lui avoua la vérité à demi-mot. Il eut un léger sourire, sans réellement savoir si c'était une once de tristesse, ou un sourire juste pour le faire. Gavril baissa légèrement le regard, avant de lui demander ce qu'elle en pensait. Ne pas savoir était quelque chose qui énervé Gavril, qui l'excitait d'une certaine façon. Lui, qui savait tout. Lui, qui était le démon de la vision, l'un des prophètes au service des démons supérieurs, et en particulier d'Adramelech. Gavril releva cependant son regard rougeoyant vers Avalon. A quoi bon le cacher désormais.

« Je devrais appeler un exorciste... »

Gavril ne laissa rien paraître, même si, peut-être par pur défi, il lui aurait dit de le faire. Mais il n'était pas là pour montrer sa force, ni même pour l'impressionner. Il était là pour lui parler, pour, peut-être, lui expliquer ce qui le menait ici. Gavril avait baissé de nouveau le regard, avant de l'entendre de nouveau parler. Elle se pencha vers lui, l'embrassant du bout des lèvres.

« Il y a deux semaines, je t'aurais dit que je m'en moquais, sans hésiter... Mais maintenant... L'un de tes semblables m'a possédé il y a quelques jours, Xzander. Avant que je puisse t'affirmer que je m'en moque complètement que tu sois... ce que tu es, réponds à cette question: est-ce que ton hôte souffre comme moi j'ai souffert ? »

Une question qui le fit réfléchir. Car même si il faisait tout pour limiter les dégâts psychologiques et mentaux chez son hôte, Agaliarept ne put s'empêcher de se poser la question. Peut-être la solitude ? Il nota, cependant, son ton de voix qui redevint un peu plus doux. Gavril lui fit un léger sourire, avant de lui caresser délicatement la joue. Finalement, il brisa le silence.

« Non... Du moins, pas comme tu as du souffrir. J'ai passé un pacte avec mon hôte. Lorsque je m'en irais, il gardera certains de mes pouvoirs. M'enfin, ça il ne le sait pas. Ce qu'il sait, c'est que son père et sa maîtresse se sont oubliés, sa mère ne crèvera pas de sa dragoncelle dont elle sera immunisée, et ils ont récemment gagné à la loterie magique une sommes de plus importantes. Et... En échange, il m'a laissé son corps en pensant faire une bonne action pour les siens. »

Gavril eut un léger sourire. Ce qui le rassura. Malgré tout, il arrivait à rester celui qui l'était... Même si il se sentait partir, comme si il se laissait enfin porter par la longue et tumultueuse rivière de la vie.

Sa main plus ou moins crispée sur sa tasse, elle attendit la réponse de Xzander, habitée par une apréhension sans nom. Et s'il partait, mécontent de la réponse qu'elle venait de lui fournir? Elle avait conscience que tout s'arrêterait si elle n'était pas capable de l'accepter comme il était. Elle était pourtant prête à le faire, ayant une perception des choses qui n'appartenait qu'à elle et issue de sa compréhension étrange du monde dans lequel elle évoluait. La caresse des doigts sur sa joue la fit frémir et fermer à demi les yeux. Elle avait l'impression qu'il comprennait pourquoi elle venait de l'interroger ainsi.

Rien ne l'empêcha d'écouter ce qu'il avait à lui dire comme réponse. Elle demeura un moment pensive avant de tendre le bras pour déposer sa tasse près de celle de son invité surprise. Elle comprenait désormais la différence qu'il y avait. Un soupire s'échappa de ses lèvres entr'ouvertes.

« Un pacte... Je comprends. Merci, Xzander. »

Avalon rouvrit les yeux et tourna son visage vers lui afin de lui offrir un sourire lumineux. Ce qu'elle avait vécu avait été terrible parce que non désiré. Elle avait lutté au point de se faire torturer un millier de fois par secondes. Elle avait vécu le calvaire de la moindre des victimes de celui qui l'avait pris pour hôte. Elle ne se souvenait que vaguement de la scène, de la lumière et de la voix qui l'avait aidé à sortir de l'obscurité... Enfin, façon de parler en ce qui la concernait. Désireuse de changer de sujet, elle fit remarquer.

« J'avais raison... Tu es véritablement splendide...Cela devrait être interdit... »

La jeune femme laissa échapper un rire amusé. Sa petite plaisanterie prouvait qu'elle l'acceptait tel quel. Et au cas où il n'ait pas encore très bien compris, elle chercha sa joue pour pouvoir l'attirer à elle et daigner enfin lui rendre le baiser qu'il lui avait donné quelques instants plus tôt. Il avait les lèvres brûlantes et elle se retint de justesse de prolonger un peu plus l'échange. Elle se recula, les joues délicatement rosées. Vaguement gênée par sa témérité, elle chercha à récupérer sa tasse et échoua lamentablement dans son entreprise. Les deux tasses vacillèrent un court instant avant de tomber sur le sol et renverser leur contenu durant leur trajet.

Il ne put s'empêcher de sourire à sa dernière phrase. Elle semblait bien l'accepter, ce qui lui fit énormément plaisir. Ses yeux prirent une jolie teinte vermeil, désirant montrer la part de lui-même dont il venait de lui parler. Gavril baissa le regard, saisissant délicatement les mains d'Avalon. Il les porta à ses lèvres, avant de relever le regard vers l'alchimiste. Son sourire était toujours présent, prenant de plus en plus de chaleur. Une expression coquine sur son visage, il murmura :

« Mon hôte n'est pas au courant de tout cela... Je veux dire, il sait ce que je fais, il voit ce que je fais, il entend tout ce que j'entends. Mais il ne ressent pas pour moi. »

Gavril s'approcha de la jolie russe, son visage étant proche du sien. Finalement, il déposa un baiser sur les lèvres de la jeune femme, avant de se reculer, un espèce de sourire sur ses lèvres. Un second baiser vient se poser sur les lèvres d'Avalon, mais ce dernier semblait plus confiant, comme si il avait gagné en confiance avec cette dernière. Gavril porta l'une de ses mains sur la joue d'Avalon qu'il caressa tendrement, alors qu'il se reculait pour mieux l'observer.

« Je suis passé pour ça. Et uniquement ça. » Gavril eut un sourire. « J'ai l'impression qu'il me pousse des ailes dans le dos... »

Son regard se fait brillant avant de reprendre une couleur noisette. Il déposa un dernier baiser sur les lèvres d'Avalon avant de disparaître.

Sur le lit, il y a une rose rouge. Lorsqu'Avalon la prendra, cette dernière dégagera une douce odeur de rose avant de se consumer dans une espèce de fumé noire qu'une brise venue de nulle part aura soufflée.

Lorsqu'elle s'endormira, elle fera un rêve particulièrement coquin. Au petit matin, elle aura tout oublié.

Les paupières mi closes, Avalon profitait de la présence chaleureuse à ses côtés. Pour la première fois depuis des années, elle ne se sentait plus seule... De là à dire qu'il allait rester avec elle, il y avait tout un monde à parcourir mais pour l'instant... Elle profitait sans aucune gêne, serrant ses doigts et lui offrant un sourire. Elle acquiesça en silence quand il lui dit que son hôte ne ressentait pas pour lui. La jeune femme l'avait comprit instinctivement mais lui elle était reconnaissante de lui avoir donné ces précisions. L'instant d'après, il la surpris en cherchant ses lèvres pour un court contact.

Elle frémit, sourit et se laissa porter jusqu'à lui pour un second baiser. Plus assurée, elle soupira de bien être et quand ils se séparèrent, un sourire d'une infinie tendresse illuminait ses traits. Elle regrettait de ne pas pouvoir plonger son regard dans le sien... se moquant littéralement du fait qu'il soit rouge vermeil. La présence de Xzander l'apaisait mais bien décidée à ne pas s'assoupir en sa présence, elle joua avec ses doigts, remontant parfois les siens le long de son poignet. En revanche, elle haussa un sourcil quand il lui avoua qu'il était passé uniquement pour "ça"... Mais qu'était-ce? Le baiser? Sa présence? Son aveu?

Ses interrogations purent se voir sur son visage mais elles s'effacèrent quand il avoua son impression. Elle eut un rire léger, amusé et euphorique, prouvant par là qu'elle partageait son impression... Néanmoins, celle-ci disparu au moment même où le démon la quitta. La jeune femme ne comprenait pas pourquoi il avait cette manie d'aller et venir sans un mot... Durant un instant, elle se demanda quand elle allait le revoir et devant l'incertitude de la réponse, elle claqua ses mains l'une contre l'autre, activant les sceaux présents sur ses paumes. Elle fit disparaître les tasses renversées et les tâches et ce ne fut que lorsqu'elle se recoucha qu'elle réalisa qu'il lui avait laissé un présent...

Avalon s'endormit avec le sourire pour la première fois depuis plus de six ans.