Un vent frais balaya les quelques mèches échappant de son bonnet autour de son visage. Elle frissonna. Bien qu'emmitouflée dans une demie douzaine de pulls surmontés par son uniforme, elle pouvait encore sentir le froid mordant de l'hiver. Glacial et sans pitié. C'était par une telle nuit que leur professeur de Métamorphose, Elthiriel Sampiero, avait imposé aux âmes courageuses un cours de rattrapage. Un cours de métamorphose, en pleine nature, à l'aube d'une nuit rigoureuse et de surcroît dans la Forêt Interdite. Levé la prohibition de pénétrer la forêt aux élèves était chose rare et peu courante. Aussi, la jeune serpentard comptait en avoir pour son expérience et son temps. En effet, elle avait du longuement se préparer à une telle excursion nocturne. Fragile de nature, elle, plus que quiconque devait faire preuve d'une attention toute particulière quant à sa santé afin que personne ne se doutât de sa vulnérabilité physique. Elle s'était autorisée au repas trois gouttelettes de solution de force, préparée deux ans plus tôt en cours de potion et s'était imposée la prise de Poussos une fois de plus dans la semaine. Véritable torture. Rien que d'y repenser lui donnait la nausée. Rattrapage... qu'est-ce que je fous là ! Je n'en ai même pas besoin, maugréait-elle intérieurement. En plus, je suis sûre que l'idée de nous abandonner dans la forêt lui a vaguement effleurer l'esprit...

Elle vérifia une dernière fois le contenu de son sac avant de rejoindre Sempiero à l'orée de la forêt. Son pas était décidé. Sur son visage d'une pâleur diaphane s'esquissa un sourire tranquille et serein alors que son regard brillait de curiosité et d'avidité. L'élève studieuse et modèle dans toute sa splendeur. Ses yeux rencontrèrent ceux de son professeur, scrutant l'obscurité. Première arrivée, remarqua-t-elle, fière. Cette observation n'avait rien d'étonnant. Elle avait cinq minutes d'avance. Rien de tel pour faire étalage de sa bonne volonté.
- Bonsoir Professeur Sampiero, dit-elle d'une voix posée lorsqu'elle fut arrivée à sa hauteur.
Un sourire radieux étira ses lèvres mais bientôt son visage reprit une expression impassible et paisible. D'un battement de sourcil la jeune préfète détailla son professeur puis porta son attention sur la forêt. La jeune femme n'avait laissé sur elle nul indice visible de leurs activités nocturnes à venir. Seul fait notable, Sampiero portait, pour une fois, le vêtement professoral règlementaire. Une fois n'est pas coutume, pensa Velvet. Et elle sourit intérieurement. Elle sentait une sorte de tension émaner de son professeur. Une excitation mal déguisée. Un mystère à découvrir... il promettait déjà d'être, intéressant.

Cependant qu'elle détaillait la Forêt Interdite, elle se remémora les maintes fois cette terre prohibée, foulée. Rien que de petites explorations aux desseins purement expérimentaux, car en effet, la forêt regorgeait de plantes aux propriétés vertueuses et – ou - au contraire toxiques. Attirail nécessaire à la concoction de potions dont elle avait le secret. Combien d'élèves la rejoindraient ? Peu, si tant était que quelqu'un ne vinsse... Velvet se retourna vers son professeur, silencieuse.

Arrogance était son second prénom et le destin l'avait bien choisi. Velvet Arrogance resta froide face au retrait de points de Sampiero. Un prélèvement qu'elle jugeait outre mesure injustifié. Sa métamorphose avait été parfaite. Aussi, elle ne ressentit dans sa poitrine qu'un sentiment de satisfaction éméchée qui se transforma en une morne insensibilité. Sampiero manquait manifestement d'impartialité bien que sa camarade ne l'eût encore remarqué. Cela ne faisait cependant qu'amuser davantage la jeune préfète. Elle sourit intérieurement alors que son visage n'avait pas changé d'expression. Un faciès marmoréen.

Elle suivit du regard les indications du professeur qui leur faisait par de ses instructions sans relever sa première remarque. Était-ce une façon détournée de leur faire savoir que leur présence l'indisposait ? Ce cours était ouvert à tous. Chacun ses choix. Et si sa présence déplaisait à qui que ce fût. Tant mieux. La jeune Celte avait l'air quelque peu contrariée par la tournure que les évènements prenaient et de plus en plus mécontente de l'avoir pour seule camarade, conclut-elle lorsqu'elle mit une certaine distance entre elles. Velvet sourit tout en continuant son chemin d'un pas allant malgré l'obscurité. Son apparence décontractée dissimulait sa vigilance. Ce n'était pas la première fois qu'elle s'aventurait dans la Forêt Interdite, ce pourquoi, elle était particulièrement consciente des dangers qu'elle pouvait y rencontrer. Un mur de ronces de deux mètres s'imposa à elles. Llelwellyn en métamorphosa une portion en une porte ou du moins en un battant de porte dont elle n'avait changé la nature roncière. Velvet fronça quelque peu des sourcils. Elle rectifia simplement le sort de la Poufsouffle et fit apparaître gongs et poignée. Elle faillit poser sa main sur la poignée avant d'interrompre soudainement son mouvement. Impossible de l'ouvrir. Les ronces la transperceraient. Elle considéra quelques secondes le mur de ronces le balayant d'une petite lumière bleue. Imperceptiblement, il bougeait. La poignée et les gongs se défirent. Disparurent. Ses branches, souples, s'entremêlaient, se démêlaient, parfois imperceptiblement, s'échappaient du mur. Sacrées ronces, songea-t-elle. Finalement, tu n'avais pas raté ton sort Llelwellyn...

Interdite, elle leva sa baguette et transforma le mur de ronces, en un mur de verre. Elle avait choisi cette matière transparente afin de pouvoir distinguer ce que le mur de ronces masquait n'ayant aucune confiance en Sampiero. Elle la pensait aussi dangereuse que maintes créatures de la Forêt. Mais il n'y avait rien d'autre qu'un sentier soigneusement balisé de rubans rouges derrière le mur. Aussi, elle dessina dans le verre une porte qu'elle ouvrit et passa en toute sécurité. Elle sentit des sueurs froides la prendre de parts et d'autres. Premier obstacle. Mais sûrement pas le dernier.